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    La renaissance du temps article 9 (vie et mort de l'univers)

     

    J'écris mon blog pour partager ma soif de connaissances, mes réflexions et mes passions et mes lectures. Dans ces articles, je voudrais partager "ma lecture" du livre de Carlo Rovelli "par-delà le visible". Ecrire ce que je retiens de mes lectures me permet de réfléchir à la compréhension que j'en ai. je mets entre guillemets les passages qui me semblent importants ou qui me frappent. Et par dessus tout je fais des recherches sur internet pour compléter ma lecture avec le maximum de liens que souhaite responsables, qui permettent aux lecteurs d'approfondir la connaissance du sujet.   

     

     

    The singular universe and the reality of time

     

     

     

     

    Carlo Rovelli par-delà le visible Mon article 7 Le mystère, suivi de: le mystère et l'information avec ma lecture du livre des frères Bogdanov "au commencement du temps"

     

    Autres liens: http://www.philipmaulion.com/article-bienvenu-au-moment-present-de-lee-smolin-117515126.html: Bienvenue au ‘Moment Présent’ de Lee Smolin.

    http://www.philipmaulion.com/2017/05/emergence-pourquoi-les-physiciens-recourent-ils-a-cette-notion.htm:l Emergence : pourquoi les physiciens recourent-ils à cette notion ?
    https://fr.wikipedia.org/wiki/Lee_Smolin:

    Lee Smolin et Roberto Mangabeira Unger ont construit un ensemble d'hypothèses constituant une philosophie de la nature1 :

    1. Il n'y a qu'un seul Univers. Il n'y en a pas d'autre ni quoi que ce soit qui lui soit isomorphe.
    2. Tout ce qui est réel est réel à un instant donné, qui est une succession d'instants. Tout ce qui est vrai est vrai à l'instant présent.
    3. Tout ce qui est réel à un instant est un processus de modification menant à l'instant suivant ou au futur. Tout ce qui est réel est donc le résultat d'un processus à l'intérieur duquel il est la cause, ou il implique, les instants futurs.
    4. Les mathématiques sont déduites de l'expérience comme une généralisation de régularités observées où le temps et les particularités sont supprimées.

     

    « La gravitation quantique à boucles décrit l’espace comme un réseau dynamique de relations »2.

    Grosso modo, l'espace-temps ne serait pas continu et uniforme, mais granulaire et discontinu. Il existerait un espace et un temps indivisibles. Cette théorie simple à se représenter et élégante a fait ses preuves sur plusieurs points de vue, comme l'explication des aires et des volumes en géométrie, mais laisse à désirer encore sur la dynamique

    Dans son livre The Life of the Cosmos, Smolin propose d'appliquer la sélection naturelle à la cosmologie, de sorte que l'univers que nous connaissons serait le résultat de l'évolution par mutation d'univers plus anciens. C'est la théorie des univers féconds.

    Smolin avance qu'un univers pourrait en engendrer un autre lors de la formation d'un trou noir. Les constantes fondamentales de la physique, comme la célérité de la lumière dans le vide, seraient différentes d'un univers à l'autre.

    boucles.html#.XBQYhVxKj4YLa gravitation quantique à boucles

    Pour commencer à connaître avec quelques sites internet regroupés sur une même page pour une lecture plus aisée et des liens supplémentaires.

    http://www.admiroutes.asso.fr/larevue/2013/136/smolin.htm

    (Time Reborn: From the Crisis in Physics to the Future of the Universe)

     

    http://medias.dunod.com/document/9782100706679/Feuilletage.pdf (la renaissance du temps Dunod: quelques pages à feuilleter)

    https://monblogdereflexions.blogspot.com/2018/12/la-gravitation-quantique- La gravitation quantique à boucles avec Carlo Rovelli: Pour s'initier avec quelques sites

     

    http://www.paris8philo.com/article-33714241.html: à propos de rien ne va plus en physique: "billet de Jean Zin, pour une physique pluraliste, qui nous paraît essentiel pour comprendre les enjeux des théories physiques actuelles qui souvent tendent vers l'impossible, hors toute avancée, toute brèche se fait par dissymétrie, sans souci du qu'en-dira-t-on il suffit de voir l'attitude de Grigori Perelman, si non-chalante vis-à-vis de la communauté scientifique, ou devrait-on dire l'etablishment. Jean Zin reste un grand guetteur de ce qui se passe en science, nous vous recommandons ses articles."

     

    1) Préambule: Ceci est la suite des articles de mon blog à propos des univers multiples  d'Aurélien Barrau pour les quels je retiens ici les commentaires utiles: 

         -Mon article 1; D'après Aurélien Barrau, Univers multiples Chap 1)les propositions nouvelles face aux problèmes:et paradoxes de la physique "peuvent constituer une "pulsion inchoactive" qui poussera vers une découverte sans précédent ou bien vers un réenchantement de ce que l'on savait déjà sans en avoir pris la "dé-mesure" et finalement vers une nouvelle sacralisation du "monde".
         -Mon article 2: D'après Aurélien Barrau, Univers multiples. La gravitation quantique chap. 9 L) Voir la Conclusion:  [...] aujourd'hui, la physique est en crise, le monde est en crise. Avec Lee Smolin et son "rien ne va plus en physique", Carlo rovelli Parle de la schizophrénie bipolaire des physiciens (voir une révolution inachevée). La vision anthropique de Trin Xhuan Thuan et la vision biblique du monde, qui s'origine dans les mythes de l'Un et de l'ordre, émergeant du Chaos initial, semblent exclus de la vision de bien des physiciens et cosmologues qui découvrent, comme l'a fait Jean Pierre Luminet, que l'Univers ne peut avoir été infiniment dense et donc que le big bang ne peut avoir été tel qu'on se l'imaginait depuis de nombreuses décennies. La possibilité d'un avant big bang a été mise en évidence avec un (ou des?) univers précédent qui se serait condensé jusqu'à une taille extrêmement petite mais non nulle et qui aurait "rebondi" en un big bounce pour donner notre Univers actuel en expansion après le phénomène d'inflation cosmique. Un des derniers rebondissements de ces recherches, avec Lee Smolin, pourrait bien aboutir avec sa "renaissance du temps" à une solution de la contradiction entre la physique quantique et la théorie de la relativité. A priori, ce serait une théorie unifiée des interactions fondamentales. 


    2) La renaissance du temps, mes précédents articles - résumé. 

    Nous avons vu dans mon article 1 à propos d'Aurélien Barrau chap.9, que de nombreuses théories nouvelles ou hypothèses proposent l'unification de la physique ou tout au moins des explications aux dilemmes et paradoxes que la cosmologie moderne a mis en évidence. 

    Mais, dans mes articles sur "la renaissance du temps", voir l'article 1 chapitre 8 Lee Smolin prévient: Le paradigme newtonien ne peut même pas apporter un embryon de réponse à ces questions et dilemmes: Pourquoi ces lois? Pourquoi ces conditions initiales de l'univers? Quel mécanisme les a t-il sélectionnées parmi une multitude infinie de possibilités? etc. Il appelle "erreur cosmologique" (voir mon article 1 chapitre 2), le fait d'appliquer à l’Univers entier dans sa globalité des lois établies et vérifiées sur des sous-systèmes. Dans le paradigme newtonien, ce que nous appelons une loi doit s'appliquer dans tous les cas. Mais l'application d'une loi à n'importe quel morceau d'univers implique une approximation, parce que nous devons négliger toutes les interactions entre ce morceau et le reste de l'univers. Donc les applications vérifiables d'une loi sont toutes des approximations. Lee Smolin fait remarquer en particulier que les lois se vérifient sur beaucoup de sous-systèmes. Mais si on veut appliquer une loi de la nature sans approximation, c'est à l'univers entier qu'il faudrait l'appliquer, alors que nous n’avons qu’un seul Univers sous la main. Et un seul cas n'apporte pas suffisamment d'indices pour justifier l'affirmation qu'une loi particulière de la nature s'applique. C'est ce que Lee Smolin appelle le dilemme cosmologique (faire de la physique dans une boite: on considère un petit sous-système isolé  du reste de l’univers dans lequel on néglige certains effets pour ne s’intéresser qu’à certaines variables qui définissent un espace de configuration, atemporel. ). Et pourquoi cette loi et pas une autre? De plus, beaucoup de théories cosmologiques (théorie des cordeséquation d’Einstein …) admettent en réalité une infinité de solutions, parmi lesquelles une seule correspond à notre univers. Doit-on se résoudre à admettre l’existence d’une infinité d’Univers inaccessibles pour pouvoir justifier le notre par un principe anthropique

    Nous pensions, dit Lee Smolin, savoir comment répondre à ces questions. Une théorie unique mathématiquement cohérente pourrait incorporer les 4 lois fondamentales de la nature. Mais cet espoir a été anéanti. On se trouve face à ce qu'il appelle "le défi cosmologique". On vient de voir qu'il faudrait étendre la science à une théorie de l'Univers entier. Le défi est qu'il ne peut pas exister de composante statique qui puisse servir de cadre de référence, car tout dans l'Univers change et il n'existe aucun extérieur., rien qui puisse être qualifié de fond par rapport auquel les mouvements du reste de l'Univers (que nous négligeons). Or, toutes les théories physiques divisent le monde en deux parties, une partie « dynamique », qui change, et une statique, qui contient un « fond » de choses immuables, comme les constantes fondamentales.  Le « défi cosmologique » consiste à formuler une théorie de l’univers « indépendante du fond », purement dynamique afin de ne rien supposer d’extérieur à l’Univers: "Lorsqu’on fait de la « physique dans une boite », le « fond » comprend notamment les conditions initiales, et la méthode expérimentale permet de contrôler les conditions initiales afin de s’assurer que les lois sont indépendantes de ces conditions. En cosmologie, cette distinction entre « lois » et « conditions initiales » aggrave le problème qu’elle résout « dans une boite » : si nos observations du fond diffus cosmologique ne correspondent pas bien à la théorie de l’inflation cosmologique, faut-il corriger la loi ou les conditions initiales? Smolin critique aussi les théories effectives qui décrivent bien ce qui se passe à une certaine échelle de grandeur, mais en négligeant l’influence de ce qui est beaucoup plus grand ou plus petit." Pour Smolin, la théorie issue du défi cosmologique doit tenir compte de tout, sans rien négliger."

    J'ai poursuivi "ma lecture" avec l'article 2 (le défi cosmologique chapitre 9)l'article 3 (Nouveaux principes de cosmologie chapitre 10)l'article 4 (les lois évolutives chapitre 11)l'article 5 (la mécanique quantique et le libération de l'atome chapitre 12)l'article 6 (le combat de la relativité et du quantum chapitre 13)Puis j'ai fait une pause pour approfondir l'interprétation non dominante de la mécanique quantique de Bohm dans La physique quantique version variables cachées et le dialogue Bohm et Krishnamurti

    L'article 7 (La renaissance du temps par la relativité chapitre 14) conclut par: "La notion globale de temps que nous venons de voir implique qu'en chaque événement il existe un observateur privilégié dont l'horloge mesure la passage du temps. Mais il n'y a aucun moyen de le choisir par une mesure qu'on pourrait faire dans une petite région, ce qui confirme le principe de relativité à des échelles plus petites que celle l'univers. Ce choix d'un temps global particulier est déterminé par la façon dont est distribuée la matière dans l'univers. La dynamique des formes constitue donc "un pont" entre le principe de relativité et le temps global qu'exigent les théories telles que celle à laquelle aspire Lee Smolin avec des lois évolutives ou celles qui expliquent les phénomènes individuels au moyen de variables cachées. Il y a une grandeur par contre qui n'a pas le droit de changer lorsqu'on agrandit ou qu'on rapetisse les échelles, c'est le volume de l'univers à chaque instant, même s'in évolue au cours du temps. Ceci donne donc un sens à la taille totale de l'univers et à son expansion et nous fournit une horloge physique universelle. LE TEMPS VIENT D'ÊTRE REDECOUVERT".

    Dans l'article 8 (l'émergence de l'espace chapitre 15), nous avons abandonné provisoirement le temps pour examiner l'espace. Le Dr Goulu nous le présente ainsi: "Ce long chapitre est le plat de résistance du livre. C’est là que ça passe où ça casse, et j’ai mis plus de deux semaines à le digérer avec peine. Il commence très fort: L’aspect le plus mystérieux du monde est juste sous nos yeux. Rien n’est plus banal que l’espace, et pourtant lorsque nous l’examinons de près, rien n’est plus mystérieux. Je crois que le temps est réel et essentiel à une description fondamentale de la nature. Mais je crois probable que l’espace va s’avérer n’être qu’une illusion. [...] Selon Smolin, l’existence d’un temps réel est indispensable pour réconcilier les deux pans de la physique, mais l’espace ne l’est pas. Parmi les théories ayant exploré l’idée que l’espace émerge d’une structure de graphe plus fondamentale, la première est la “triangulation dynamique causale” [...].


    3) Vie et mort de l'univers (chapitre 16 de "la renaissance du temps").

     

    https://fr.wikipedia.org/wiki/Fl%C3%A8che_du_temps

    La flèche du temps

     


    Gravir le Mont Improbable Growing Up in the Universe - Richard Dawkins

         

         3-1) La complexité est-elle probable?.

    Nous venons de voir dans L'article 7 (La renaissance du temps par la relativité chapitre 14)

    que "LE TEMPS VIENT D'ÊTRE REDECOUVERT". Il faut maintenant aborder la question la plus importante et la plus énigmatique concernant l'univers: pourquoi l'univers est-il hospitalier à la vie? Le Dr Goulu écrit en synthèse du chapitre 16 (vie et mort de l'univers): "La vision intemporelle de la physique basée sur le paradigme de Newton a montré son impuissance face aux questions les plus basiques de l’univers : pourquoi est-il intéressant (…) au point que des créatures comme nous puissions y être et nous en émerveiller ? Mais si nous adoptons la réalité du temps, nous rendons possible une physique asymétrique par rapport au temps dans laquelle l’univers peut naturellement faire évoluer de la complexité et de la structure. Et ainsi nous évitons le paradoxe d’un univers improbable".

     Mais voyons cela plus en détail. Si le temps est vraiment réel, alors il devrait y avoir des propriétés qui sont explicables seulement si nous supposons que le temps est fondamental alors qu'elles devraient sembler accidentelles et mystérieuses si on fait l'hypothèse opposée (un temps émergeant). De telles propriétés existent et sont perçues en observant que notre univers a une histoire d'évolution du simple vers le complexe. Cela confère une forte directionnalité au temps: nous disons que l'univers a une flèche du temps, flèche qui serait très improbable dans un monde où le temps est non essentiel et émergeant. 

    La complexité est improbable, rien ne peut sauter immédiatement d'une organisation simple à une organisation complexe. La complexité nécessite une série de petites étapes, qui se produisent en séquence en impliquant un fort ordonnancement des événements dans le temps. C'est Gravir le Mont Improbable de Richard Dawkins (Le livre est relatif à la probabilité et à ses applications dans la théorie de l'évolution, et spécifiquement dirigé contre le créationnisme. Il y détaille notamment les probabilités pour la sélection naturelle de mener à des organismes complexes). L'univers doit donc avoir avoir une histoire, qui s'est déroulée dans le temps et un ordre causal est nécessaire pour expliquer comment l'univers en est arrivé à son instant présent. Mais Dawkins, qui voulait en finir avec dieu, avait-il une vision foncièrement différente de celle des physiciens du XIXè siècle et de certains cosmologistes contemporains  qui adoptent une vision intemporelle et pour qui la complexité est accidentelle et nécessairement temporaire. De ce point de vue, le destin de l'univers est de s'achever dans un état d'équilibre, la mort thermique de l'univers: "L’idée de mort thermique découle de la seconde loi de la thermodynamique, qui postule que l’entropie tend à s’accroître dans un système isolé. Si l’univers a une durée suffisamment longue, il se rapprochera asymptotiquement d’un état où toute l’énergie sera uniformément distribuée. Elle provient des idées de William Thomson, en 1850." Mais, dans ce cas, la matière et l'énergie sont alors uniformément distribuées et rien ne se passe à l'exception de quelques fluctuations aléatoires qui se dissipent sitôt apparues. mais Lee Smolin va nous expliquer plus loin que les principes écrits dans l'article chapitre 10 pour une nouvelle théorie cosmologique vont aider à comprendre pourquoi un univers d'une complexité croissante est inéluctable. Alors est-il raisonnable  de dire avec Dawkins et beaucoup d'autres que l'univers est la complexité sont accidentels et le résultat du hasard (?)  Affirmer que dieu n' a pas créé l'univers n'est-il pas une manifestation de rejet athéiste de l'idée d'un créateur en fermant la porte à la possibilité d'inéluctabilité de la complexité?

    Ainsi, deux routes différentes s'offrent pour décrire le future de l'univers:

         -Dans la première, il n'y a pas de futur parce qu'il n'y a pas de temps. Le temps est une illusion qui est au mieux une mesure du changement. Etienne Klein qui tourne autour de ces mystères depuis plus de 25 ans, "prend l’image de la bobine d’un film de cinéma. Rangée sur une étagère, elle contient «en même temps» toutes les images du film, sans temporalité propre. Mais dès qu’on installe la bobine sur un projecteur, elle acquiert une temporalité par le défilement successif des images sur un écran". Cette vision pourrait-elle être un pont entre celle qui précède (le temps n'existe pas) et celle  de Lee Smolin qui va être évoquée maintenant?

         -Dans la vision du temps que propose Lee Smolin, l'univers est un processus permettant de générer de nouveaux phénomènes et états d'organisation qui se renouvellent en permanence tandis qu'il évolue vers des états d'organisation supérieurs et de plus en plus complexes. Au tout début, l'univers était un plasma en équilibre dont il "créa" une complexité énorme sur une large gamme d'échelles, depuis les amas de galaxies jusqu'aux molécules organiques. Lee Smolin nous affirme que la persistance et la croissance de toute cette structure et cette complexité élimine l'explication la plus simple, que ce serait un arrangement accidentel. Un accident ne "résulterait" pas en structures qui ont persisté pendant des milliards d'années et dont la complexité s'accroît continuellement avec le temps. Si elle était accidentelle, elle diminuerait presque certainement avec le temps et non l'inverse. 

    La prédiction de la mort thermique de l'univers, étape de plus dans "l'extraction" du temps de la physique et de la cosmologie s'accorde avec les idées antiques d'un état de l'univers exempt de changement. Pour Aristote, l'état naturel du monde est un équilibre où, puisque tout est à sa place naturelle, il n' y a aucune poussée vers l'organisation. Chaque essence possède un mouvement naturel, la terre veut aller vers le centre, tandis que le mouvement naturel de l'air est vers le haut. Toutefois, pour qu'il y ait des changements dans le domaine terrestre, il faut qu'il y ait d'autres causes, des mouvements imposés capables de déplacer quelque chose hors de son état naturel. Les humains et les animaux sont sources de mouvements imposés, L'eau chaude en est une autre; elle intègre l'air en elle et; de ce fait, adopte en partie le mouvement naturel de l'air vers le haut, s'élève jusqu'à ce qu'elle refroidisse. A ce stade, elle expulse l'air et retombe sous forme de pluie. La source ultime de ce mouvement imposé est la chaleurs du soleil, qui fait partie du domaine céleste et d'une manière ou d'une autre tout est imposé par le soleil. Si la sphère terrestre était déconnectée des cieux et laissée à elle-même, tout reviendrait à l'équilibre, immobile dans son état naturel, et tout changement cesserait. 


         3-2 La physique moderne et la thermodynamique.

    Arles : la tour Ghery

    La physique moderne a une notion d'équilibre dont les lois s'appliquent à "la physique dans une boite" dont nous avons aussi vu les limites dans l'article 2. Le contexte pour les lois de la thermodynamique est un système isolé, qui n'échange ni énergie ni matière avec son environnement. Il faut, cependant, ne pas confondre les notions d'équilibre que nous avons vues chez Aristote ou Newton (qui provient d'équilibre entre des forces qui se compensent), avec la notion moderne d'équilibre. Celle-ci est totalement différente en thermodynamique. Elle s'applique aux systèmes contenant un très grand nombre de particules et fait appel d'une façon essentielle aux notions de probabilités et d'information

    La clef pour comprendre (?) la themodynamique est qu'elle implique deux niveaux de description. Le niveau microscopique est la description précise des positions et des mouvements de tous les atomes dans n'importe quel système particulier; celle des micro-états. Le niveau macroscopique définit le macro-état du système, qui est une description approchée, au moyen d'un petit nombre de variables, comme la température et la pression d'un gaz. Etudier la thermodynamique du système implique d'établir un lien entre ces deux niveaux de description. 
    Pour expliquer cela, Lee Smolin prend l'exemple d'un immeuble en briques dont le macro-état est l'immeuble de l'architecte. Le micro-état est celui où chaque brique se loge exactement. L'architecte a seulement besoin de spécifier les dimensions des murs et celle des ouvertures (portes et fenêtres). Il n'a pas besoin de spécifier l'emplacement de chaque brique. La plupart des briques sont identiques et deux d'entre elles peuvent être échangées sans impact sur la structure. Ainsi, de nombreux micro-états donnent le même macro-état. Alors vint Frank Gehry,  l'architecte du pli ou l'angoisse de la ligne droite dont les constructions sont, comme le musée de Bilbao, qui a une surface externe constituée de matériaux individuellement élaborées. Chaque "tôle" de pierre, de verre ou de titane doit être différente et l'endroit où chacune d'elle sera placée a de l'importance. La destination de chaque "tôle" est le micro-état. Mais ici, contrairement à l'immeuble en briques, on ne peut s'amuser avec le micro-état: un seul micro-état correspond au macro-état voulu. Ce concept de "combien de micro-états" peut nous permettre d'expliquer en quoi les immeubles de Ghery sont révolutionnaires avec le concept d'entropie. L'entropie sera ici une mesure du nombre de manières différentes d'assembler ses éléments pour réaliser le dessin de l'architecte.Un immeuble standard en briques aura une entropie élevée. Par contre, un immeuble de Gehry pourra avoir une entropie de zéro, correspondant à un unique micro-état. Référons-nous à la définition de entropie thermodynamique: "Ludwig Boltzmann a exprimé l'entropie statistique en fonction du nombre \Omega  d’états microscopiques, ou nombre de configurations, définissant l’état d'équilibre d'un système donné au niveau macroscopique : {\displaystyle S=k_{\mathrm {B} }\ln \Omega } (formule de Boltzmann). On voit que pour un unique micro-état l'entropie est égale à 0 puisque ln 1 = 0. .

    ===>> Entropie = inverse de l'information. C'est ce qu'on voit à partir de cet exemple. Il faut beaucoup plus d'information pour spécifier le design d'un immeuble de Gehry, car on doit décrire exactement comment fabriquer chaque constituant et où l'installer. Pour un bâtiment en briques standard, on n'a besoin de connaître que les dimensions des murs (et les ouvertures).  

    Comment ça marche dans le cas d'un gaz? Un gaz est composé d'un nombre immense de molécules comme le précise le nombre d'Avogadro (par exemple, le nombre d'atomes de carbone dans 12 grammes (10−3 kg) de carbone 12NA = 6,022 140 76 × 1023 par mole). La description fondamentale est microscopique; elle nous dit l'endroit où chaque molécule se trouve et comment elle se déplace, ce qui représente une quantité phénoménale d'informations. Par contre, dans la description macroscopique, le gaz est décrit en termes de densité, température et pression, ce qui nécessite beaucoup moins d'informations que de préciser où se trouve chaque atome. On peut donc traduire (relativement) facilement la description microscopique en position macroscopique (densité, température), mais non l'inverse, car il y a trop de manières d'arranger les atomes individuels au niveau microscopique pour obtenir la même densité et la même température. Pour convertir les micro-états en macro-états, on peut compter les micro-états cohérents avec un macro-état donné. Comme dans l'exemple des immeubles et leurs briques, on obtient un nombre, l'entropie. Ainsi définie, c'est une propriété macroscopique uniquement. C'est une propriété émergente qui n'aurait aucun sens si on l'attribuait à un micro-état particulier. 

    L'étape suivante est de relier l'entropie aux probabilités. Pour cela il nous faut quelques notions de thermodynamique statistique. Nous resterons dans la domaine classique n'aborderons pas encore la PHYSIQUE STATISTIQUE QUANTIQUE et pour simplifier, nous partirons d'un Résumé de thermodynamique statistique.:Le micro-état est une “photographie instantanée” du système. Il correspond à la description microscopique de ce système, c’est-à-dire à la connaissance de l’état de toutes les particules. Ce micro-état peut être caractérisé : – par sa fonction d’onde si le système est décrit par la mécanique quantique, c'est  dire par la connaissance de la valeur de tous les nombres quantiques décrivant ce système. – par la connaissance de toutes les coordonnées (q1, ..., qs) et impulsions (p1, ..., ps) des particules si le système est décrit par la mécanique classique (soit 2s = 6N variables pour N particules atomiques)

    Le macro-état est défini par un jeu de variables très réduit, les variables d'état (nombre de particules, le volume V, l’énergie interne U, la température T, les quantités de matières Ni, la pression P ..) dont la connaissance permet de définir le système thermodynamique à l'équilibre. C'est une observation moyenne des micro-états correspondant aux contraintes imposées au système.

    Le postulat fondamental de la physique statistique d'équilibre (aussi connu comme le postulat des probabilités a priori égales) est: Étant donné un système isolé en équilibre, il se trouve avec probabilités égales dans chacun de ses micro-états accessibles. C'est un postulat physique, justifié par le fait que, dans un gaz, les atomes ou molécules sont en mouvement chaotique, qui tend à brasser les trajectoires et les rendre aléatoires. Plus il y a de façons de fabriquer un macro-état à partir de micro-états, c'est à dire pus grande est l'entropie du macro-état (comme on l'a vu précédemment, celle-ci est fonction du nombre  \Omega  d’états microscopiques, d'égale probabilité), macro-état définissant l’état d'équilibre d'un système donné au niveau macroscopique: {\displaystyle S=k_{\mathrm {B} }\ln \Omega }  k_{B} est la constante de Boltzmann. Cette définition correspond à l'entropie de Shannon S\ =\ -\ k_{B}\sum _{{i}}p_{i}\ \ln p_{i} (avecp_{i}\ =\ {\frac  {1}{\Omega }}d'une configuration de \Omega  micro-états équiprobables, qui correspond à l'information. Le macro-état le plus probable, si on suppose le micro-état aléatoire, s'appelle l'état d'équilibre. C'est aussi celui qui a la plus grande entropie. Imaginons un chat que l'on dissocie en atomes qui le constituent et mélangeons au hasard avec l'air de la pièce qui nous entoure. Il y aura beaucoup plus de micro-états dans lequel les atomes du chat sont mélangés aléatoirement à l'air que de micro-états dans lesquels le chat est rassemblé. Le chat qu'on voit sur le canapé correspond à un arrangement des atomes hautement improbable et de ce fait il a une entropie très faible et une grande quantité d'information comparé à une mélange de ces mêmes atomes dans l'air. 

    Les gaz et seconde loi de la thermodynamique. Les atomes (ou molécules) d'un gaz se déplacent de façon chaotique, entrant souvent en collision et envoyant les autre dans des directions plus ou moins aléatoires. Si le micro-état n'était pas aléatoire au début, il va le devenir avec la temps. Si nous commençons pas un autre état que celui d'équilibre, de basse entropie; il est vraisemblable que ce dernier deviendra plus désordonné, accroissant l'entropie. C'est ce qu'affirme la seconde loi de la thermodynamique:    ["Toute transformation d'un système thermodynamique s'effectue avec augmentation de l'entropie globale incluant l'entropie du système et du milieu extérieur. On dit alors qu'il y a création d'entropie.La fonction d'état entropie : S, a été considérée comme une mesure du désordre.

    {\displaystyle \Delta S_{\text{global}}=S_{\text{création}}=\Delta S_{\text{syst}}+\Delta S_{\text{ext}}\geq 0}

    Dans le cas d'une transformation réversible, la création globale d'entropie est nulle"

    • L'entropie d'un système isolé ne peut qu'augmenter ou rester constante puisqu'il n'y a pas d'échange de chaleur avec le milieu extérieur.
    • L'entropie d'un système peut diminuer mais cela signifie que l'entropie du milieu extérieur augmente de façon plus importante ; le bilan entropique étant positif, ou nul si la transformation est réversible.].

    On voit donc que l'entropie n'augmente pas toujours. Lee Smolin illustre ce aspect par une expérience faite avec un jeu de cartes à l'aide d'un mélangeur. Lorsque l'expérience commence, les cartes sont rangées dans l'ordre (entropie minimum). En suite, la seule chose qui se produit, c'est que les cartes seront battues par le mélangeur. Les cartes ont commencé dans l'ordre, mais chaque mélange a rendu cet ordre de plus en plus aléatoire et donc l'entropie tend à augmenter.Au bout d'un nombre suffisant de battements, il devient impossible de distinguer l'ordre des cartes obtenu d'un ordre dû entièrement au hasard. Par conséquent, tout souvenir de l'ordre initial a été essentiellement perdu avec l'augmentation d'entropie. Mais de temps à autre, un mélangeur abaissera l'entropie, en faisant revenir les cartes à leur état d'origine, mais il est beaucoup probable que le mélangeur, agissant sue le jeu de cartes ordonné provoque l'augmentation de l'entropie que la diminution. Plus il y a des cartes, moins il est probable qu'un mélange parvienne à reproduire totalement l'ordre de départ. Et de ce fait; les intervalles entre les mélanges qui ordonnent parfaitement le jeu seront plus longs. Néanmoins, tant que le nombre de cartes dans le jeu reste fini, il existe une durée à l'issue de laquelle, les battements, au rythme de 1 par seconde par exemple, auront produit une remise en ordre parfaite. Cette durée est appelée le temps de Poincaré -->> voir le théorème de récurrence de Poincaré[Ce théorème dit que, pour presque toutes les « conditions initiales », un système dynamique conservatif dont l'espace des phases est de « volume » fini va repasser au cours du temps aussi près que l'on veut de sa condition initiale, et ce de façon répétée.]. Si on observe le système pendant une durée plus courte, on verra probablement toujours l'entropie augmenter, mais sur une durée plus longue, on aura des chances de voir l'entropie diminuer. 

    Le rôle du hasard dans le jeu de cartes peut être transféré à un gaz. Un exemple de configuration ordonnée d'atomes pourrait être lorsque l'on a tous les atomes du gaz dans une une boite d'un même côté et se déplaçant dans la même direction. Ce serait l'analogue d'une configuration où toutes les cartes sont dans l'ordre. Mais pour un gaz, elles sont infiniment plus rares que celles dans lesquelles les atomes sont positionnés au hasard dans la boite et se déplacent dans des directions quelconques. Si nous commençons par un e configuration dans laquelle les atomes sont regroupés dans un coin de la boite et bougent de la même façon,  et si on attend, alors ils ricochent les uns sur les autres et se dispersent à travers la boite en la remplissant. Les atomes sont brassés et la densité dans la boite s'uniformise. Les énergies et les directions du mouvement des atomes seront rendues aléatoires au gré des collisions. Au final, la plupart des atomes auront des énergies proches de la valeur moyenne, qui représente la température. Peu importe le degré d'ordre et d'originalité d'où on est parti, après un moment, la densité des atomes et la température seront uniformes et randomisés. C'est cela l'état d'équilibre et la plus probable est qu'il en reste là. Mais si on observe sur une très longue période de temps, des fluctuations conduiront à trouver un état plus ordonné. Certaines, assez probables, produisent juste un peu plus de densité à un endroit et un peu moins ailleurs. Celles qui regrouperont tous les atomes dans un coin de la boite; même si elles sont très improbables, demanderont beaucoup de temps, mais elles se produiront. Tant que le nombre d'atomes est fini, il y aura des fluctuations conduisant à n'importe quelle fluctuation, quel que soit son degré de rareté. C'est Einstein qui l'un des premiers vit l'importance des fluctuations: la prédiction de phénomènes dus aux fluctuations des grandeurs physiques était l'un des grands thèmes qu'il explora en 1905 en mettant en évidence le mouvement brownien (qualifié de “divers et ondoyant”), ce qui prouve que ces fluctuations sont bien réelles. Pourtant, il critiqua plus tard le rôle de l'aléatoire en physique quantique.

    Les fluctuations résolvent un paradoxe qui a "empoisonné" les études les plus anciennes. A l'origine, les lois de la thermodynamique furent introduites sans la notion d'atomes ou de probabilités. Les lois étaient plus "qualitatives". Ce n'est qu'au milieu du XIXè siècle que Maxwell et Boltzmann firent l'hypothèse que la matière était composée d'atomes.se déplaçant de manière erratique.et posèrent les fondements de la physique statistique et de la thermodynamique. Mais la plupart des physiciens ne croyaient pas aux atomes et rejetèrent ces efforts d'explication par le mouvement des atomes. Ils inventèrent de puissants arguments pour prouver qu'on ne pouvait pas y arriver. Un des principaux arguments était basé sur la réversibilité des lois du mouvement de Newton qui (?paradoxalement?), affirme Loup Verlet,  avait une foi atomiste[Réversibilité: Voir pourlascience.fr    [...] Les équations  de Newton restent identiques lorsque l’on inverse le sens du temps, elles sont dites réversibles]. Si les lois de la thermodynamique sont expliquées par le mouvement des atomes, qui obéissent aux lois de Newton, cela n'est pas compatible avec le fait que l'entropie croît toujours comme l'affirme la deuxième loi de la thermodynamique. Ce sont les fluctuations qui ont permis de réconcilier  la thermodynamique avec l'existence d'atomes obéissant à des lois fondamentales réversibles dans le temps. La bonne réponse fut fournie par Tatiana et Paul Ehrenfest, jeune couple protégé de Boltzmann et qui devinrent amis d'Einstein. Ils montrèrent que la seconde loi, telle qu'elle était alors formulée, était fausse et vinrent en aide à Boltzmann avec notamment le modèle des urnes (voir aussi  les urnes d'Ehrenfest ). On peut voir comment le modèle d'Ehrenfest répond à la question  dans le site "notre univers est-il réversible?"  

    -Quelques liens info: 

    probabilité et quantité d'information    physique statistique     physique statistique quantique

    résumé de thermodynamique statistique   thermodynamique

    deuxième principe de la thermodynamique           qu'est-ce que l'entropie?

    Gehry l'architecte du pli ou l'angoisse de la ligne droite 

    qu'est ce que la thermodynamique   le paradigme newtonien   

    violation du 2è principe dans le nano-monde   

    Rudolf Clausius   James Clerk Maxwell   Ludwig Boltzmann     Isaac Newton  


         3-3) Notre univers est-il en équilibre? Réponse non!

    D'après la vision thermodynamique qui précède, il semble qu'un univers en équilibre ne peut pas être complexe puisque les processus aléatoires qui l'amènent à l'équilibre détruisent toute organisation, ce qui amène à se reposer la question posée au départ, au début du chapitre 3-1) sur la probabilité pour qu'il y ait de la complexité (la question la plus importante et la plus énigmatique concernant l'univers: pourquoi l'univers est-il hospitalier à la vie?). En fait, cela ne veut pas dire que la complexité elle-même puisse être mesurée par l'absence d'entropie. Elle nécessite des notions qui dépassent la thermodynamique des systèmes à l'équilibre et seront examinées dans mon article 10 qui résumera ma lecture du chapitre 17 de "la renaissance du temps"(l’émergence de structures organisées, apparemment en contradiction avec le second principe de la thermodynamique).

    Continuons d'abord de regarder l'univers depuis cette perspective thermodynamique en nous demandant pourquoi l'univers est intéressant! Dans le cadre du paradigme scientifique depuis Newton, l'univers est gouverné par les solutions aux équations d'une certaine loi de la nature. pour le moment, cette loi peut être approchée par une combinaison de la relativité générale et du modèle standard de la physique des particules. La solution qui gouverne l'univers se trouve parmi une offre (infinie) de solutions et peut être spécifiée en sélectionnant les conditions initiales à l'instant (ou au voisinage) du big bang. Ce qui est intéressant; c'est que la thermodynamique nous apprend que presque toutes solution des lois décrit un univers en équilibre, car, par définition, l'équilibre est composé des configurations les plus probables. De plus, une telle solution typique est symétrique par rapport au temps (des fluctuations locales vers un état plus ordonné sont aussi probables que des fluctuations locales vers un état moins ordonné). Cela signifie que, globalement, il n'y aurait pas de flèche du temps. 

    Or notre univers ne ressemble pas du tout à ces solutions typiques des lois. Même aujourd'hui, après plus de 13 milliards d'années, notre univers n'est pas en équilibre. 

    Et de plus, la solution qui décrit notre univers est asymétrique par rapport au temps. Si la solution qui décrit notre univers a été choisie au hasard, ces propriétés sont extraordinairement improbables. La question de savoir pourquoi l'univers est intéressant et pourquoi la seconde loi de la thermodynamique n'a pas encore réussi à "randomiser" l'univers en un équilibre thermique au bout de plus de 13 milliards d'années devient de plus en plus intrigante.

          3-4) La flèche du temps

    https://fr.wikipedia.org/wiki/Fl%C3%A8che_du_temps

     

     

    trustmyscience.com/inversion-fleche-du-temps-avec-ordinateur-quantique/

    3-4-1) Il y a une flèche du temps. C'est le signe le plus évident que notre univers n'est pas en équilibre thermique. Même si des physiciens ont réussi à inverser le flèche du temps, c'est grâce à un ordinateur quantique, c'est "en modifiant certaines conditions de la configuration de l’ordinateur, que ces possibilités ont été limitées de manière à rembobiner délibérément l’équation de Schrödinger, qui est réversible. Il est expliqué, "qu'en gros, c’est comme si votre boule blanche ne se “répandait” plus dans une plage de positions possibles infinie sur la table de billard se trouvant dans l’obscurité, mais qu’elle revenait dans votre main. En théorie, rien n’empêche que cela se produise de manière spontanée. Cependant, il faudrait regarder 10 milliards de tables de billard à l’échelle des électrons, et ce à chaque seconde pendant la durée de vie de notre Univers, pour que cela se produise de sûr une seule fois". Cette expérience à propos de l'incertitude quantique ([trustmyscience.com...]:  L’équation de Schrödinger vous indique que la balle se trouve quelque part sur la table de billard et se déplace à une certaine vitesse. En termes quantiques, la balle est partout sur la table, et possède un certain nombre de vitesses différentes), montre qu'à l'échelle quantique, le temps est réversible mais macroscopiquement et jusqu'à l'échelle de l'univers le temps reste intrigant. Le fait qu'il soit orienté et possède une flèche rend pertinente la question de sa réalitéle thème du livre de Lee Smolin. Répétons qu'à l'équilibre il n'y a pas de telle flèche du temps. L'ordre peut y augmenter seulement temporairement par des fluctuations aléatoires.Ces excursions hors de l'équilibre, qui sont à l'échelle quantique; se ressemblent qu'on aille dans un sens du temps ou dans l'autre (si on filme les mouvements des atomes dans ce gaz à l'équilibre, et qu'on fasse passer le film dans un sens ou dans l'autre, on sera incapable de dire quel le film et quelle est la version à l'envers). Mais notre univers n'est pas comme ça. On l'a déjà dit, ça réclame une explication car les lois de la physique sont temporellement  symétriques,[en mécanique newtonienne,Le temps est un paramètre dont le signe n'a pas d'importance. L'évolution d'un système mécanique sans frottements est symétrique par rapport au renversement du temps]. Notons cependant quelques "viols" de cette symétrie Temporelle: "(Alors que la symétrie T semble naturelle en mécanique quantique, elle est néanmoins violée dans le cadre du modèle standard car la symétrie CP est violée alors que par la symétrie CPT obtenue par application simultanée du renversement du temps, de la conjugaison de charge et de la transformation de parité doit être respectée pour être compatible avec l'invariance de Lorentz").Toute solution aux équations de ces lois possède son "double", une solution qui se comporte juste comme la première mais avec "le film monté à l'envers" (t -->> -t) et de plus, la droite et la gauche doivent être échangées et un particule devient une anti-particule). Ainsi, si des personnes rajeunissaient alors que nous vieillissons, ou si des tasses brisées se reconstituaient instantanément, les lois fondamentales ne seraient plus violées.

              3-4-2 Le problème de la flèche du temps.

    Alors, pourquoi ces choses-là ne se produisent-elles jamais? Et pourquoi ces asymétries temporelles sont-elles toutes orientées dans le même sens? C'est ce qui est appelé le problème, parfois le paradoxe (illusion?) de la flèche du temps. Même s'il est considéré comme illusion, ce paradoxe pose question et en fait il existe plusieurs flèches du temps dans notre univers. 

         -La flèche du temps cosmologiqueElle traduit que l'univers est en expansion et non en contraction. Wikipedia précise: "C'est le nom donné à l'application de la flèche thermodynamique ou statistique du temps à l'échelle de l'Univers. En effet, la deuxième loi de la thermodynamique ne fonctionne que pour un système fermé. Un niveau d'entropie qui diminue localement signifie simplement que l'entropie augmente de manière globale à l'intérieur du système. Cependant, il n'est pas déterminé si l'Univers est un système fermé ou non. Si l'Univers est un système fermé, le temps peut être déterminé par une différence de niveau d'entropie. Cette hypothèse s'appelle l'« hypothèse du passé --->voir ce chapitre dans ce site), car elle implique que l'état initial de l'Univers soit un cas particulièrement bas d'entropie. En croissant, l'entropie de l'univers atteindrait son maximum après une période de temps d'environ 10200 années 8. Le temps perdra progressivement son sens jusqu'à disparaître".

              -Flèche gravitationnelle du temps: C'est une théorie alternative à la flèche cosmologique du temps. Elle est basée sur l'idée que l'Univers ne se dirige pas vers un niveau d'entropie de plus en plus élevé, mais vers un niveau structurel de complexité croissante. Elle s'oppose par conséquent à l'entropie qui détermine qu'un système fermé ne peut se diriger que vers un niveau de désordre de plus en plus élevé. Le sens du temps, du passé vers le futur, serait alors défini par la croissance irréversible de la complexité 9.

         -La flèche du temps thermodynamique: de petits morceaux d'univers, laissés à eux-mêmes tendent à devenir de plus en plus désordonnés avec le temps. "C'est le sens donné au temps par la loi de l'entropie. Cette dernière dispose que le niveau d'entropie d'un système fermé doit augmenter. Par conséquent, il suffit de mesurer le niveau d'entropie d'un système fermé à deux instants différents pour savoir lequel précède l'autre. Si cette mesure est répétée à chaque instant, il apparaît une suite infinie d'états orientée dans une seule direction, c'est ce qui crée le sens du temps. Par conséquent, tout système fermé voit la direction de sa flèche temporelle déterminée par la différence d'entropie entre ses états 6".     

         -La flèche du temps biologique (liée à l'auto-organisation). Les gens, les animaux, les plantes sont nés bébés, puis ils vieillissent et enfin meurent. 

         -Flèche du temps de l'expérience liée à la flèche psychologique. La flèche de l'expérience; c'est l'expérience du temps qui s'écoule du passé vers le futur; nous nous rappelons le passé, mais pas le futur. On peut lui apporter une nuance avec la flèche psychologique, qui "représente le sens donné au temps par les limites de la perception humaine. En effet, l'être humain détermine le temps par la différence entre un état 1 initial et un état 2 observé instantanément. Si aucun changement n'est constaté, un être humain ne saurait distinguer si le temps avance, recule ou même existe. L'être humain ne peut se remémorer que les événements qu'il a vécus, le passé, et le comparer au présent qui deviendra à son tour passé dès qu'un changement aura été enregistré par l'individu. Ce mouvement apparent (7) crée le passage du temps du passé, soit ce que l'on peut comparer au présent, vers le futur  .
         -La flèche électromagnétique, flèche radiative: La lumière voyage du passé vers le futur. La lumière qui atteint nos yeux nous donne à voir le monde dans son passé jamais dans son futur. Ceci semble s'appliquer aux ondes gravitationnelles. Wikipédia nous dit: "La flèche radiative est décrite par le sens dans lequel un rayonnement quelconque est émis. Il est observable qu'une source n'émet pas dans des directions aléatoires, mais plutôt dans toutes les directions à la fois qui pointent vers l'extérieur de la source. Ce phénomène est exprimable par une sphère d'influence de la source ponctuelle. Cette sphère s'agrandit si le temps pointe vers l'avant, et diminue s'il pointe vers le passé. Cette schématisation est souvent utilisée en physique via le cône de lumière. Celui-ci ne présente un cercle s'agrandissant au lieu d'une sphère puisque la troisième dimension du graphique illustre la direction du temps
    10. 

         -La flèche conséquentielle"Elle fait référence au principe de causalité à l'échelle macroscopique. Ce principe stipule que si un phénomène A produit un effet B, alors il en est la cause et l'effet ne peut jamais précéder sa cause. Ainsi, un sens est donné au temps de la cause vers la conséquence. Cette flèche du temps est fondamentale en sciences. En effet, la méthode scientifique est basée sur le fait que les mêmes causes produisent les mêmes conséquences".


    -cas des Trous noirs et trous blancs

    Cas des trous noirs: Notre univers semble contenir de nombreux trous noirs. Un trou noir est très asymétrique par rapport au temps. C'est un objet céleste si compact que l'intensité de son champ gravitationnel est tel que si tout objet peut tomber à l'intérieur, il empêche toute forme de matière ou de rayonnement de s’en échapper si ce n'est le rayonnement de Hawking (vu par Aurélien Barrau). Ce processus est irréversible et produit beaucoup d'entropie.

    Mais quid des trous blancs? Ces objets hypothétiques sont des solutions de la relativité générale en renversant le direction du temps dans les trous noirs. Ils se comportent comme l'inverse des trous noirs: rien ne peut y tomber, mais n'importe quoi pourrait en sortir.

    Interrogation?: Selon la relativité générale,notre univers aurait très bien pu commencer rempli de trous noirs primordiaux:"la pression et la température étaient si élevées que de simples fluctuations de densité de la matière suffisaient pour amorcer un effondrement gravitationnel très rapide. Alors que la plupart des régions de hautes densités furent dispersées dans l'expansion qui suivit, les trous noirs primordiaux restèrent stables, et devraient être encore présents aujourd'hui. Aucun à ce jour (mars 2019) n'a été cependant clairement observé ou détecté". Tous les trous noirs que l'on observe semblent avoir été formés longtemps après le big bang, suit à l'effondrement d'étoiles massives. Et pourquoi n'y aurait-il que des trous noirs et aucun trou blanc? Il semble que cette absence de trous noirs primordiaux soit le signe d'une "flèche du temps des trous noirs". Une autre question concerne la possibilité d'existence de galaxies à l'autre bout de l'univers où certaines des flèches du temps iraient dans le sens inverse de celui constaté dans notre monde ou bien la possibilité que nous vivions dans un univers où certaines flèches du temps sont retournées à certains endroits. Mais ceci ne semble pas le cas, pourquoi?
    L'existence de toutes ces flèches distinctes et toutes dans le même sens nécessite une explication. Elles reposent toutes sur la nature du temps et sont différentes si on croit que le temps émerge d'un monde intemporel ou si on croit que le temps est fondamental et réel. D'autre part, le fait que les lois de la nature soient temporellement réversibles lorsque t ---> -t peut être pris comme un indice en faveur de la vision que le temps n'est pas fondamental, mais alors, comment expliquer ces flèches du temps qui représentent une asymétrie dans le temps? Comment ces asymétries peuvent-elles naître de lois symétriques dans le temps?
              3-4-3 Quelques explications concernant le problème de la flèche du temps.
    Selon Lee Smolin, la réponse à la question précédente réside dans le fait que les lois (qui elles, n'ont pas à être symétriques), agissent sur les conditions initiales (
    ?) et les constantes ultimes. Les conditions initiales semblent avoir été finement ajustées pour produire un univers qui est asymétrique dans le temps. Un autre exemple est le taux d'expansion de  l'univers initial, qui est fixé par les conditions initiales et semble avoir maximisé la production de galaxies et d'étoiles. Plus élevé, l'univers se serait dilué rapidement sans laisser la possibilité de formation d'étoiles et galaxies. Plus faible, l'univers aurait pu s'effondrer en une singularité finale avant que des étoiles aient pu se former. Le taux d'expansion initial fut extraordinairement réglé pour produire l'univers actuel. Les conditions initiales temporellement asymétriques peuvent expliquer aussi la flèche du temps électromagnétique. Dans l'article [https://arxiv.org/abs/1004.1346  (soit en .pdf:     https://arxiv.org/pdf/1004.1346.pdf)] Steven Weinsten "montre que la théorie relativiste de l'électromagnétisme de Maxwell, considérée comme la plus confirmée, ne l'est pas du tout, en l'absence d'une hypothèse supplémentaire, à savoir que tous les champs ont leur source dans le passé. Il conclut qu'il existe une asymétrie temporelle "I conclude that we have reason to believe that there is a lawlike time-asymmetry in the world" (qui pourrait être une asymétrie fondamentale?"). Aux débuts de l'univers, il n'y avait pas d'ondes électromagnétiques, la lumière ne fut produite que plus tard, grâce au mouvement de la matière comme le suggère le site ourimvetumim.over-blog.com: "Avant 10-43 seconde : la Superforce.Tout ce qui se passe avant cette date chronologique est un mystère. il comprenait de nombreuses particules virtuelles de matière et d'antimatière qui apparaissaient et disparaissaient comme des bulles de savon". C'est ce qui peut expliquer que lorsque nous regardons autour de nous, les images que la lumière apporte renseignent sur la matière. Mais il aurait pu en être autrement. En effet, les équations de l'électromagnétisme permettent que l'univers ait commencé avec de la lumière qui se déplace librement et se former directement lors du big bang plutôt que d'avoir été émise par la matière ultérieurement, 380 000 ans après le big bang: "Nous sommes 380 000 ans après le Big Bang, il y 13 milliards 819 millions d’années. La lumière parvient enfin à se libérer de la soupe primordiale des particules. Elle peut inonder de son rayonnement l’univers jusqu’alors opaque et nous fournir le tout premier portrait de son enfance". Si nous vivions dans un univers où la lumière s'était déplacée librement depuis le big bang, toutes les images des objets que la lumière nous a apportées seraient noyées dans la lumière nous arrivant directement depuis le big bang. Nous ne verrions ni étoiles ni galaxies. Nous ne pourrions voir qu'un chaos lumineux. Dans un tel univers (sans flèche du temps), nous pourrions voir des images qui n'ont jamais été là (des licornes par exemple...). C'est à cela que l'univers ressemblerait si nous repassions à l'envers un film d'un futur lointain. Dans ce futur lointain, il y aura de nombreuses images voyageant de tous côtés, images de choses qui ont un jour existé. C'est ce que nous pourrions voir de l"univers, si nous passons le film à l'envers, un univers rempli d'images de choses qui ne se sont pas encore produites. Nous ne vivons pas dans un tel univers, mais cela devrait pouvoir être le cas parmi les univers possibles correspondant aux solutions des lois de la physique.

    Explication selon Lee Smolin? Pourquoi nous ne voyons que des choses déjà survenues ou en train de se produire, et jamais rien en attente de se produire ou que nous ne verrons jamais? Cela vient du fait que nous devons imposer des conditions initiales strictes, qui interdisent que l'univers puisse commencer avec de la lumière se propageant partout et transportant des images. C'est une condition d'asymétrie sévère, mais elle est nécessaire pour expliquer la flèche du temps électromagnétique. Il en est de même pour les flèches du temps des ondes gravitationnelles et celle des trous noirs. Donc, si les lois fondamentales de la nature sont temporellement symétriques, alors l'explication du fait que notre univers est asymétrique dans le temps, repose donc, dit Lee Smolin, sur le choix des conditions initiales. Celles-ci ne doivent contenir aucune onde en propagations libre, qu'elles soient électromagnétiques ou gravitationnelles ni de trous noirs. Roger Penrose a évoqué ce point en proposant un principe pour l'expliquer: l'hypothèse de la courbure de Weyl--->> (essai de traduction): "C'est une application de la relativité générale qui a été proposé dans un article de 1979 [1] par le mathématicien et physicien britannique Sir Roger Penrosedans le but de formuler une explication à deux questions fondamentales de la physique. D'une part, "nous voudrions" expliquer pourquoi notre univers apparaît de plus en plus homogène et isotrope  (par) l'augmentation de l'échelle d'observation (et donc peut être décrit par une simple modèle Friedmann-Lemaître). D'autre part, il y a la question fondamentale de l'origine de la deuxième loi de la thermodynamique.

    Penrose spécule que la réponse à ces questions se posent à partir du concept d"entropie de champs gravitationnels. Penrose suggère que, au voisinage de singularité gravitationnelle, la Big Bang, l'entropie d'un champ gravitationnel cosmologique était extrêmement faible (par rapport aux valeurs qui auraient été théoriquement possible), puis elle a commencé à croître de façon monotone. Ce processus se produit par exemple dans la formation de structures au moyen de l'agrégation de la matière, avec la formation de galaxies et amas de galaxies. Penrose exprime que le tenseur Weyl disparaît à proximité du big bang, à très basse entropie.  Après cela, selon lui, son influence est dynamique et augmente constamment, étant due à une augmentation globale de l'entropie dans l'univers, ce qui provoque un flèche du temps cosmologique.

    La courbure Weyl représente les effets gravitationnels tels que forces de marée et ondes gravitationnelles. Le traitement mathématique des idées de Penrose sur l'hypothèse de courbure Weyl ont été décrites dans le contexte de la singularité cosmologique initiale isotrope, dans des articles spécialisés[2][3][4][5]. Penrose croit que l'hypothèse de courbure Weyl alternative de physique est crédible » .L'inflation cosmique (Une phase hypothétique d'expansion accélérée au cours des premières années de l'univers), peut expliquer l'isotropie et proche de l'homogénéité de l'espace actuellement observée de notre univers[6]. (voir Roger Penrose, Singularités et Time-Asymétrie, en Relativité générale: Un centenaire Einstein enquête, Editeur: S. W. Hawking et W. Israël, Cambridge, Cambridge University Press, 1979)

    Résumé. En relativité générale, le .tenseur de Ricci est lié à la présence de matière ; en l'absence de matière, le tenseur de Ricci est nul. Par conséquent, le tenseur de Weyl s'identifie au tenseur de Riemann. Cette propriété donne toute son importance au tenseur de Weyl : sa structure donne la totalité de la structure du champ gravitationnel dans les régions vides de matière. Par exemple, une région de l'espace traversée par une onde gravitationnelle a un tenseur de Weyl non nul. Ce que le principe de Penrose dit, c'est que cette quantité (le tenseur de Weyl), disparaît  à la singularité initiale pour laquelle le tenseur de Weyl = 0 . Il remarque que ceci est en accord avec ce que nous savons de l'univers primordial. Mais cette condition n'est plus vraie plus tard dans l'univers, elle est donc asymétrique. Ce n'est que lorsque la matière apparaît que le tenseur de Weyl devient non nul et que l'univers contient beaucoup d'ondes gravitationnelle et de nombreux trous noirs.  

      Penrose, comme Lee Smolin, dit que pour expliquer l'univers que nous voyons, cette condition temporellement asymétrique doit être imposée sur le choix de solutions des lois (temporellement symétriques) de la relativité générale. 

     

         3-5) Retour à la question le temps est-il fondamental? Est-il asymétrique?

    Si nous avons besoin de conditions initiales asymétriques pour expliquer notre univers alors que les lois de la nature sont temporellement symétriques, cela n'affaiblit-il pas l'argument en faveur d'un temps irréel, qui n'existe pas, comme le présente la cosmologie moderne (Carlo Rovelli dit: "il faut oublier le temps")? Ces conditions initiales et leurs conséquences sont difficiles à cerner, ce qui amène le questionnement de Lee Smolin (pages note 10 page 227 et pages 319 et 320)L'explication repose alors sur la question: comment les conditions initiales sont-elles choisies? Ce à quoi Lee Smolin répond: "Mais nous n'avons aucune explication rationnelle pou cela, si bien que nous aboutissons à une impasse, laissant sans réponse une question critique à propos de notre univers". Il propose alors une option bien plus simple: "Nous croyons que nos lois sont des approximations d'une loi plus profonde. Et si cette loi plus profonde était asymétrique dans le temps?

    Alors, si elle est asymétrique par rapport au temps, il en sera de même pour la plupart de ses solutions. Mais elle conduirait à des lois symétriques lorsqu'elle est approximée par une théorie effective aux basses énergies et loin des régions de forte courbure de l'espace-temps. L'asymétrie serait très prononcée dans l'univers très jeune ce qui expliquerait le besoin de conditions initiales temporellement asymétriques. 

    Le mystère qui consiste à voir des images venues du passé et jamais du futur est alors résolu et ce n'est plus un problème d'expliquer pourquoi nous n'observons pas les choses "dingues" qui devraient survenir si les processus naturels se déroulaient en sens inverse ... parce que l'inversion temporelle d'une solution de la loi (qui est alors asymétrique dans le temps), n'est plus une solution. Le fait que l'univers est hautement asymétrique dans le temps serait ainsi directement expliqué par l'asymétrie temporelle de la loi fondamentale. Un tel univers ne serait plus improbable, il serait alors nécessaire. 

    Il est probable que c'est ce que Penrose avait à l'esprit quand il a proposé l'hypothèse de la courbure de Weyl pour expliquer le fait que notre univers est asymétrique dans le temps, et que les conditions initiales ne doivent contenir aucune onde en propagations libre, qu'elles soient électromagnétiques ou gravitationnelles ni de trous noirs. La différence entre une physique proche de la singularité initiale et une physique qui en serait éloignée nous serait imposée par une théorie quantique de la gravitation, qui dans le perspective de Penrose devait être fortement asymétrique dans le temps. Mais, le pense Lee Smolin, une théorie asymétrique dans le temps n'est pas naturelle si le temps est émergeant (voir cette discussion entre Lee Smolin et Carlo Rovelli). Si la théorie fondamentale ne contient aucune notion du temps, nous n'avons aucun moyen de distinguer le passé du futur. L'extrême improbabilité de notre univers exigerait toujours une explication. Par contre, une théorie temporellement asymétrique est plus naturelle si le temps est fondamental, car qu'est-il de plus naturel qu'une théorie fondamentale qui distingue le passé et le futur qui sont de fait très différents. 

    Ainsi lee Smolin peut dire que la réalité du temps gagne en crédibilité avec ces considérations, parce qu'elle nous dispense d'avoir à laisser sans explication une immense improbabilité, la forte asymétrie temporelle de notre univers avec les flèches du temps.


    4) Pouvons-nous dire de notre univers qu'il est improbable?

    -Nous avons commencé cet article en évoquant au chapitre 3-1), la probabilité pour qu'il y ait de la complexité. Il a été dit que notre univers et ses conditions initiales étaient improbables (par exemple, il est improbable qu"un univers gouverné par des lois symétriques ait une flèche du temps). Mais que signifie improbable pour un univers? En effet, il est unique et ne s'est produit qu'une fois, c'est le seul en son genre. Mais est-ce que toute propriété le concernant ne doit pas avoir de la probabilité? Il faut alors se demander ce qu'on entend par système se trouvant dans une situation improbable.

    Dans le paradigme newtonien, cela a du sens parce que la description se réfère à un sous-système de l'univers, qui peut peut être l'un d'un grand nombre de sous-systèmes semblables; mais cela ne s'applique plus à l'univers dans son ensemble (voir à ce sujet mes articles (1)- Einstein insatisfait - L'erreur et le dilemme cosmologique). et (2) Le défi cosmologique. C'est ce qui est exprimé dans l'article (2) au chapitre 1: 

     "[...] Rien dans la  chair des théories existantes ne peut nourrir une théorie vraiment fondamentale affirme donc Lee Smolin avec force. C'est une idée bien audacieuse quand on sait les succès des théories dominantes, que soit la physique quantique ou la relativité générale. Rappelons une caractéristique que partagent toutes ces théories bien établies qui rend délicate leur extension à l'univers dans son entier: elles divisent toutes le monde en 2 parties, l'une qui est changeante et dont les degrés de liberté évoluent dans le temps, le système étudié, et l'autre qui est supposée immobile, le reste de l'univers, le "fond".  Cette partie, qui ne nécessite pas qu'on la décrive explicitement, se trouve de manière implicite dans ce qui donne sa signification au mouvement décrit dans la première partie qu'on observe: la distance entre les objets mesurés fait implicitement appel à des points fixes (le cadre de référence qui permet la description du système, le référentiel) et le temps par rapport auquel on décrit le mouvement implique l'existence d'une horloge extérieure au système [...] Cette partition du monde en deux parties, l'une dynamique et l'autre statique, est une fiction, mais elle est précieuse quand il s'agit de décrire de petites portions d'espace. La deuxième partie, supposée statique, est en réalité elle aussi constituée de parties dynamiques, et en faisant fi de la dynamique de leur évolution, nous fixons une cadre à l'intérieur duquel nous avons des lois simples. A l'exception de la relativité générale, la géométrie de l'espace-temps est incluse dans le fond de toutes les théories. Le fond inclue aussi le choix des lois puisque celles-ci sont supposées immuables. Et même la relativité générale, qui décrit une géométrie dynamique, considère d'autres structures fixes comme la topologie et la dimension de l'espace. (voir note 1 page 305: D'autres structures à fond fixe incluent la géométrie des espaces  où vivent les états quantiques, dans lesquels est définie une notion de distance. Les structures de fond en relativité générale incluent la structure différentielle de l'espace-temps et, souvent, la géométrie des frontières asymptotiques).
    Ce partage du monde en ses composantes dynamiques et un fond qui "le cerne" est comme on vient de la voir la caractéristique géniale du paradigme newtonien. C'est elle qui a contribué au succès fulgurants des modèles scientifiques relativiste et quantique. Mais c'est paradoxalement ce qui rend ce paradigme inapplicable dans sa globalité. En effet, il ne peut pas exister de composante statique car tout dans l'univers change et il n'existe aucun extérieur, rien par rapport à quoi les mouvements du reste puissent être mesurés si l'univers est ce qui contient TOUT. Surmonter ce obstacle est ce que Lee Smolin appelle le défi cosmologique [...]"

    Examinons une propriété. On pourrait essayer de définir la probabilité que notre univers possède cette propriété en supposant que les conditions initiales sont choisies au hasard dans un espace de configurations. Mais cette hypothèse est fausse: notre univers n'a pas été produit par un choix fortuit parce que de très nombreuses propriétés seraient très improbables avec un tel choix. Pour éviter ce dilemme, il a été imaginé qu'il existe un très grand nombre d'autres univers, question que nous avons évoqué dans mon article 4 partie II (chapitre 11 -lois évolutives). Nous y avons vu qu'il y a deux sortes de théories des multivers: celles où notre univers est atypique, comme ceux générés par l'inflation éternelle, et de ce fait, improbable, et les théories qu'illustre la sélection naturelle cosmologique (SNC), qui génère un ensemble d'univers où ceux qui ressemblent au notre sont probables. Retenons le chapitre 3) de cet article 4[3) Puissance de la sélection naturelle cosmologique VS le principe anthropique.  -Lee Smolin affirme donc que, à la différence du principe anthropique, la sélection naturelle cosmologique offre ainsi une véritable explication (que Jean Paul Baquiast évoque aussi avec le darwinisme quantique dans nouvelles théories sur l'évolution), à la raison pour laquelle les paramètres du modèle standard paraissent accordés pour un univers qui est rempli d'étoiles à longue durée de vie et ont, au cours du temps, enrichi l'univers en carbone, oxygène et autres éléments nécessaires à mise en place de la complexité qui a permis l'apparition de la vie. Les paramètres dont les valeurs sont ainsi, en un sens expliqués (alors que dans le modèle standard ces paramètres sont des données "sorties du chapeau" et inexpliquées), incluent les masses du proton, du neutron, de l'électron, du neutrino électronique et les intensités des 4 interactions fondamentales. Il y a même un bonus. L'explication concerne la maximisation de la production de trous noirs et une conséquence est la fabrication d'un univers hospitalier pour la vie.]

    Il n'y a que dans la seconde catégorie de multivers que des prédictions peuvent confrontées à des observations réalistes. Dans la première catégorie, le principe anthropique permet de choisir des univers improbables comme le notre mais aucune prédiction n'est possible pour lesquelles on pourrait tester les hypothèses sous-tendant ce scénario. Qu'il y ait de nombreux univers ou un seul on est obligé de conclure qu'il n'y a aucun contenu empirique dans l'affirmation que notre univers est improbable. Mais on a vu que toute la thermodynamique se base sur l'application de la notion de probabilité aux micro-états d'un système. Il s'ensuit que si nous appliquons la thermodynamique pour parler d'une propriété de l'univers entier, nous commettons une erreur cosmologique --->>voir le chapitre 2) La seule façon d'échapper à cette erreur et au paradoxe d'un univers improbable est de baser l'explication de la complexité et du fait que l'univers a un richesse intéressante sur une physique qui soit temporellement asymétrique, qui rend de fait l'univers inévitable plutôt qu'improbable. 

    -Le paradoxe du cerveau de Boltzmann

    Lee Smolin nous dit que ce n'est pas le seul exemple où les physiciens sont parvenus à des conclusions paradoxales en commettant l'erreur d'appliquer la thermodynamique à l'univers entier. Le grand Boltzmann semble avoir été le premier à proposer un réponse pour expliquer pourquoi l'univers ne se trouve pas à l'équilibre. Il ne connaissait ni l'expansion de l'univers ni le big bang. L'éternité (qu'il supposait) de l'univers était pour lui une grande énigme, car cela voulait dire qu'il avait dû déjà atteindre l'équilibre puisqu'il avait disposé d'un temps infini pour le faire. Il s'imaginait que l'univers n'était pas à l'équilibre car notre "région" s'étant formée spontanément à la suite d'une grande fluctuation (de basse entropie), son entropie augmentait alors qu'elle retournait à l'équilibre. C'était peut-être le meilleure vision de son époque, cohérente avec la vision cosmologique, mais elle était fausse. Nous le savons parce que nous pouvons scruter le ciel presque jusqu'au big bang sur un rayon de plus de  13 milliards d'années-lumière et nous n'y voyons aucun indice montrant que notre univers soit une fluctuation de basse entropie dans un monde statique en équilibre. Au contraire, nous y voyons un univers évoluant dans le temps  avec de la structure à toutes les échelles qui se développent alors que l'univers s'étend, ce que Boltzmann ne pouvait savoir. Mais il aurait pu utiliser un argument pour mettre en doute son explication: plus la fluctuation est petite, plus elle se produit souvent à l'équilibre. A cette époque, les astronomes savaient que l'univers avait au minimum des dizaines de milliers d'années-lumière de rayon. Donc si notre région d'espace était le résultat d'une fluctuation, elle aurait dû être extrêmement rare... bien plus rare que des fluctuations qui pourraient nous contenir. D'après Boltzmann, ces fluctuations moins rares devraient se produire beaucoup plus souvent dans un univers à l'équilibre que ce que nous indiquent nos observations. Il serait infiniment plus probable que nous nous trouvions dans une fluctuation de la taille du système solaire que dans dans une fluctuation de la taille d'une galaxie. Si on poursuit le raisonnement, il est de plus en plus probable de se trouver dans une fluctuation que sa taille est petite. Ainsi produire un cerveau doté de souvenirs et d'images nécessiterait une fluctuation bien moindre que celle qui peut produire une planète de créatures vivantes en orbite autour d'une étoile. Une fluctuation qui produirait juste un cerveau complet avec les souvenirs et l'expérience d'un monde imaginaire s'appelle selon wikipedia "cerveau de Boltzmann": "Il est plus probable qu'un seul cerveau se forme spontanément et brièvement dans un vide (avec un faux souvenir d'avoir existé dans notre univers) plutôt que notre univers ne s'est créé de la même manière que la science moderne pense qu'il l'a fait. C'est une réponse réductio ad absurdum à l' explication précoce de Ludwig Boltzmann sur l'état de faible entropie de notre univers[ou selon une autre définition: "cerveau de Boltzmann": "Un cerveau de Boltzmann est un être hypothétique conscient de soi qui existe grâce aux fluctuations quantiques aléatoires d'un état de chaos. L'idée est nommée d'après Ludwig Boltzmann (1844–1906), le physicienqui a suggéré que l'univers est observé dans un état peu probable et hors équilibre parce que seule l'existence aléatoire de tels états permet l'existence des cerveaux qui sont conscients de l'univers. Le terme cerveau de Boltzmann (en anglais : Boltzmann brain) fut proposé en 2004 par Andreas Albrecht et Lorenzo Sorbo1"]Cette option requiert beaucoup moins d'informations, donc moins d'entropie négative qu'une fluctuation de la taille de la galaxie ou même du système solaire, de sorte que les fluctuations de cerveaux uniques devraient se produire beaucoup plus souvent dans l'univers 

    Ceci est le paradoxe du cerveau de Boltzmann. Il implique que sur une éternité de temps, il y a beaucoup plus de cerveaux dans l'univers, naissant de petites fluctuations spontanées, que de cerveaux issus du lent processus de l'évolution, qui nécessite une fluctuation qui dure des milliards d'années. Donc, si on suit cette hypothèse de Boltzmann concernant les fluctuations spontanées, comme nous sommes des êtres conscients, il est plus que probable que nous sommes des cerveaux de Boltzmann. Alors, Certains "cerveaux de Boltzmann" existent-ils déjà dans notre univers? En fait, la réponse est que nous savons que nous ne sommes pas des cerveaux spontanés, parce que si nous étions cela, notre expérience et nos souvenirs seraient, en général, vraisemblablement plus incohérents que cohérents. Il n'y aurait pas de raison pour que notre cerveau contienne des images d'un vaste univers de galaxies autour de nous. Le scénario de Boltzmann est en fait un cas classique de raisonnement par l'absurde. 


    5) Conclusion de ma lecture du chapitre 16 de "la renaissance du temps". 

    Depuis mon article 7 (La renaissance du temps par la relativité chapitre 14) , nous savons que "LE TEMPS VIENT D'ÊTRE REDECOUVERTavec l'argumentation solide qu'en apporte Lee Smolin, et qu'on peut synthétiser par: "La notion globale de temps que nous venons de voir implique qu'en chaque événement il existe un observateur privilégié dont l'horloge mesure la passage du temps. Mais il n'y a aucun moyen de le choisir par une mesure qu'on pourrait faire dans une petite région, ce qui confirme le principe de relativité à des échelles plus petites que celle l'univers. Ce choix d'un temps global particulier est déterminé par la façon dont est distribuée la matière dans l'univers. La dynamique des formes constitue [...] "un pont" entre le principe de relativité et le temps global qu'exigent les théories telles que celles à laquelle aspire Lee Smolin avec des lois évolutives ou celles qui expliquent les phénomènes individuels au moyen de variables cachées. Il y a une grandeur par contre qui n'a pas le droit de changer lorsqu'on agrandit ou qu'on rapetisse les échelles, c'est le volume de l'univers à chaque instant, même s'in évolue au cours du temps. Ceci donne donc un sens à la taille totale de l'univers et à son expansion et nous fournit une horloge physique universelle".

    Après avoir examiné au chapitre 3-2 (de cet article) La physique moderne et la thermodynamiques'est  posée au chapitres 3-3) la question notre univers est-il en équilibre? La réponse étant négative nous avons examiné au chapitre 3-4 la question de la flèche du temps et le problème qu'elle pose (son illusion?). Nous avons effectué au chapitre 3-5) un retour à la question qui a été à l'origine de la réflexion de Lee Smolin:le temps est-il fondamental? Est-il asymétrique? En effet, si nous avons besoin de conditions initiales asymétriques pour expliquer notre univers alors que les lois de la nature sont temporellement symétriques, cela n'affaiblit-il pas l'argument en faveur d'un temps irréel, qui n'existe pas, comme le présente la cosmologie moderne (Carlo Rovelli dit: "il faut oublier le temps")? Au chapitre 5 nous avons réexaminé  une réflexion qui est présente dans notre questionnement depuis le début du livre de Lee Smolin (et donc dans mes articles): Pouvons-nous dire de notre univers qu'il est improbable (en raison de l’ajustement fin qui réfère à l’étonnante précision des constantes physiques de la nature et de l’état premier de l’Univers)? En effet, pour expliquer l’état présent de l’univers, même la meilleure théorie scientifique suppose que les constantes physiques de la nature et l’état premier de l’Univers aient des valeurs extrêmement précises. Pour Lee Smolin, la seule façon d'échapper à l'erreur cosmologique et au paradoxe d'un univers improbable est de baser l'explication de la complexité et du fait que l'univers a un richesse intéressante sur une physique qui soit temporellement asymétrique, qui rend de fait l'univers inévitable plutôt qu'improbable et d'adopter la réalité du temps. 

    Cet article 9  a débuté au chapitre 3 avec une synthèse effectuée par le DrGoulu de ce dont je présente "ma lecture" dans cet article, le chapitre 16  (vie et mort de l'univers) du livre de Lee Smolin: "La vision intemporelle de la physique basée sur le paradigme de Newton a montré son impuissance face aux questions les plus basiques de l’univers : pourquoi est-il intéressant (…) au point que des créatures comme nous puissions y être et nous en émerveiller ? Mais si nous adoptons la réalité du temps, nous rendons possible une physique asymétrique par rapport au temps dans laquelle l’univers peut naturellement faire évoluer de la complexité et de la structure. Et ainsi nous évitons le paradoxe d’un univers improbable".  

    Liens: 

    mort thermique de l'univers  notre univers est-il irréversible?   La direction du temps     l'irréversibilité du temps  problème de la mesure en cosmologie     La singularité initiale   l'origine de l'univers

    http://philoscience.over-blog.com/article-7053208.html: Le problème de la mesure en cosmologie concerne la manière de calculer des fractions d' univers de types différents dans un multivers . Il survient généralement dans le contexte de l' inflation éternelle . Le problème se pose parce que différentes méthodes de calcul de ces fractions donnent des résultats différents, et il n’est pas clair quelle approche est correcte (le cas échéant). Les mesures peuvent être évaluées en fonction de leur capacité à prévoir les constantes physiques observées et à éviter des implications contre-intuitives, telles que le paradoxe de la jeunesse ou le cerveau de Boltzmann . Alors que les dizaines de mesures ont été proposées, [peu de physiciens considèrent que le problème est résolu. 

    Le livre "rien ne va plus en physique (l'échec de la théorie des cordes)": La partie I du livre explique pourquoi depuis la naissance de la science moderne, avec l'effet Copernic et Galilée, le paradigme newtonien sous-tend toutes les théories y compris les théories quantiques et la relativité (le « paradigme newtonien » et ce qu'il a impliqué, dont l'hypothèse des multivers, est utile pour décrire l'évolution d'un système dans un laboratoire, mais il perd tout sens appliqué à l'univers entier. Il n'explique pas pourquoi telles ou telles lois sont choisies parmi l'infinité de lois possibles.Selon celui-ci, un système, quel qu'il soit, pourrait être décrit par un ensemble d'états initiaux qui lui sont attribués, puis par les lois présidant à son évolution en fonction du temps. Mais si ces données sont utilisées initialement pour décrire le système, il n'est pas possible de considérer qu'elles pourraient aussi être le résultat de son évolution. Il faut rechercher d'autres lois, l'illusion de la flèche du temps https://www.agoravox.fr/actualites/technologies/article/la-fleche-du-temps-expliquee-du-163219 : La flèche du temps expliquée. Du « Temps quantique » au temps macroscopique

    https://trustmyscience.com/inversion-fleche-du-temps-avec-ordinateur-quantique/: Des physiciens ont réussi à “inverser” la flèche du temps grâce à un ordinateur quantique

    liens:: 

    http://users.polytech.unice.fr/~leroux/transmission/courstransmission.htmlNotions de communication numériqueJoël Le Roux

    http://boningal.dardel.info/Electronisme/Complements/Entrees/2014/10/18_Le_temps,_Lee_Smolin_et_le_temps,_lillusion_du_temps,_la_fleche_du_temps.htmlLe temps, Lee Smolin et le temps, l’illusion du temps, la flèche du temps

    https://journals.openedition.org/dossiersgrihl/3664l’athéisme de Richard Dawkins Note critique à propos de l’ouvrage de Richard Dawkins, Pour en finir avec Dieu,

    https://www.levif.be/actualite/magazine/pourquoi-ils-veulent-en-finir-avec-dieu/article-normal-895261.html?cookie_check=1560788775: Richard Dawkins entend démontrer que " Dieu est très peu probable, inutile et nuisible ". Au passage, le biologiste britannique et chef de file des Nouveaux athées tort le cou aux créationnistes. Voici 20 raisons qui plaident pour l'athéisme. A vous de juger.

     https://studylibfr.com/doc/3188620/gravitation-quantique: La gravitation quantique, le manuscrit de carlo rovelli

    http://www-cosmosafap.fr/gravitation%20quantique.htmGravitation quantique à boucles VS théorie des cordes !

    http://chaours.rv.pagesperso-orange.fr/physique/Quant/qgrav.htmLa démarche suivie par les tenants de la gravitation quantique à boucles est complètement différente de celle des cordistes. Elle part de l’hypothèse que la géométrie de l’espace-temps s’identifie au champ gravitationnel. La géométrie peut donc être assimilée à un champ. Or, la physique quantique est une théorie des champs. Que se passe-t-il si on cherche à quantifier le champ représentatif de la géométrie de l’espace-temps ? variables d'ashtekar 
    https://www.agoravox.fr/actualites/technologies/article/2-la-gravite-quantique-elaboree-178582:

    2 La gravité quantique élaborée comme une physique de l’information  

    https://arxiv.org/pdf/gr-qc/ INTRODUCTION TO LOOP QUANTUM GRAVITY AND SPIN FOAMS par ALEJANDRO PEREZ ∗ 

    http://www.ens-lyon.fr/DSM/SDMsite/M2/stages_M2/Dupuis.pdfMousses de spin en gravit´e quantique https://arxiv.org/pdf/1705.01597.pdf: Testing different approaches to quantum gravity with cosmology: An overview Aurélien Barrau - Among the available quantum gravity proposals, string theory, loop quantum gravity, noncommutative geometry, group field theory, causal sets, asymptotic safety, causal dynamical triangulation (voir VIII. CAUSAL DYNAMICAL TRIANGULATION), emergent gravity are among the best motivated models. 

    https://actualite.housseniawriting.com/science/physique/physique-quantique/2015/11/18/la-source-quantique-de-lespace-temps/10611/De nombreux physiciens pensent que l’intrication est l’essence de l’étrangeté quantique et certains d’entre eux suggèrent désormais que l’intrication pourrait être aussi la source de la géométrie de l’espace-temps.

    http://www.philipmaulion.com/2017/05/emergence-pourquoi-les-physiciens-recourent-ils-a-cette-notion.html: Emergence : pourquoi les physiciens recourent-ils à cette notion ?

    http://michel.bitbol.pagesperso-orange.fr/Quantique_Connaissance.pdf: LA STRUCTURE QUANTIQUE DE LA CONNAISSANCE INDIVIDUELLE ET SOCIALE par Michel Bitbol, 

    http://fabien.besnard.pagesperso-orange.fr/articles/temps.pdfCE QU'EN DISENT LES PHYSICIENS Le temps est devenu un casse-tête pour les physiciens. Il leur pose des problèmes à la fois formels, conceptuels et philosophiques dans des disciplines aussi diversifiées que la mécanique quantique, la thermodynamique et la théorie de la relativité.

    http://fabien.besnard.pagesperso-orange.fr/articles/temps.pdf: Temps des philosophes, temps des physiciens, temps des mathématiciens Fabien Besnard 9 juin 2010 Résumé La question de la compatibilité du présentisme et du possibilisme avec la Relativité a fait couler beaucoup d’encre depuis l’argument initialement proposé par Rietdijk et Putnam....

    http://ungraindesable.blogspot.com/2013/06/presentisme-et-theorie-de-la-relativite.html: I) Présentisme et théorie de la relatisité

    http://ungraindesable.blogspot.com/2013/08/presentisme-et-mecanique-quantique.html: II) Présentisme et mécanique quantique https://laviedesidees.fr/Un-monde-sans-temps-ni-espace.html  Un monde sans temps ni espace À propos de deux ouvrages de Carlo Rovelli.

    http://www.doublecause.net/index.php?page=Carlo_Rovelli.htm: Carlo Rovelli, Et si le temps n'existait pas ? Un peu de science subversive

    http://interlivrehypertexte.over-blog.com/2018/04/le-temps-est-une-emotion-carlo-rovelli-l-ordre-du-temps.htm: le mystère du temps est lié à la nature de notre conscience, le temps est une émotion. Notre cerveau enregistre des changements qui se produisent dans le corps et dans sa perspective, et des sentiments (feelings, voire rasa) émergent de cette mise en mouvement cérébrale. Sentiments qui, à leur tour, propulsent toute une culture (A. Damasio, L'ordre étrange des choses,

    https://fr.wikipedia.org/wiki/Discussion:Causalit%C3%A9_(physique): wikipedia, causalité et physique. Voir théories indépendantes du fond.

    https://blogs.mediapart.fr/michel-pinault/blog/010318/crise-de-la-culture-scientifique-crise-de-la-scienceCrise de la culture scientifique, crise de "la science"

    https://blogs.mediapart.fr/michel-pinault/blog/010318/crise-de-la-culture-scientifique-crise-de-la-scienceCrise de la culture scientifique, crise de "la science"

    https://www.agoravox.fr/actualites/technologies/article/2-la-gravite-quantique-elaboree-178582 : La gravité quantique élaborée comme une physique de l’information

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    https://www.agoravox.fr/actualites/technologies/article/2-la-gravite-quantique-elaboree-178582 : La gravité quantique élaborée comme une physique de l’information

    http://michel.bitbol.pagesperso-orange.fr/Relations_Mauss.pdf: La mécanique quantique comme théorie essentiellement relationnelle1 Michel Bitbol 

    https://arxiv.org/pdf/quant-ph/9609002.pdfRelational Quantum Mechanics Carlo Rovelli

    http://opportunisme-cognitif.blogspot.com/2010/06/epistemologie-relationnelle-de-la.html: Épistémologie relationnelle de la physique quantique Kant, nouveau sage tibétain de la physique quantique ? par Hicham-Stéphane Afeissa

    https://www.agoravox.fr/actualites/technologies/article/la-bataille-decisive-entre-172128: La «bataille décisive» entre physique quantique et relativité générale a déjà commencé

    par Bernard Dugué (son site)

     

    https://hal.archives-ouvertes.fr/jpa-00220690/document: RÉFLEXIONS SUR LA PHILOSOPHIE DE BOHR, HEISENBERG ET SCHRÖDINGER A. Shimony

    https://fr.wikisource.org/wiki/Les_Principes_de_la_connaissance_humaine/IntroductionGeorge Berkeley Les Principes de la connaissance humaine Traduction par Charles Renouvier

    http://www.blog-chaman-esoterisme.com/2018/09/l-incroyable-hypothese-de-rupert-sheldrak-la-resonance-morphique-une-theorie-holistique-de-la-realite.html: l'hypothèse holistique de Rupert Sheldrake, la raisonnance morphique

    http://www.neotrouve.com/?p=348: Physique Quantique : entre Science et Conscience
    http://guillemant.net/index.phpcate=articles&part=physique_information&page=Un_univers_dinformations.htm: P
    hilippe Guillemant - L’idée selon laquelle notre univers serait un espace-temps composé d’informations a été considérablement popularisée par un film de science fiction : Matrix. La réalité pourrait rejoindre la fiction puisqu’il s’agit là d’une idée qui reçoit de plus en plus d’appuis scientifiques.

    http://internetactu.blog.lemonde.fr/2014/09/03/vers-une-physique-de-linformation/Vers une physique de l'information

     http://www.pileface.com/sollers/pdf/Le%20temps.pdf: Le temps, ça n'existe pas : le physicien Carlo Rovelli nous explique pourquoi. "Seule la thermodynamique connaît la direction du temps"

     https://www.rocq.inria.fr/secret/Nicolas.Sendrier/thinfo.pdf; École polytechnique Informatique Introduction à la théorie de l'information Nicolas Sendrier 

    https://books.openedition.org/cdf/527?lang=fr: Physique quantique

    Leçon inaugurale prononcée le jeudi 13 décembre 2001 par Serge Haroche

    https://www.miniwebtool.com/log-base-2-calculator/: calcul des logarithmes à base 2

    https://www.jp-petit.org/science/smolin/SmolinLivre.pdf: Sur le livre de Lee Smolin rien ne va plus en physique parMichel Mizony juillet 2007

     

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    Ma lecture du livre Perdons-nous connaissance? de Lionel Naccache:

    CHAPITRE 3 - Neurorésistances

    CHAPITRE 4 - Darwino-résistances

    CHAPITRE 5 - L'information et la connaissance confondues

     

     

    J'écris mon blog pour partager ma soif de connaissances, mes réflexions et mes passions et mes lectures. Dans ces articles, je voudrais partager "ma lecture" du livre de Lionel Naccache  "Perdons-nous connaissance?". Ecrire ce que je retiens de mes lectures me permet de réfléchir à la compréhension que j'en ai. je mets entre guillemets les passages qui me semblent importants ou qui me frappent. Et par dessus tout je fais des recherches sur internet pour compléter ma lecture avec le maximum de liens que je souhaite responsables, qui permettent aux lecteurs d'approfondir la connaissance du sujet.   

     

     

    https://www.lateledelilou.com/jocelinmorisson/Internet-peut-il-etre-conscient-Ou-le-materialisme-jusqu-a-l-absurde_a9.htmlInternet peut-il être conscient ? Ou le matérialisme jusqu’à l’absurde

     

     

     

     

    "L’ouvrage passionnant de Lionel Naccache pourrait bien atteindre son objectif et devenir le "manifeste de la connaissance" du 21ème siècle. Un siècle où il va falloir réveiller un peu ces neurones qui se laissent bercer par la houle de l’information. Pour bâtir la société de la connaissance, il va falloir se jeter à l’eau. Ce qui revient à apprendre à nager. Et même plus. Cette eau doit nous pénétrer et nous transformer. A chaque nouvelle connaissance, nous ne sommes plus les mêmes. De quoi frémir de plaisir mais aussi de crainte".

     

     Je continue de livrer dans cet article "ma lecture" du livre Perdons-nous connaissance? de Lionel Naccache: c'est-à-dire perdons-nous le sens de ce qu'est la connaissance alors que nous nous autoproclamons " société de la connaissance "? Aujourd'hui, la connaissance ne fait plus peur à personne, alors que depuis trois mille ans notre culture occidentale n'a cessé de la décrire comme vitale et dangereuse. Oui, dangereuse, qui s'en sou-vient encore? Cette rupture avec notre héritage constitue-t-elle un progrès ou une régression, une chute ou une ascension? La Mythologie et la Neurologie, sources de "connaissance de la connaissance", nous offriront de précieuses clés pour résoudre ce paradoxe inédit dans l'histoire de la pensée". 

     

        [http://www.ac-grenoble.fr/PhiloSophie/logphil/reperes/intuitif.htm:

         Définitions

     

    Intuitif

    L'intuition peut être sensible ou intellectuelle : simple réceptivité de ce qui nous est donné par les sens, ou vision directe de l'esprit.

    La connaissance intuitive désigne une forme de connaissance immédiate, qui ne passe pas par le langage, la conceptualisation.

    Elle est singulière.

    "L'intuition est ce qui devient conscience de façon immédiate." Hegel

    Discursif

    La connaissance discursive passe par l'intermédiaire du langage, des concepts. Elle est générale.]

    1) Résumé de mes articles précédents en préambule: Pourquoi cette question "Perdons-nos connaissance?" alors que nous avons cette merveilleuse faculté qui nous semble aller de soi, la capacité de connaître ce que nous ne connaissions pas encore à l'instant qui précédait. Notre société s'autoproclame en effet "société de la connaissance" comme elle ne l'avait jamais fait auparavant. Et pourtant, depuis les origines de notre culture, la connaissance est représentée comme un danger, un "poison vital". Elle serait porteuse d'un certain danger existentiel qui a imprégné notre culture depuis plus de 3 000 ans jusqu'à l'époque moderne avec le siècle des Lumières que Bertrand Vergely a appelées "obscures Lumières", et dont j'ai présenté ma lecture dans l'article de mon blog. Ce danger multi-millénaire s'est exprimé dans trois grands mythes qui ont façonné notre civilisation. 

    Un rapide résumé de mes précédents articles:

    Dans l'article 1, nous avons vu: Chapitre 11-1) Adam et Ève face à l'arbre de la connaissance. 1-2) Le tragique destin d'Icare1-3) L'allégorie de la caverne de Platon. 1-4) La figure de Faust.

    Chapitre 2: 2-1) La connaissance menace Athènes l'éternelle2-1-1) I comme Icare: la leçon est que connaître sans limites est une démesure  condamnable et dangereuse. Cette menace ainsi stigmatisée semble engager l'individu dans son rapport personnel et solitaire avec la connaissance. 2-1-2) L'homme qui en savait trop avec l'allégorie du mythe de la caverne. Pour Platon et Socrate, l'homme de connaissance serait l'inévitable victime de la violence du groupe qui l'entoure. Icare nous montrait les risques du rapport de l'individu face à la connaissance. Ici, Platon nous indique que l'homme qui connaît est également vécu comme une menace par ses congénères et que cette menace conduit à la disparition inéluctable de celui qui connaît, incapable de transmettre son savoir. Cela conduit à la préservation de l'ignorance, le fondement et la garantie de d'une certaine forme de paix ou de confort social. 

    2-2) La connaissance menace Jérusalem: 2-2-1) Du paradis perdu au Pardes retrouvé. Le Pardès (Kabbale) "est un lieu où l'étudiant de la Torah peut atteindre un état de béatitude. 2-2-2) Vie et destin de quatre talmudistes en quête de connaissance 2-2-3) Vie et destin de quatre talmudistes en quête de connaissance suite: le cas de rabbi Akiva -La connaissance? Une vraie boucherie! 

    Avec mon mon article 2 nous avons vu comment après la Grèce et Jérusalem, la connaissance menace outre-Rhin avec Johann Georg Sabellicus Alias Docteur FaustC'est probablement le pont le plus précieux qui nous permet d'établir une continuité directe entre les considérations plus antiques que nous avons examinées sur le pouvoir mortifère de la connaissance et notre époque actuelle. Dans la version moderne, Thomas Mann, l'une des figures les plus éminentes de la littérature européenne de la première moitié du xxe siècle, qui est considéré comme un grand écrivain moderne de la décadence, nous présente le Doktor Faustus (Adrian Leverkhün), dont l'existence sera marquée par l'audace (Khün en allemand) et qui, comme Nietzsche, braverait la folie. A la fin du récit, il est victime de son propre désenchantement. Il est victime de sa croyance en un ordre caché de la musique et de la connaissance, qui vont le conduire à la plus horrible des découvertes: le néant, l'absence de signification du monde et de nous-mêmes. "Lorsque son neveu adoré, l'adorable Nepomuk, "dernier amour de sa vie", meurt d'une méningite cérébro-spinale foudroyante dans d'horribles souffrances, Leverkhün atteint l'étape ultime de son voyage. Le monde est un non-sens. Tel est l'ultime cadeau de la connaissance. Il peut alors mourir dément, atteint de paralysie générale..."

    J"ai terminé et conclu "ma lecture" de cette première partie du livre (que j'ai exprimée dans ces articles 1 et 2) par le chapitre 2 de l'article 2 : "Des mythes à la réalité ou l'art de la mauvaise solution".

    -Dans l'antiquité le cloisonnement était "la mauvaise solution" antique au problème de la connaissance.

    -Au moyen-âge, l'Europe a fait un autre choix. Sa "mauvaise solution" fut celle d'un obscurantisme religieux fondé sur la peur, peur de la mort et de l'enfer, la dichotomie bien-mal et sur le mécanisme de rédemption par la soumission à un discours religieux qui a stérilisé la pensée pour les masses incultes. 

    -La révolution des Lumières s'oppose à l'obscurantisme médiéval ("?") et aboutit à la tentative de débarrasser la connaissance des barrières que les périodes précédentes avaient avaient érigées. 

    -Finalement, mythes et réalité, même combat, même message?: pendant plus de 3000 ans, la connaissance a été vécue comme un poison vital mais, désormais nulle menace à connaître ne semble plus habiter les discours dominants de nos sociétés, la connaissance ne poserait plus aucun problème au contraire? Vraiment?

    -Ou bien... Il faudrait plutôt considérer l'autre hypothèse: la connaissance aurait conservé l'essentiel de ses menaces. Elle serait toujours mortifère, pour l'individu, pour le groupe social et pour le couple. Si tel est le cas, il faudrait alors expliquer pourquoi notre discours actuel ne contient aucun signal d'alarme ni aune zone d'ombre. Serions-nous capables de nous autoproclamer "sociétés de la connaissance" sans nous mettre en garde contre ses effets nocifs? Ce serait sans aucun doute tenir un discours "bonasse" inspiré de la méthode Coué, sans nous rendre compte de son inadéquation au réel de son caractère profondément erroné.

    -Alors, comment procéder pour avancer? 

    mon article 3 a été axé sur La dimension fabulatrice de notre activité mentale. Pour prendre conscience de cette couche de fiction, une première voie peut nous y aider, la réflexion philosophique. Cette voie est empruntée par les courants de la phénoménologie, avec par exemple la conscience selon Husserl ou LévinasUne seconde voie est celle de la neuropsychologie. Dans "le nouvel inconscient", Lionel Naccache "nous invite [...] à une nouvelle odyssée, placée sous les auspices des neurosciences de l’esprit. Nancy Huston évoque aussi la dimension "fabulatrice" de notre activité mentaleL'étude des malades neurologiques a joué a révélé la description des sanyètes qui dévoilent et mettent en évidence les fictions-interprétations-croyances qui sont beaucoup plus difficiles à déceler chez des individus qui n'ont pas ces lésions cérébrales. Ces exemples tirés de la clinique permettent de proposer une définition de l'acte de connaissance. Cet acte met en scène trois unités: le sujet X tel qu'il était et se représentait à lui-même avant de connaître l'objet Y, cet objet Y tel qu'il existe dans le monde extérieur au sujet et enfin le sujet X', le sujet tel qu'il est devenu après avoir assimilé l'objet Y. Au chapitre 2 de l'article 3Lionel Naccache écrit que nous interprétons et nous croyons, donc "nous sommes". Mais quel lien cela a t-il avec le "perdons-nous connaissance", le sujet de départ du livre? En philosophie, "la connaissance est l'état de celui qui connaît ou sait quelque chose. Elle implique le sujet, rouage essentiel de la condition humaine auquel ce détour neurologique permet d'accéder. Nous sommes des êtres pétris de fictions et de croyances. Dès que nous prenons conscience d'une information, que nous faisons connaissance avec elle en prenant connaissance d'elle, nous l'interprétons et l'incorporons dans des constructions fictionnelles. C'est la couche des représentations évoquée par Kant et Husserl. Donc toute réflexion sur la connaissance et sur le sujet qui en est l'acteur, doit prendre en compte cette dimension de la fiction dans laquelle s'enracine notre subjectivité. Pas de connaissance sans sujet, donc sans système de fictions-interprétations-croyances!

         [http://www.ac-grenoble.fr/PhiloSophie/logphil/reperes/intuitif.htm:

         Définitions

    Intuitif

    L'intuition peut être sensible ou intellectuelle : simple réceptivité de ce qui nous est donné par les sens, ou vision directe de l'esprit.

    La connaissance intuitive désigne une forme de connaissance immédiate, qui ne passe pas par le langage, la conceptualisation.

    Elle est singulière.

    "L'intuition est ce qui devient conscience de façon immédiate." Hegel

    Discursif

    La connaissance discursive passe par l'intermédiaire du langage, des concepts. Elle est générale.]

    Dans l'article 4, nous avons évoqué la société de la connaissance et le paradoxe de ses brûlures. Alors que l'actualité en ce début 2019 pose de plus en plus de questionnements, notre rapport actuel à la connaissance constitue encore une énigme, car, si la connaissance constitue un danger existentiel constitutif de son essence, pourquoi et comment sommes-nous devenus les premières générations de l'histoire de a culture occidentale à ne plus prendre conscience de la menace que représente la connaissance, alors que l' avenir de l'humanité  semble menacé? Pourquoi et comment cette composante qui était présente à nos côtés depuis les récits bibliques et mythologiques antiques a t-elle disparu de notre discours contemporain? Sommes-nous devenus aveugles et insensibles? C'est que les "mauvaises solutions" imaginées au fil des siècles, que nous avons évoquées, ont perdu leur attrait et leur puissance, et sont aujourd'hui explicitement condamnées par les sociétés occidentales, même si certaines resurgissent trop souvent. Nous avons vu que c'étaient le cloisonnement de la connaissance, l'obscurantisme religieux, la censure politique ou la manipulation idéologique des esprits. Et maintenant nous faisons l'apologie de la connaissance comme jamais nulle société humaine ne semble l'avoir fait! Existerait-il une "mauvaise solution" contemporaine ainsi qu'un lien entre toutes ces "mauvaises solutions"? 

    Nous vivons en effet un malaise inédit dans l'histoire de notre culture occidental qui se manifeste par par un paradoxe entre d'une part un discours apologétique et univoque sur la connaissance ("nous sommes une société de la connaissance !") et d'autre part, la constatation que partout la connaissance continue de nous infliger les multiples brûlures dans chacun de ses champs d'action (brûlures de la connaissance amoureuse, familiale ou médicale, de la connaissance sociale ou médiatique et encore et toujours, brûlures de la connaissance scientifique qui continue à déstabiliser nombre de croyances individuelles et collectives très profondes). Nous verrons dans un prochain article que nous sommes plutôt dans une société de l'information. Mais la question reste posée: Société de la connaissance ou société de l’information ?

    Nous avons longuement examiné le paradoxe et les brûlures de la transparence. Pourtant, à l'heure de la prétendue parfaite transparence, il n'est pas difficile de constater que l'accès à certaines informations dites "sensibles" demeure extrêmement problématique, ceci en parfaite contradiction avec le discours de façade des institutions qui ne cessent pas de condamner toute forme de censure et de louer les bienfaits de la transparence absolue.  Une forme d'occultation vise également à une autre fonction: la préservation du confort de nos croyances; c'est à dire ne pas informer les sujets que nous sommes de la réalité tout en prétendant le faire, ce qui permet de demeurer entourés de nos fictions familières. Mais de plus en plus, la violence est exposée et décortiquée de façon exhibitionniste dans les média et nous sommes soumis  des flots d'anxiété de confusion  et d'interrogation (qui confinent souvent à la psychose) dans les informations en temps réel au plus près de ce qui est présenté comme la réalité et la vérité, même si ce n'est pas dans ces actions seules que les situations peuvent être expliquées et comprises. L'information devient de plus en plus manipulée par l'utilisation de l'émotion qui occulte souvent le sens critique, le discernement et l'analyse. On est alors confronté à l'ineptie d'un discours décomplexé, béat ou cynique à propos de l'évidence et de l'innocuité prétendue de la "transparence" dans nos sociétés. En fait, de nombreuses personnes sont acculées à une contrainte formelle aussi aliénante, aveugle et étouffante que celle de la bourgeoisie du XIXè siècle. Leur projet de la transparence n'est pas une libération de la puissance d'agir et d'être chère à Spinoza nous précise Lionel Naccache.  

    Ainsi, cette "société de la connaissance", pierre angulaire de la "société du savoir", expression adoptée par Abdul Waheed Khan (Sous-Directeur général pour la communication et l'information de l'UNESCO de 2001 à 2010) qui est plutôt une société de l'information, car elle occulte trop le sujet au profit de l'objet observé, n'est encore pas au bout de ses peines. Pour beaucoup, l'éveil est sans doute encore loin. Les Lumières ont peut-être enterré trop vite les 3000 ans de culture occidentale pour lesquelles la connaissance est représentée comme un danger, un "poison vital" et qui serait porteuse d'un certain danger existentiel.

     

    2) Neuro-résistances.

    Après avoir examiné les brûlures de la transparence, en suivant une progression depuis les connaissances relatives à la sphère de l'intimité jusqu'à celles qui renvoient aux entités collectives et sociales, revenons maintenant au centre de tous ces cercles concentriques, c'est à dire au sujet lui-même. L'hypothèse qui sous-tendue est que le "danger" de la connaissance repose in fine sur les risques existentiels inhérents à la transformation du sujet qui accompagne l'expérience de connaissance et en particulier sur le gain de lucidité sur soi-même qui peut anéantir certaines des fictions identitaires du sujet. Ici, Lionel Naccache se pose la question: "que se passe-t-il lorsque l'objet Y de la connaissance n'est autre que X lui-même? C'est un cas singulier du modèle que qui a été présenté dans l'article 3: 3-1) "l'acte de connaître met en scène trois entités: -le sujet X tel qu'il existait et se représentait à lui-même avant de connaître l'objet Y -L'objet Y qui est le support de cet acte de connaissance. -Le sujet X' qui est le sujet ayant absorbé l'objet Y, c'est à dire le sujet ayant mis à jour ses représentations mentales à la lumière des nouvelles connaissances acquises")
    La transformation du sujet X en X'; sujet modifié, affecte l'objet Y auquel il s'identifie alors. Cette réflexion est née d'une une interrogation que Lionel Naccache a publié dans un essai sur la conscience et l'inconscient où la conception générale de la conscience était fondée sur la faculté mentale de développée dans les chapitres consacrés aux neurosciences-fictions: "le fait d'être conscient s'accompagne d'une propension irrépressible à à se raconter des histoires, à fabriquer des fictions, auxquelles nous croyons". Vraies ou fausses, ces fictions sont des fictions, des interprétations et des croyances. Nous donnons ainsi, par elles, un sens à nos existences, et ce sens, pour fictif qu'il soit, s'inscrit dans notre réalité mentale. 

    Le projet a pris forme dans un article écrit en 2007, publié par Marcel Gauchet dans la revue "le Débat" en nov-dec 2008: http://le-debat.gallimard.fr/articles/2008-5-neuro-resistances/ (Neuro-résistances Une déshumanisation de l'esprit ?) par Lionel Naccache. Les neurosciences de l’esprit élaborent un programme original d’exploration des mécanismes cérébraux et des fondements psychologiques qui gouvernent les aspects les plus intimes de notre vie mentale. Ce champ de connaissance qui vise l’un des derniers bastions d’opacité de notre époque avide de transparence connaît une prodigieuse accélération de productivité depuis une vingtaine (...)). La connaissance de soi, le décryptage de notre subjectivité à la lumière du discours objectivant des neuro-sciences de l'esprit ne va pas de soi et peut poser problème. Quelles sont les origines de cette "neuro-résistance" aux multiples visages? A quelles menaces profondes tente-elle de faire rempart? Cette question est autrement plus gigantesque que les dangers de  "la connaissance" dont il est question depuis le début dans les articles. Pourquoi et comment résistons nous aux neuro-sciences ? 

    Deux menaces, qui alimentent une neuro-résistance, sont associées aux neuro-sciences de l'esprit: la menace d'une dérive vers un nouveau scientisme et celle d'une déshumanisation des sujets qui seraient transformés en objets pour la techno-science moderne. Mais, au-delà de ces deux critiques, un troisième motif de neuro-résistance, irréductible aux deux premiers, apparaît à travers des argumentations verrouillées d'avance à toute possibilité de discussion. C'est ainsi que certains "néo-dualistes" proclament que notre subjectivité n'a rien à faire avec l'activité de notre cerveau ou bien défendent l'idée définitive que nous ne serons jamais capables de décoder notre subjectivité dans la lecture de l'activité cérébrale en faisant appel par exemple au concept d'incertitude de Gödel ou au principe d'incertitude quantique de Heisenberg. Ces réactions sont souvent très radicales, voire agressives. Selon Lionel Naccache elles peuvent des "réactions-écrans" similaires à aux "souvenirs-écrans" postulés par Freud et qui reposent sur un leitmotiv universel et intemporel de notre condition humaine: la connaissance envisagée comme la cause d'une disparition certaine. Les menaces ne sont jamais aussi fortes que lorsque l'objet de la connaissance n'est autre que nous-mêmes, notre identité et le fonctionnement de notre esprit. Autrefois les obstacles dressés contre une exploration de l'esprit étaient les obscurantismes religieux ou diverses formes de dualisme. La psychanalyse  déterministe de Freud, qui avait exploré notre psychisme et lutté contre certaines résistances, peut être réinvestie, mais par les tenants de cette résistance cette fois, qui proclament un dogmatisme nouveau contre l'exploration du psychisme. Ces injonctions au respect inviolable de l'opacité qui recouvre la vie de notre esprit a semble t-il, une signification ultime: "la frayeur terrifiante de ne plus trouver de refuge dans nos fictions conscientes, source de notre liberté. Prendre le risque de mettre à jour la nature fictionnelle de nos propres représentations, ne revient-il pas à s'acheminer docilement vers une forme d'annihilation psychique et de suicide? ". Nietzsche écrivait dans La Naissance de la tragédie: "La connaissance tue l'action; pour agir, il faut être enveloppé du voile de l'illusion.[...] ce n'est pas la réflexion, non, c'est la connaissance vraie, la vue exacte de l'effroyable réalité qui l'emporte sur tous les motifs d'action [...]. A présent, aucune consolation n'agit plus, le désir s'élance au-delà d'un monde d'après la mort, au-delà des dieux eux-mêmes; ce qu'on nie, c'est l'existence elle-même et le brillant reflet qui en subsiste dans la personne des dieux ou dans l'immortalité de l'au-delà. Conscient de cette vérité une fois aperçue, l'homme ne voit plus partout que l'horreur ou l'absurdité de l'être [...].

    Alors, comment répondre à cette source profonde de neuro-résistance? Par la littérature et la culture dans lesquelles on peut trouver un univers des représentations du monde et de nous-mêmes. Ces représentations peuvent nous permettre de continuer avec nos fictions, tout en ne les prenant pas pour ce qu'elles ne sont pas: des paroles "absolument" exactes. Car dans ce cas, elles interdisent le jeu social et la liberté  de penser. Car si ce que je crois et pense est nécessairement exact, il n'y a pas de place pour d'autres idées, ni pour d'autres individus porteurs de pensées contradictoires. Je peux donc savoir que ce que je pense est à la fois fictionnel et vital pour moi, mais sans que cela remette en cause qui je suis et qui sont les autres, c'est à dire comment le désir de connaissance, qui peut effrayer par son pouvoir mortifère, peut aussi faire jaillir une source précieuse de liberté mentale et sociale. L'apologie de la connaissance peut-elle faire l'économie de cette lucidité sur les menaces qui l'accompagnent avec au bout de cette étape la possibilité de s'en affranchir? 
    3) Darwino-résistances.

    Il existe d'autres formes de résistance, des réactions protectionnistes au discours scientifique dont l'une des plus puissantes est la darwino-résistance. Là où les "neuro-résistances" étaient centrées sur la question de l'identité du sujet, la "darwino-résistance" vise l'origine et le sens profond du vivant ainsi que la signification de l'Univers dans son intégralité. Il est question des données de la biologie et particulièrement des développements de la théorie de l'évolution  naturelle des espèces, c'est à dire du darwinisme et du darwinisme contemporain. La révolution darwinienne, sans doute la plus déstabilisante ("Freud estimait que trois grandes blessures narcissiques avaient été successivement infligées à l'humanité, respectivement par Copernic, par Darwin et par lui-même"), postule que l'évolution des espèces vivantes n'est régie par nul plan visionnaire, par aucun projet téléologique, par aucune intention. Elle est explicable à la seule lumière des mécanismes de sélection qui guident, de façon aveugle et non supervisée, l'adaptation et les modifications des organismes vivants et des constituants innés du déterminisme génétique des individus. "Le hasard et la nécessité" (immortalisé par Jacques Monod), remplacent une vision multi-millénaire de gloses mystiques et théologiques. C'est le vivant et sa logique que le divin ignore et qui ignore le divin. Ce n'est pas l'histoire de l'onde dévastatrice des théories, qui sont géniales, de Lamark et Darwin et de cette construction intellectuelle (voir Gould), dont on va parler maintenant, mais des conceptions qui dominaient la plupart des esprit avant cette découverte. Elles étaient de nature créationniste et partageaient l'idée générale d'une création de l'Univers par un être intelligent. Les grandes religions monothéistes sont par essence (?créationnistes, c'est à dire qu'elles pensent le monde en se le représentant comme étant le fruit d'une création divine, d'un projet guidé par une intention signifiante et transcendante. On retiendra seulement ici que la clé de voûte de ces systèmes de croyance est que l'Univers a un sens, que ce sens soit accessible ou non à l'intelligence du croyant. L'Univers se voit attribuer une signification à travers sa création intentionnelle par Dieu. La découverte de Darwin a profondément modifié ou orienté ces modèles au prix de transformations souvent longues et douloureuses. Des révolutions conceptuelles ont permis aux Églises de se rapprocher de leur vocation véritable, proposer une lecture du sens de l'existence humaine, sans pour autant nourrir d'ambition scientifique ou historique. Il semble que cette conception (profondément ancrée dans le judaïsme talmudique) d'un discours religieux éthique et non scientifique soit approchée et partagée par de nombreux clergés dont le catholicisme romain. C'est ainsi que Vatican II a initié de nouveaux rapports entre la science et la théologie avec Jean XXIII et avec aussi la "trace" du futur Benoît XVI. Même si certains ont vu "un anti-esprit du Concile Vatican II", de nombreux ecclésiastiques ont défendu l'idée que la théologie n'a nulle vocation à contredire les théories scientifiquement établies, ni à se contorsionner pour chercher la moindre compatibilité entre leurs discours et celui de la science moderne. Jean-Paul II a rappelé en 1996, devant l'Académie pontificale des sciences, que "dans son encyclique « Humani Generis » (1950), mon prédécesseur Pie XII avait déjà affirmé qu'il n'y avait pas opposition entre l'évolution et la doctrine de la foi sur l'homme et sur sa vocation, à condition de ne pas perdre de vue quelques points fermes"; ainsi, "l'évolution est plus qu'une hypothèse". Cette évolution des idées semble également exister dans la théologie musulmane, par exemple dans L'Islam expliqué par Malek Cheleb. Ce dernier illustre l'émergence d'une pensée religieuse musulmane conciliée avec la modernité. Dans une interwiew le 9 fev 2007 par Henri Tincq dans le monde il déclarait: "L'islam n'a pas à avoir peur du darwinisme". Ainsi, Galilée aurait pu, s'il vivait encore, se réjouir en constatant le développement d'une certaine forme de sagesse religieuse aujourd'hui partagée par de nombreux clergés. 

    Alors que sont les darwino-résistances?

    Faisant suite au créationnisme déjà en vigueur à l'époque de Darwin, un puissant mouvement néo-créationniste, issu de cercles protestants fondamentalistes nord-américains explique que "certaines observations de l'Univers et du monde sont mieux expliquées par une cause intelligente que par des processus aléatoires tels que la sélection naturelle". Reprenant le bâton des ecclésiastiques du temps de Galilée, ils pensent détenir une théorie alternative qui rendrait compte des données empiriques sans violer une lecture soi-disant littérale de la Bible (la Terre a 5769 ans, les dinosaures étaient contemporains des humains etc). Les adeptes de ce courant de pensée le décrivent comme "Intelligent Design ou Dessein Intelligent". Certains sont réunis dans une think tank (groupe de réflexion, laboratoire d'idées...) dont le nom est un symbole: le Discovery Institute LA STRATÉGIE DE WEDGE (CENTRE POUR LE RENOUVELLEMENT DE LA SCIENCE ET DE LA CULTURE)ou encore en.pdf. Lionel Naccache explique que ce n'est pas par la recherche désintéressée d'une vérité qui resterait à découvrir et à penser que les adeptes sont mus, mais par une logique dont la violence consiste à inscrire la "vérité" à laquelle on croit déjà; c'est à dire sa "vérité", dans le langage d'un discours vierge de toute croyance. Fiction aveugle à elle-même qui redoute et déteste l'imaginaire! Et ce n'est sans doute pas un hasard si dans le Washington post du 3 août 2005, on voit G. W Bush mettre sur le même plan la théorie de l'évolution et le discours de l'Intelligent Design et prône son enseignement à l'école, au titre de l'ouverture culturelle. De même, dans USA Today du 21 août 2008, Sarah Palin, alors candidate au poste de la vice-présidence des USA, donc potentiellement présidentiable,  affirmait: "La théorie de l'Intelligent Design est plausible et crédible selon moi; et elle devrait être enseignée." 

    -Cette forme de "darwino-résistance" concerne déjà des millions de personnes et d'esprits. Le plan de propagande et de prosélytisme de ce courant, basé sur le modèle des stratégies marketing contemporaines est clairement exprimé dans la programme du Discovery Institute dont on trouvera un résumé ci-après:: 

    "Objectifs directeurs

    Vaincre le matérialisme scientifique et ses héritages destructeurs sur le plan moral, culturel et politique.

    Remplacer les explications matérialistes par la compréhension théiste que la nature et les êtres humains sont créés par Dieu.

    Objectifs sur 5 ans

    Voir la théorie du design intelligent comme une alternative acceptée dans le domaine des sciences et de la recherche scientifique dans la perspective de la théorie du design.

    Voir le début de l'influence de la théorie du design dans des domaines autres que les sciences naturelles.

    Voir grand les nouveaux débats en matière d’éducation, les problèmes de la vie, la responsabilité juridique et personnelle mis au premier plan des priorités nationales.

    Objectifs sur vingt ans

    Voir la théorie du design intelligent comme la perspective dominante de la science.

    Voir l'application de la théorie du design dans des domaines spécifiques, notamment la biologie moléculaire, la biochimie, la paléontologie, la physique et la cosmologie dans les sciences naturelles, la psychologie, l'éthique, la politique, la théologie et la philosophie dans les sciences humaines; voir son insinuation dans les beaux-arts.

    Voir la théorie du design imprégner notre vie religieuse, culturelle, morale et politique."

    Conclusion: La darwino-résistance, c'est une nouvelle forme "du danger de la connaissance que nous rencontrons ici. On peut voir à nouveau que la diffusion et la vulgarisation, même intelligente, d'idées scientifiques susceptibles de faire naître un sentiment de doute ou d'instabilité dans certaines croyances existentielles (ici religieuses), continue à rencontrer dans notre "société de la connaissance" certaines résistances mentales d'une ampleur socioculturelle qui peut être immense. Tous ces phénomènes rencontrés depuis les brûlures de la transparence jusqu'aux neuro-résistances partagent un point commun: ils ne semblent pas relever uniquement d'un simple défaut d'éducation ou d'accès à la connaissance, c'est à dire d'un "inachèvement" qu'on peut penser transitoire de la société de la connaissance. Cette société est-elle vraiment fidèle à l'image que l'on se plait à entretenir?


    4) L'information et la connaissance confondues. 

    https://fr.wikipedia.org/wiki/Quo_vadis_%3F_(roman) QUO VADIS?


         4-1) La connaissance et son malaise contemporain. 
    Nous avons, avec Lionel Naccache, débusqué sous notre "société de la connaissance" autoproclamée, une société de l'information qui se prend à rêver d'être ce qu'elle n'est pas (encore?). Les brûlures de la transparence et les motifs de résistance à la connaissance nous ont permis de vérifier la pertinence du modèle théorique (X,X',Y) [article 3: 3-1) "l'acte de connaître met en scène trois entités: -le sujet X tel qu'il existait et se représentait à lui-même avant de connaître l'objet Y -L'objet Y qui est le support de cet acte de connaissance. -Le sujet X' qui est le sujet ayant absorbé l'objet Y, c'est à dire le sujet ayant mis à jour ses représentations mentales à la lumière des nouvelles connaissances acquises"],  en actualisant les menaces existentielles que la connaissance continue à faire peser sur les fictions-interprétations-croyances que nous sommes. Pour résoudre ce paradoxe, on peut maintenant faire l'hypothèse que nous sommes portés à confondre la connaissance avec l'information, aux dépend du sujet: nous réduisons l'expérience de la connaissance (qui présuppose le sujet et sa transformation) au seul objet informationnel Y qui devient alors la support de cette expérience "subjective". La connaissance est alors réduite aux informations qui en sont l'objet et la transparence devient un objectif revendiqué, puis nécessaire, voir ultime. D'où la confusion entre société de la connaissance et société de l'information. Et cette confusion permet également de comprendre pourquoi nous ne faisons pas usage des "mauvaises solutions" des temps passés que nous avons évoquées dans l'article 2 au chapitre 2. Nous sommes obsédés par l'information et nous avons perdu la trace du sujet dans le schéma de la connaissance. Alors comment pourrions-nous nous inquiéter de ses brûlures et chercher à les prévenir? Mais ainsi que nous l'avons vu au chapitre 4 de l'article 4, les brûlures de la connaissance n'ont pas disparu, loin de là! Cela conduit à pouvoir saisir maintenant ce qui avait, dans ce même article, introduit le chapitre 2: Bienvenue dans la "société de la connaissance" (C'est ainsi que débute la troisième partie du livre de Lionel Naccache: MALAISE CONTEMPORAIN DANS LA CONNAISSANCE CHAPITRE PREMIER - Bienvenue dans la « société de la connaissance"). 

    En confondant connaissance et information, nous avons inventé une "mauvaise solution" contemporaine. Rappelons que la mauvaise solution au problème de la connaissance a été successivement le cloisonnement (social) dans l'antiquité, puis l'obscurantisme religieux au moyen-âge avant que la révolution des Lumières s'oppose à cet obscurantisme. On croyait avoir résolu ce problème avec la Société de la connaissance, mais nous venons de voir nous avons inventé "un malaise contemporain" dû à notre apologie béate de la connaissance, qui n'est en réalité que l'apologie de l'information, déguisée en connaissance. En fait, contrairement aux sociétés qui nous ont précédé qui s'en prenaient directement à la connaissance, nous procédons à son élimination pure et simple, en s'imaginant prendre sa défense. On peut clamer "Vive la connaissance", on a enterré la place du sujet en vouant ainsi un tel culte à l'information! La connaissance n'a jamais été aussi en danger que depuis qu'elle est célébrée à l'unisson pour ce qu'elle n'est pas. Cette confusion ne relève pas de la mauvaise foi et c'est en toute innocence que que nous imaginons parler de la connaissance alors que nous parlons en fait de l'information. 

    Cette notion de mauvaise solution n'est pas une vision paranoïaque ni une théorie du complot. Nous avons vu dans l'article 2 au chapitre 2, qu'à chaque époque, ces "mauvaises solutions", réactions de protection aux menaces de la connaissance "n'ont en fait pas été inventées par quelques individus qu'on pourrait qualifier de machiavéliques, capables d'imprimer des croyances à leurs civilisations, mais elles auraient plutôt émergé à partir d'un tissus socioculturel complexe. A chaque époque, nos prédécesseurs ont ainsi imaginé des barrières pour se protéger de l'expérience même de la connaissance". Ce sont des constructions culturelles et sociétales façonnées par l'histoire des civilisations et la "mauvaise solution contemporaine" serait le fruit de notre histoire récente. 
    Cette thèse de Lionel Naccache, que nous venons de voir, explique le pourquoi. Maintenant saurait-elle également expliquer le comment, c'est à dire les raisons pour lesquelles nous en serions arrivés à cette confusion? Serait-elle un accident de l'histoire de la pensée ou plutôt une étape prévisible, voire nécessaire et susceptible d'être dépassée? Quo Vadis? Vers où guider nos pas et avons-nous la possibilité de faire évoluer notre société de l'information vers une forme plus proche de ce que devrait être une authentique société de la connaissance? On peut identifier 4 facteurs qui ont pu favoriser cette assimilation de la connaissance à l'information et dont la victime est le sujet, qui vont être décrits ci-dessous.
         4-2 Premier facteur: Au commencement étaient les Lumières.L'âge des Lumières fut le point de départ de cette quête pour l'accès à l'information. Le combat principal se livrait sur le décloisonnement radical des objets de la connaissance. Il fallait briser les barrières jalouses du savoir et offrir tous ces trésors à chaque citoyen depuis le Louvre transformé en musée permanent jusqu'à l'Encyclopédie; là se situait le combat. Face à l'immensité de la tâche et aux menaces proférées à son encontre, aurait-il été bienvenu de freiner les efforts des encyclopédistes et de les sensibiliser au fait que l'accès au savoir ne réglerait pas tout et que la connaissance demeurerait intrinsèquement menaçante? Toutefois, on peut s'interroger: à refuser de prendre en compte ces menaces, les Lumières n'ont-elles pas contribué (sans doute indirectement et involontairement), à l'explosion des horreurs idéologiques des siècles qui ont suivi, siècles aveuglés par un scientisme social et politique dont on connait à présent les aboutissements? C'est bien une thèse similaire à celle de Bertrand Vergely dans "Obscures lumières" (voir mon article sur Bertrand Vergely, le prologue). L'activisme intellectuel des Lumières, qui proclamaient l'innocuité de la connaissance et invitaient les hommes à en faire un usage illimité et généralisé, était en fait, involontairement(?), porteur d'une menace bien plus forte que les anciens discours dominateurs qui, eux, dévalorisaient la connaissance. On peut ici invoquer l'image métaphorique de la connaissance comme celle d'une étroite passerelle en bois suspendue au-dessus d'un profond précipice, protégée par deux petites cordes latérales en guise de rambarde. Les anciennes "mauvaises solutions" qui précédaient l'âge des Lumières auraient été comme un panneau d'interdiction disant: "Passerelle interdite! Danger de mort! Par contre les Lumières auraient retiré les rambardes élargi la passerelle en route large et fréquentée et préconisé des injonctions positives: "Passage fortement recommandé, dépourvu de tout danger!"  Aux quelques rares accidents sur une passerelle peu fréquentée jusqu'alors, protégée et déconseillée par de nombreux avertissements, auraient succédé d'innombrables chutes et accidents dans ce lieu bien plus fréquenté et moins bien protégé. Certes, en luttant contre l'obscurantisme, les Lumières sont parvenues à chasser des esprits de leurs contemporains cette peur de connaître. Mais la connaissance implique les esprits et les croyances subjectives des acteurs, ce qui aurait dû suggérer que cette connaissance ne se résume pas aux objets du savoir. Il ne suffit pas d'écrire l'Encyclopédie et de s'assurer de sa diffusion pour être certain de la progression de la connaissance. On peut penser que, vu la profondeur intellectuelle du mouvement, il s'agit d'avantage d'un excès d'optimisme que d'un oubli de la prise ne compte de la subjectivité. La mise à disposition de la connaissance suffira devaient-ils estimer. Cependant, selon Tzvetan Todorov, des penseurs comme Rousseau et Montesquieu avaient conscience des conséquences sociopolitiques possibles des Lumières: "Le bien et la mal coulent de la même source" écrivait Rousseau. Et selon Todorov, Rousseau répétait inlassablement: "Pour rendre l'humanité meilleure, il ne suffit pas de répandre les Lumières".
    Cette dure quête de l'accès aux objets de la connaissance se poursuit depuis lors avec des objectifs de plus en plus difficiles à atteindre (dont la généralisation de la scolarisation et la lutte contre l'analphabétisme). Victor Hugo avait raison de dire "Celui qui ouvre une porte d'école ferme une prison", mais l'accès aux objets de la connaissance n'est pas en soi un rempart contre la barbarie et l'horreur comme le montre l'histoire et l'évolution de la société et du monde. Pendant la seconde moitié du XXè siècle, ce combat pour l'accès aux informations s'est accentué avec la construction d'une civilisation aménagée pour la diffusion, la circulation, l'échange de l'information. On a assisté à la naissance de tous les outils de mass média, l'informatique, les micro-ordinateurs, la mise au point des supports numériques, la naissance des réseaux informatiques, celle des autoroutes de l'information puis la révolution d'internet... Là encore, nous sommes happés par la maîtrise et l'amélioration des objets de la connaissance (de l'information), au détriment du sujet qui est en proie au vertige de la mise à jour de son système de fictions-interprétations-croyances. Aujourd'hui, il nous faut réparer le déséquilibre, et aux côtés de la quête de l'information, il nous faut reprendre là où nous l'avions abandonnée la quête du sujet, c'est à dire la prise en compte des mécanismes de transformation de notre subjectivité qui sont à l'oeuvre dans la connaissance.
    Ce sera sans doute une révolution plus délicate à conduire que la précédente, car il n'y a pas vraiment d'adversaire identifié comme l'était l'ancien régime, ni de recette connue, mais seulement une prise de conscience de ce qu'est l'essence véritable de la connaissance et ne pourra pas se limiter à la mise en pratique des paroles des Anciens dont nous avons relu les écrits et les récits. On devra la reconstruire sur l'ossature inédite de la société de l'information.
         4-3) Deuxième facteur: La technique efface le sujet.

    Nous avons vu (selon L. Naccache) que ce qui fonde la subjectivité du sujet; c'est le jeu de croyances, d'interprétations et de constructions fictives conscientes et qui le définissent comme un être à nul autre pareil. Le sujet est soumis à des forces dont certaines favorisent l'éclosion de notre subjectivité, comme la culture (qui nous aide à prendre conscience de la couche de subjectivité qui entoure chacune de nos pensées conscientes et de nos perceptions) et d'autres la font involuer (régresser). Pour Descartes, le sujet devient "Je pense donc je suis". Le "Je" est une fiction chantée par les écrivains. Kant, lui, sait que l'on existe dans une vie de phénomènes, mais que la vie des noumènes (ou de la chose en soi) existe, mais nous n'y avons accès que par l'intermédiaire de la couche de la vie phénoménale [La chose en soi  est un concept kantien signifiant la réalité telle qu'elle pourrait être pensée indépendamment de toute expérience possible. Le monde de la chose en soi est autre par rapport à celui du phénomène ; il est au-delà de toute connaissance sensibleBien que proche du noumène, la chose en soi n'est pas à confondre avec celui-ci.] Magritte le signalait sous une forme imagée: "ceci n'est pas une pipe". En effet, ce que je perçois comme une pipe est une représentation mentale de l'objet et on l'objet lui-même. Une représentation est un processus mental abstrait entaché de mes attentes, de mes reconstructions, de mes déformations, voire de mes fantasmes. Voilà le chemin vers la culture et aussi vers la tolérance lorsqu'on a conscience que les représentations ne sont pas le monde extérieur. Chacun a sa vision personnelle, différente de celle de l'autre, et la culture, c'est la conscience des représentations et de la subjectivité. Tout ce qui concourt à favoriser cette lucidité fait le jeu de la construction du sujet. 

    Par contre, la technique ne fait pas cela, elle est trompeuse. Elle permet la transformation du monde et nous hypnotise par sa puissance et son efficacité. Heiddeger en 1954, dans "la question de la technique" y voyait un mode de révélation qui dévoilerait l'essence même de la nature. Philo Blog explique: "Pour Martin Heidegger, l’avènement de la technique constitue le phénomène central des temps modernes. L’hégémonie de la technique sur le monde moderne représente à ses yeux l’ultime manifestation de cette idéologie (la métaphysique du sujet) qui depuis Descartes entendait faire de l’homme « le maître et le possesseur de la nature » (Discours de la méthode, 6 ° partie p 21 à 27)". Même si notre rapport à la technique est devenu familier car nous l'avons croyons-nous domestiquée, nous avons reçu en héritage ce rapport premier qui a gagné l'esprit de nos consciences collectives à travers des oeuvres comme Les Temps Modernes de Chaplin avec ses chaînes de montage diaboliques  ou le prophétique roman Métropolis le roman de Thea von Harbou dont est issu le film de Fritz Lang qui mettait en scène ces masses d'individus sacrifiés sur l'autel de Moloch, cette terrible et fascinante créature enfantée par la technique. C'est ainsi que L. Naccache a été poussé à analyser ce que ce rapport fondateur à la technique a imprimé à nos esprits afin de la "sommer à nous dire" ce qu'elle doit nous dire quant à la question de la subjectivité en se livrant à un exercice consistant à se sommer soi-même de se transformer le temps de l'exercice dans la peau et l'esprit d'un néo-heideggerien, victime provisoire du syndrome de Zelig (film de Woody Allen). Cette expérience de prise directe sur le réel (ici la technique, voir les pages 172 à 175 du livre)  court-circuite le sujet en effaçant ce qui le constitue comme être de croyances-interprétations-fictions. C'est une force de l'action directe sur le noumène, le réel au-delà de la connaissance sensible, qui renforce considérablement notre aveuglement à nos propres représentations en nous poussant à croire que nous sommes en prise directe avec les noumènes et qui détourne notre attention des phénomènes, la couche où se déroule notre existence. Arrachons-nous à cette vision où nous sommes happés par l'objet technique, construit par nos semblables et qui nous préexiste et un réel que nous imprimons grâce à la technique, qui accapare notre attention et sur lequel se joue notre existence. Regardons alors l'objet que nous voyons, puis fermons les yeux en l'imaginant. On peut alors faire connaissance avec notre fantaisie et notre imagination, et si c'est une fleur par exemple, avec notre capacité à le colorier et à le transformer en papillon ou un autre objet au gré de nos pensées. On peut ainsi commencer à sentir la force de notre vie mentale intérieure, de notre construction subjective du monde et de nous-mêmes. La technique nous pousse vers l'opposé en captivant notre attention sur la réalité extérieure (à ce que nous sommes), que nous percevons et transformons. Sa force d'attraction sans pareil ne nous laisse plus la liberté de fermer les yeux et de constater que "Je" existe encore, mais d'une autre manière. Elle rend le sujet négligent à ce qui précisément le constitue comme sujet singulier. Tout comme l'intense lumière du soleil nous aveugle nous aveugle et nous empêche de percevoir le rayonnement discret des étoiles du ciel, la puissance de la technique nous fait perdre conscience de ce qu'est une représentation, essence même de notre perception et de notre pensée. Elle nous absorbe et nous produit en nous une forme naïve, acculturée et pré-Kantiène. La puissance de la technique, dans le cas du barrage hydraulique cité par L. Naccaché, nous empêche de distinguer "ma" représentation de la centrale de celle des autres humains qui m'entourent et qui la contemplent avec moi. Nous ne croyons plus que nous vivons dans des univers de phénomènes, mais nous croyons vivre avec les noumènes. La technique accapare notre attention sur la transformation des objets XYY' et non plus sur le sujet XX'Y. 

         4-4)Troisième facteur: Le progrès scientifique efface le sujet.

    Malgré son humanisme et sa grande noblesse intellectuelle, lui aussi contribue à l'effacement du sujet du cadre de la connaissance. Cela se passe à travers un mécanisme en deux temps. D'abord, il faut reconnaître que les découvertes scientifiques ont été porteuses de révolutions culturelles et existentielles et de changements de paradigme au sens qu'en a donné Kuhn. Les conceptions du cosmos, du vivant, de l'homme en ont été révolutionnées et aujourd'hui, même le Vatican est à l'aise avec la conception héliocentrique du système solaire, ce qui témoigne du pouvoir de la science sur l'évolution des systèmes de fictions-interprétations-croyances des hommes. C'est en les contredisant et en les mettant à l'épreuve que les découvertes et le progrès scientifique nous aident à en prendre conscience et mieux les appréhender. Mais, associés à chaque découverte scientifique, il faut distinguer deux effets temporels successifs. 

    Dans un premier temps, celui de son annonce, la découverte met à l'épreuve nos certitudes et ébranle nos intuitions et nos convictions. Elle peut avoir d'importantes répercussions sur nos interprétations du monde et sur nos fictions conscientes. Ce temps est un temps humaniste, temps de réflexion qui aide le sujet que nous sommes à se transformer et à évoluer. 

    Le second temps, celui qui succède à l'assimilation de la découverte par les sociétés humaines, est bien plus long que le précédent. Les générations passent, la découverte a été parfaitement assimilée. Ces hommes et femmes sont toujours des humains en continuant à construire des leurs représentations fictives et leurs représentations du monde. Mais le champ qui entoure la découverte en question n'est plus investi par ces processus de fiction. La force de l'évidence scientifique, alors qu'il était dans le premier temps associé au phénomène que la découverte éclaire, assèche maintenant le potentiel de fictionnalisation. Si la question de la relation de la Terre au Soleil pouvait alimenter la réflexion et de riches fictions au XVIè siècle, quand des cosmologies fictives, des croyances religieuses ou des récits enflammés qui préexistaient à Galilée et à Képler; il n'en reste rien aujourd'hui. Nous ne pouvons quasiment plus déceler dans notre connaissance actuelle des traces de subjectivité ni une remise en cause de nos schémas de pensée. 

    C'est ce deuxième temps du progrès scientifique, celui qui suit le bouleversement du système de croyances, qui participe au processus d'effacement du sujet dans la relation ternaire que nous avons vu à plusieurs reprises: "l'acte de connaître met en scène trois entités: -le sujet X tel qu'il existait et se représentait à lui-même avant de connaître l'objet Y -L'objet Y qui est le support de cet acte de connaissance. -Le sujet X' qui est le sujet ayant absorbé l'objet Y, c'est à dire le sujet ayant mis à jour ses représentations mentales à la lumière des nouvelles connaissances acquises".  C'est un épiphénomène du progrès scientifique qui, en réalité, a des conséquences majeures. Dans ce deuxième temps, nous pouvons alors être conduits à assimiler; en toute sincérité, l'information à la connaissance. L'enrichissement extraordinaire des discours scientifiques au cours des deux derniers siècles a accéléré l'effacement du sujet et de sa subjectivité apparente du jeu de la connaissance. Sa part a fortement involué et devient très difficilement perceptible, ce qui favorise la généralisation abusive selon laquelle la connaissance se résumerait à un transfert d'information. Pourtant, peut-on imaginer que le sujet puisse s'absenter, qu'il puisse ne pas être présent, même tapi dans l'ombre, lors d'une expérience de connaissance? Cela ne conduirait-il pas à d'inextricables problèmes et erreurs en ne le prenant pas en compte dans notre conception de la connaissance? 

    Ce questionnement avait déjà été appréhendé de manière visionnaire par Husserl, le père de la phénoménologie, vers la fin de son existence en rédigeant ce manuscrit au texte incroyablement provocateur: La Terre ne se meut pasCe n'était pas un obscurantiste délirant puisqu'il écrivait: "Nous, coperniciens, nous sommes des hommes des temps modernes". Ce qui le turlupine, c'est que le projet d'une science physique et en réalité de "toute science objective" qui se passerait en dehors du sujet humain, celui qui, précisément, la pense. Dans ce texte souvent déroutant, Husserl se livre à différentes expériences de pensée et à imaginer des scénarios, dignes parfois d'un Jules Verne, scènes de mouvement relatif d'un observateur dans un wagon, identification d'un oiseau qui survole des paysages, imagination d'une vie humaine et animale sur la lune etc...Au crépuscule de son existence, le vieux juif, converti au protestantisme, fraîchement exclu par le régime nazi, ces lignes, qui ne seront publiées qu'à titre posthume, parlait-il de la manière de se représenter l'espace lorsqu'on a été chassé de l'espace dans lequel sa vie s'est écoulée, celui à partir duquel tout autre espace était imaginé, de son Pardès personnel auquel les molosses de l'obscurité des forces du mal lui avaient interdit l'accès? Quoi qu'il en soit, dans ce texte; Husserl s'échine à démontrer qu'il serait absurde de croire pouvoir penser la science en faisant abstraction de qui est au cœur de l'apodicité du sujet, c'est à dire en croyant échapper au socle fondamental sur lequel se construit toute possibilité de certitude et de signification pour un sujet. Robin guilloux nous confirme que dans le texte "La Terre ne se meut pas", "Husserl y montre que l'expérience que nous avons du mouvement et du repos des corps quelconques suppose une Terre absolument immobile par rapport à laquelle mouvement et repos peuvent prendre sens. Bien évidemment, cette terre ne doit pas être comprise comme une planète réelle que l'on pourrait observer à la manière d'une étoile. A partir de là, Husserl s'efforce de construire un concept de l'espace qui ne soit pas celui de la géométrie et des sciences de la nature, mais plutôt celui de cet espace dans et par lequel nous faisons l'expérience de notre propre corps, espace qui est au fondement phénoménologique de la spatialité des sciences physiques". Dans ce même blog on trouve le point de vue d'Etienne Klein: "Husserl n'y conteste nullement la valeur de vérité de la découverte de Copernic et Galillée : il demeure acquis que la Terre tourne autour du Soleil, qui lui-même tourne autour d'autre chose. Simplement, selon lui, la Terre n'est pas une planète comme une autre. Elle est le sol originaire et insubstituable de notre ancrage corporel : pour nous, elle n'est donc pas en mouvement. Selon Husserl, c'est l'oubli de cette relation primordial du corps au sol qui le soutient qui constitue la "faute originelle" de la modernité scientifique. Il montre que la distance théorique que nous prenons avec la Terre lorsque nous imaginons qu'elle est une planète comme une autre risque d'ébranler un enracinement premier. Par notre histoire et nos représentations, nous sommes fondamentalement des êtres géocentés. Notre pensée n'est pas une pensée hors sol"...

    Ainsi, oublier ce qui est à la source du sujet lorsqu'il élabore des significations paraît une grossière erreur à Husserl. N'est-on pas proche du système de fictions-interprétations-croyances dont il est question chez L. Naccache? Husserl a précisé ses critiques à l'égard du discours scientifique à travers une magnifique déconstruction de la genèse historique et philosophique du discours de la causalité physico-mathématique. Il met au jour ce qu'il appelle "l'énigme de la subjectivité" dont il ne lui semble plus possible de faire l'économie (on est en 1935). Aujourd'hui cette énigme ne nous a toujours pas livré tous ses secrets... La forme dominante du discours scientifique "dur" contribue " au processus d'effacement de la place des sujets humains dans la connaissance, alors qu'ils sont les créateurs et les destinataires de ce discours qu'on peut qualifier de merveilleux!

        4-5) Quatrième facteur: L'erreur de Pythagore.

    Selon Lionel Naccache, ce quatrième facteur, qui rappelle Antonio Damasio et son "erreur de Descartes" ou La conscience est née des émotions, lui, s'enracine dans un idéalisme mathématique dont on trouve la plus ancienne forme chez Pythagore. la vérité mathématique préexisterait à nos propres cogitations donc a priori à système de fictions-interprétations-croyances. Cette vérité mathématique serait immuable et parfaite et l'unique relation que nous puissions nouer avec elle serait celle de ses déchiffreurs afin de la rendre intelligible à nos esprits. Elle ne relèverait pas de la création, mais de la découverte par la formulation de la démonstration. Pour les pythagoriciens, la propriété bien connue du triangle rectangle n'est pas une production de notre propre esprit, car celui-ci n'a fait qu'atteindre une réalité qui existait hors de lui. L. Naccache continue longuement sur ce thème et estime que la pensée de nombreux grands mathématiciens ou physiciens théoriciens relève en partie de la conception pythagoricienne selon laquelle nous serions les lecteurs d'un ordre et d'une esthétique transcendantale existant en dehors de nous, ordre qui serait structuré par ses propres significations. idée par un sen et un projet. Pythagore lui-même, Pytha-Gore, n'est-il pas l'homme dont le destin avait été prédit par la Pythie? Descartes lui-même écrivait dans "Règles pour la direction de l'esprit", règle deuxième: "[...] "Mais comme nous avons dit plus haut que, par­mi les sciences faites, il n’existe que l’arithmétique et la géométrie qui soient entièrement exemptes de fausseté ou d’incertitude [...]". Cette conception des mathématiques et de la physique s'est généralisée aussi vers les sciences physiques et la biologie. La découverte des lois de la physique est conçue comme la mise au jour de phénomènes qui nous préexistent depuis Kepler, Galilée, Newton, Einstein... La gravitation n'est pas une invention ou une création (de notre esprit), mais une force de la nature que nous découvrons grâce à nos efforts de déchiffrage. On comprend donc que selon ce schéma de pensée, l'expérience de la connaissance mathématique et scientifique est envisagée comme une histoire d'information et non de subjectivité. Ce qui opère, c'est avant tout un transfert d'information réussi. La réaction du sujet (le bouleversement éventuel de son système de fictions-interprétations-croyances et son passage de l'état X à l'état X') n'est pas vraiment pertinente et surtout ne doit compromettre la qualité de l'information transmise. Cela revient à n'entretenir avec le partenaire sujet "S" qu'une relation "pédagogique" (on peut essayer de rendre les informations scientifiques plus facilement saisissables par "S"),  mais il est inutile de valoriser la fictionnalisation des "vérités mathématiques" telles "vivre et penser .avec le théorème de Pythagore"... Ainsi, selon la tradition pythagoricienne et ses développements contemporains, la connaissance est un mode de perception comme un autre, d'un donné qui est déjà là et qui existe en dehors du sujet qui cherche à le connaître. Cela concourt à désincarner encore davantage la connaissance et effacer le sujet. Connaître devient une histoire d'accès et de transfert d'information pour la techno-science contemporaine. 

    Remarquons cependant que la techno-science contemporaine ne nous contraint pas à adopter la conception pythagoricienne, qui tirent la couverture vers la beauté abstraite des mathématiques et de l'Univers, "en nous soufflant dans le creux de l'oreille de ne pas trop faire attention au sujet qui contemple ces beautés. Ce sujet, qui a bien de la chance de pouvoir assister au spectacle qui ne se joue pas pour lui, est un point d'observation insignifiant entre les deux infinis de Pascal. On peut ouvrir les yeux et reprendre les réflexions là où les pythagoriciens ont conduit. La vérité mathématique se laisse contempler et c'est cet objet de connaissance que nous percevons et son existence est la plus certaine des perceptions. Les sciences cognitives nous apprennent que percevoir, c'est déjà construire une représentation, et lui attribuer, malgré nous, des significations, des interprétations et des croyances. Pourquoi les mathématiques échapperaient à la règle? Il est fort probable que nos représentations théorème de Pythagore soient affectées par notre statut de sujet. Il a fallu en effet attendre le XIXè siècle pour que Riemann et Lobatchevski inventent de nouvelles géométries, non euclidiennes, qui la remettent en cause. Ce sont alors des pans entiers de nos "croyances mathématiques" qui tombent alors de leur piédestal. Pour les pythagoriciens, ce qui compte, ce sont les vérités mathématiques et non les croyances que nous avons établies à leur sujet, croyances souvent contaminées par notre ignorance. ("Nul n'a jamais dit que la géométrie euclidienne résumait toutes les géométries possibles!"). C'est vrai, mais la conséquences est que la connaissance des vérités mathématiques est une connaissance (presque) comme toutes les autres. Les sujets dont les mathématiciens) qui en font l'acquisition ne peuvent s'empêcher de se raconter des histoires à son sujet et... d'y croire. C'est souvent ce qui se passe pour les nouvelles "découvertes". Pensons à la poésie de Robert Desnos: "Une fourmi de 18 m de hautça n'existe pas? Et pourquoi pas?". Alors...une racine carrée d'un nombre négatif cça n'existe pas? Et pourquoi pas. C'est ainsi que naquirent les nombres imaginaires purs ou la théorie de la relativité (une masse qui varie selon la vitesse ça n'existe pas? Et pourquoi pas?). Et il en est ainsi de la théorie des cordes et autres modèles qui postulent l'existence de dimensions cachées de l'univers... 

    Il est évident que les croyances et l'imagination des mathématiciens et des scientifiques jouent un rôle majeur dans la manière de se représenter les objets de connaissance et dans la production des"découvertes". Mais ne s'agit-il pas de créations plutôt que de découvertes? En effet, ce que les mathématiciens et scientifiques découvrent n'est pas le "noumène mathématique", "physique" ou "biologique" lui-même, mais un modèle abstrait qui rend plus ou moins bien compte des manifestations des réalités, qui demeurent inconnues dans leur être propre (comme Kant pensait le noumène d'ailleurs). Si nous avions eu un accès direct et non phénoménal au théorème de Pythagore, il aurait dû être évident, dès l'antiquité, que ses conditions de validité sont limitées au plan euclidien, et que d'autres plans existent, ce qui n'a pas été le cas. Dans un autre domaine, newton n'a pas découvert la gravitation, il a formulé une théorie géniale de la gravitation, qui ne s'identifiait pas à l'essence de la gravitation. Einstein a formulé une nouvelle théorie qui rend mieux compte de certaines des propriétés de la gravitation. Cela n'est pas contesté par les scientifiques, mais nombre d'entre eux sont tout de même tentés de faire le "raccourci" en présentant les créations scientifiques comme des découvertes, c'est à dire les modèles et interprétations du réel comme la lecture directe et indiscutable du réel. Plus gênant, la société et le grand public conçoivent trop les scientifiques comme les porte-voix du réel plutôt que comme ceux qui en font l'exégèse et occultent la part du sujet dans l'élaboration de la connaissance. 

    Une interprétation alternative! Si le scientifiques peuvent assez aisément reconnaître et ainsi échapper à cette "erreur de Pythagore" les mathématiciens peuvent avoir beaucoup de mal. Au-delà de notre imagination, de nos raisonnements bayesiens et de notre irrépressible tendance à interpréter et à croire que nous manipulons dans nos esprits, nous avons tout de même accès à des sortes de "noumènes" disent-ils, ceux des mathématiques. "Quand nous énonçons avec Peano la structure des entiers naturels, nous parvenons à toucher du doigt de l'esprit un objet mathématique et pas seulement sa représentation. Ou plutôt, la représentation que nous en donnons est absolument fidèle à l'objet représenté....Pour eux, la preuve magistrale est dans la démonstration, qui est vraie ou fausse. Si elle est vraie, elle s'impose à tous les esprits, au de-delà de leurs civilisations, de leurs époques et de leurs systèmes de fictions-interprétations-croyances. On touche alors des vérités puisqu'elles sont partagées par tous et retrouvées par chacun! 

    En réalité,  dit l'interprétation alternative, plutôt que la découverte d'une réalité antérieure, universelle et formalisable, les mathématiques peuvent être envisagées comme la formulation explicite de notre capacité humaine à les penser ou, comme dirait Kant, les théorèmes, la logique et leur universalité pourrait n'être que l'énonciation des conditions nécessaires a priori de notre faculté à penser les concepts de nombres, d'espace ou d'ensemble.

    C'est une conception opposée opposée à la conception externalisante pythagoricienne des mathématiques, conception naïve, certes convaincante. Cette alternative est elle, une conception internalisante, qui se rapproche du reste de notre activité mentale: en créant un discours sur les mathématiques, nous créons un discours sur la possibilité de faire des mathématiques. Les vérités y sont contraintes par l'architecture de notre esprit et par notre aptitude à représenter l'univers et les concepts. L'invariance  de ces vérités refléterait en partie celle de notre esprit. Des travaux récents sur les fondements psychologiques et cérébraux de notre intuition numérique et géométrique permettent maintenant de poser les fondements d'une internalisation des mathématiques, comme ceux de Stanislas Dehaene (voir ses cours) et Elizabeth Spelke, et que leeurs travaux à propos des indiens mundurukus qui n'ont pas de mots pour compter au-delà de 5, mais qui appréhendent le plus souvent les quantités par estimation, une évaluation approximative de la numérosité. Ces travaux contribuent à décrire nos aptitudes innées à créer et manipuler des objets mathématiques en dévoilant nos intuitions universelles sur lesquelles se sont construits les formalismes mathématiques tous la forme de théories abstraites explicites. 

    Ainsi, même au cœur des mathématiques pures est tapi le sujet! Et rien n'impose de l'exclure, entendu comme système de fictions-interprétations-croyances de notre aventure techno-scientifique contemporaine. Encore faut-il, souligne L. Naccache, nous efforcer d'échapper à l'illusion à laquelle pythagore a succombé le premier. 

    Mais, à mon avis, que sait-on de le pensée profonde de Pythagore? Je suis persuadé que si on peut le dire de ses successeurs jusqu'à tous ceux qui comme l'explique L. Naccache, occultent le sujet, j'imagine que Pythagore avait une notion du sujet autrement profonde, surtout si comme l'a expliqué Albert Slosman (hommage) dans "la grande hypothèse" il a aussi été grand prêtre en Egypte à Dendérah.

     -->>article de mon blog: La grande hypothèse11 partie a) Ce que j'ai vu et compris    https://monblogdereflexions.blogspot.com/2011/04/la-grande-hypothese11-ce-que-jai-vu-et.html#.XQKwXLwzb4b


     5) Epilogue (ma lecture).

    C'est la confusion entre la connaissance et l'information qui est apparue finalement comme la source profonde du "malaise contemporain" dans lequel nous sommes plongés alors que les Lumières croyaient avoir libéré la connaissance. Les origines de cette confusion remontent pointent effet "vers le désir d'assurer la libre circulation de l'information dans une société qui, au sortir de la Renaissance, était encore aux prises avec les obscurantismes et le cloisonnement du savoir, puis bientôt avec les obstacles de la censure". Maintenant et de plus en plus, est-ce le résultat d'une science devenue pure objectivité, numérique et soumise à l'internet, mais nous avons fini par oublier nos classiques, c'est à dire que la connaissance repose sur l'infirmation certes, mais elle ne s'y résume pas. La connaissance est une histoire de sujets, de "Je" qui, en vivant cette expérience (de connaissance)  quotidiennement, courent le risque de réviser leurs systèmes de fictions-interprétations-croyances du monde et d'eux-mêmes. Le meilleur de cette aventure de la connaissance, c'est le décryptage et la compréhension de la réalité de cet Univers auquel nous participons comme sujets avec l'adéquation de notre singularité avec la réalité qui nous englobe. C'est la libération des nombreuses formes des discours aliénants qui on habité et habitent encore l'Histoire, c'est aussi et surtout la prise de conscience de ce que signifie un sujet, un "Je" qui est la possibilité de se frotter à l'énigme de la subjectivité. Les objets de ce discours, que nul relativisme n'habite, objets scientifiques, artistiques, sociaux... ne sont pas interchangeables et ils sont précieux. Le pire, évoqué dans mes article 123, que chantaient les mythes et les textes des temps anciens, "mort, folie, hérésie", nous guettent toujours. L'essence de ce "poison vital" qu'est la connaissance peut être identifiée comme une confidence adressée aux sujet que nous sommes, les "Je" qui sont eu-mêmes les produits des systèmes de fictions-interprétations-croyances qui nous habitent ("Je" est une fiction, je suis une fiction). Survire ou périr, tel serait l'enjeu vital ou mortifère de cette singulière expérience? 

    Un défi humaniste? Pour répondre à ces risques existentiels terrifiants, passés et présents, on peut continuer à être une fiction, mais une fiction lucide, qui comprend sa richesse et qui ne se prend plus pour quelque chose qu'elle n'est pas et qu'elle ne peut pas être. Ce serait accéder à la seule liberté qui est à sa portée et qui au fond, puise dans le rire de soi la possibilité de persévérer dans l'existence. Le "Je suis une fiction" ne se prendrait plus pour un caillou dont il est possible d'exprimer l'existence en termes de masse, de volume et de position. "Je" n'est pas un caillou, mais une fiction alimentée par l'expérience. Faire de notre vie le récit du sens, ou celui du néanttel est l'enjeu de la connaissance et aussi celui de la visite dans le Pardes que nous avons croisé dans mon article 1 au chapitre 2-2, la visite que chacun d'entre-nous devrait être libre et capable  de faire dans le paradis de la connaissance, ce que nous recommande L. Naccache: connaître et prendre le risque  de disparaître en faisant connaissance avec soi. On pourrait tenter de fuir cette épreuve redoutable et libératrice. Mais serait-ce réellement vivre que de vivre sans essayer de connaître? C'est ce dont parlent les tribulations mythiques des personnages du Néant der Tale dans la dernier partie du livre de L. Naccache pages 199 à 234.

    Une bifurcation? Le malaise contemporain que nous vivons aujourd'hui est un moment crucial et inédit de notre relation à la connaissance. C'est un moment instable mais déterminant où tout n'est donc pas déterminé où nous n'avons pas encore perdu connaissance. Nous maîtrisons comme personne avant nous les outils de l'information; nous éprouvons, de même comme personne avant nous les brûlures de la connaissance, d'autant plus que nous n'avons pas cherché à nous en protéger malgré les avertissements. C'est ainsi que nous sommes arrivés à une bifurcation jamais encore rencontrée et nous devons faire un choix.

         -1) Nous pouvons résister à la connaissance, c'est à dire avancer sur la voie de la construction individuelle et collective de remparts à la connaissance et choisir d'utiliser ces outils de la société de la connaissance que nous avons su inventer pour construire l'enfer de la pensée sur Terre par exemple en choisissant des fondamentalismes et un culte de l'information vide de sujets, qui enterrerait notre subjectivité et l'espoir d'une connaissance lucide.Ce serait une "régression prékantienne" d'où sortirait intolérance et violence ou une normalisation de croyances délétère qui supprimerait aussi le sujet.

         -2) Nous pouvons au contraire tourner la tête vers un autre côté de la bifurcation. Ce sera nous lancer dans un autre sentier, inconnu et que L. Naccache nous dit prometteur. Serait-ce de transformer notre société de l'information actuelle, qui se dit, à tort, être une société de la connaissance? Ce serait peut-être faire advenir le rêve de ce qui n'est aujourd'hui qu'une construction onirique et faire le choix de la lucidité, de la liberté et du courage? Ce serait s'avancer vers ce qui pourrait aboutir à un néo-humanisme. L. Naccaché nous fournit des pistes de réflexion l'enseignement des grands principes des "neurosciences de la subjectivité"...et apprendre à connaître la "machine à fictions"  que nous sommes. 

    Cependant, un problème subsiste, une minorité d'hommes et de femmes ont la possibilité de choisir cette aventure de la connaissance de la connaissance, donc de la connaissance de soi, minorité qui est demeurée très longtemps une collectivité quasi-exclusivement masculine! Aujourd'hui, bien plus d'individus, de tous sexes, ont accès aux outils de la connaissance, mais on a vu que bien peu ont accès à la connaissance de la connaissance, de la connaissance de soi, car l'objet de la connaissance,objectif de plus en plus quasi-exclusif  occulte dangereusement le sujet (de cette connaissance). Cela semble ainsi ne pas avoir modifié fondamentalement le cours des choses où, travers l'Histoire, cela n'a été toujours qu'une proportion d'individus restreints qui ont eu la possibilité de répondre à cet appel de ce qui fait sens, à cette convocation de la connaissance. C'étaient ceux qui avaient accès aux outils de la connaissance, qui avaient initiés à ses codes, ses langages, ses mémoires écrites et qui pouvaient en conséquence accéder à la culture. Il y a eu celles et ceux qui ont eu la possibilité de vivre une expérience fondatrice d'une relation maître-disciple, qui marque souvent la naissance du sujet à la connaissance, qui ne vivaient pas  sous le joug de sociétés qui diabolisaient les prétendus "excès de la connaissance" ou dans un univers censuré, exemptes de certaines sources importantes su savoir. Et encore dans notre univers de l'information, il y a celles et ceux qui ne portent d'œillères trop serrées, familiales, religieuses et plus récemment idéologiques...Toute cette histoire et ces exemples rappelés par L. Naccache, montrent "ce jeu de contraintes ne se résume pas à une problématique de classe sociale ou socio-culturelle.

    Chaque époque est certes libre de choisir ses combats et ses engagements, les utopies qu'elle choisira de transformer en réalité mais il semble que la notre est peut maintenant accéder à une véritable société de la connaissance à condition de ne pas sombrer avant dans le chaos ou le néant. Pour cela, il faut avoir la lucidité de ne pas confondre la fin avec le moyen, l'outil (l'information) avec la connaissance. C'est la promesse, non d''un bonheur certain et aseptisé, d'un meilleur des mondes (que le monde actuel est quasiment devenu?), mais celle de la possibilité, réelle et librement consentie, de vivre les risques et les merveilles de la connaissance. La connaissance pour tous? Non, plutôt pour chacune et chacun! Enfin sortir de la caverne? 

    https://www.institut-pandore.com/philosophie/caverne-platon/

    La caverne étape 3 accès à la connaissance

     

    https://www.revue3emillenaire.com/component/k2/item/260-connaissance-de-soi.html

     

     

    liens:

    Perdons-nous connaissance? société de la connaissance

    http://www.admiroutes.asso.fr/larevue/2011/115/IMQ.pdf: Miora Mugur Schächter L’Infra mécanique quantique et examen critique du théorème de non localité de Bell

    position de l'Église catholique sur la théorie de l'évolution 
    https://gminallejournal.jimdo.com/%C3%A9volution-1/la-fin-du-n%C3%A9odarwinisme/dualismeLA FIN DU NÉODARWINISME UNE OPPORTUNITÉ POUR DÉPASSER DIALECTIQUEMENT LA CONTRADICTION GÉNÉTIQUE DARWINISME

    http://menace-theoriste.fr/4741-2/

     

    https://www.lepoint.fr/chroniques/et-si-darwin-s-etait-trompe-12-12-2011-1406407_2.php: Et si Darwin s'était trompé...Avec "Dépasser Darwin" (Plon), le grand chercheur Didier Raoult remet en question nos certitudes sur l'évolution. Entretien.

    https://www.huffingtonpost.fr/bobby-azarian/neurosciences-la-nouvelle-theorie-de-la-conscience-est-empreinte-de-spiritualite_b_8212678.htmlNeurosciences: la nouvelle théorie de la conscience est empreinte de spiritualitéSCIENCE - Il semblerait que nous entrions dans une période inédite de l'histoire de l'Homme et de la science:  une époque où mesures empiriques et raisonnements déductifs peuvent nous fournir des informations d'ordre spirituel.

    https://www.marcluyckx.be/accueilfr"Le changement de civilisation que nous sommes en train de vivre est rapide et profond, car la rationalité moderne, l’approche patriarcale, et le capitalisme industriel ne sont plus capables de formuler une réponse satisfaisante ni au problème de notre survie collective et de celle de l’environnement, ni aux problèmes sociaux et démographiques de notre monde en ce début de xxie siècle." ses articles: https://www.marcluyckx.be/articles-zbilb

    https://www.lateledelilou.com/jocelinmorisson/Internet-peut-il-etre-conscient-Ou-le-materialisme-jusqu-a-l-absurde_a9.html: Internet peut-il être conscient ? Ou le matérialisme jusqu’à l’absurde. Une récente théorie de la conscience retient l’attention parmi les neuroscientifiques. Elle est due à deux grandes figures des neurosciences et s’appelle la Théorie de l’Information Intégrée (TII). Né en Italie, Giulio Tononi est psychiatre et neuroscientifique à l’Université du Wisconsin, et Christof Koch est un neuroscientifique

    http://emag.eps-ville-evrard.fr/n2/point-de-vue/dr-gabrielle-arena/internet-espace-d-opacite-ou-de-transparence/Internet espace d'opacité ou de transparence ?

    http://www.europesolidaire.eu/article.php?article_id=1206: Notre identité propre - Un sujet en soi Les neurosciences, le Talmud et la subjectivité par Lionel Naccache

    Jean Staune, à propos de la tentation de l'homme dieu de Bertrand Vergely

    http://guykarl.canalblog.com/archives/2019/05/07/37317422.html#utm_medium=email&utm_source=notification&utm_campaign=guykarlLa prison du langage, sujet-objet

    http://pierrecassounogues.com/: professeur au département de philosophie à l’université Paris 8 Vincennes-Saint-Denis, mon travail concerne les relations entre Imaginaire et Raison, et le problème d’une expression philosophique, qui utilise la fiction pour fonder une perspective spéculative et se donner les moyens d’une critique du contemporain. Dans un livre à venir, syndromes technologiques, j’analyse la façon dont les technologies contemporaines transforment la subjectivité et ce que l’on peut appeler la sphère intérieure, l’expérience en première personne: ce que c’est que d’éprouver quelque chose. Mes publications.

    http://www.philipmaulion.com/2018/09/qu-est-ce-que-la-realite-et-le-progres-scientifique.html: Qu’est-ce que la réalité et le progrès scientifique ?

    https://www.futura-sciences.com/sciences/videos/monde-il-ecrit-langage-mathematique-6338/#xtor=EPR-55-%5BVIDEO%5D-20190605-%5BVIDEO-Le-monde-est-il-ecrit-en-langage-mathematique--%5D: La nature est un livre écrit en langage mathématique, dont les lettres sont des triangles, des cercles et d'autres figures géométriques, selon Galilée. Certes pratiques et efficaces pour expliquer les phénomènes, les maths ne sont cependant pas toutes puissantes.

     

     

     

     

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  • Qui suis-je?

     

     

     

     



    Ma peinture huile: le village de mon enfance: 

     

     

    la dordogne

     

     

     

    châteaux - Jumilhac

     

              Je me suis bien remis d'un AVC, qui aurait pu me terrasser en 2009, mais ma vie en a été complètement bouleversée. Les cardiologues pensent que mon cerveau s'est en partie reconstruit, car je n'ai que des séquelles apparemment mineures. Par contre, je me suis découvert un goût pour la peinture que je ne me connaissais pas. Je pense que c'est un "éveil" du cerveau droit, plus porté sur l'art. Auparavant, le cerveau gauche était sans doute dominant par la logique, le logos, le calcul et tout ce qui fait la science. Cette découverte de l'art me rassure, j'ai peut-être un meilleur équilibre entre l'intuition, la partie féminine de l'être et le raisonnement, le calcul, le formalisme de la raison logique.

    Le résultat, je le vois dans ces deux tableaux du village de mon enfance, Jumilhac le Grand en Périgord que je reproduis ici. Leur valeur artistique est certainement faible, mais pour moi, ils ont une valeur "spirituelle" et traduisent une manifestation de l'esprit" qui m'anime.   

     

               Quand j'y repense, je crois qu'à Jumilhac j'avais déjà ce goût dans mon enfance. J'avais reçu en cadeau d'anniversaire le livre "les merveilles de la nature", livre magnifique s'il en est. Je l'ai gardé toute ma vie. C'est là que j'ai eu une fascination pour ces merveilles qui constituent l'essence et le titre de mon blog. Je ne me lassais pas des images d'astronomie, comme celle d'une éclipse de soleil, de paléontologie avec les dinosaures,  des plantes, d'animaux...  

    J'y ai appris les notions  qui m'ont permis d'approcher la science. Mais je dessinais et coloriais ces images, je faisais des "cartes postales de paysages de neige... J'ai conservé le goût de la science, mais, avec l'âge, j'étais insatisfait par les dessins. Je croyais ne pas être "à la hauteur" et je m'en suis lassé, jusqu'à... mon AVC.

     


     

     

     

    Le château de Jumilhac

     

     

    Et là, dans ce petit village, je regardais les saisons, les nuages, l'Isle et ses rives, les oiseaux, en bref, la nature. Au printemps: les fleurs, en été: la moisson avec les premières batteuses des années 1950 et les orages, en automne: les tapis de feuilles mortes, en hiver: la neige et les dessins de cartes postales...

     

     

     

    Présentation de Jumilhac et d'abord le château.

    présentation du château: le meilleur du Périgord 

     

    Tout comme Saint-Yrieix à 12 kilomètres, le Château de Jumilhac formait, aux marches du Limousin et du Périgord, une ligne de défense lors des incursions sarrasines, wisigothesnormandes et anglaises (1190), sans oublier la Guerre de Cent Ans. Maintes fois reconstruit et agrandi, il fut remanié à la Renaissance et couvert (1600) de ces toitures qui font aujourd'hui sa réputation. Ces cônes, poivrières et pyramides, ornés de faîtières aux allégories seigneuriales et alchimiques, sont uniques en France et font de Jumilhac la "Perle Noire" du Haut Périgord.

    Au XVIIème, les murs d'enceinte, les tours carrées de défense avancée et les dépendances furent transformés avec faste en corps de logis et de réception, donnant à la demeure des Marquis de Jumilhac (1655), splendeur et magnificence. Grand salon lambrissé, parqueté à la Versailles et animé de scènes de chasse, escalier d'apparat Louis XIII, salle à manger aux rosaces en pisée, cuisine aux cuivres en batterie, jardins thématiques en terrasse, (or et alchimie)... contrastent avec l'atmosphère austère de la Chambre de la Fileuse, Louise de Hautefort, incarcérée pendant 30 ans dans le donjon féodal.

     

    Extrait de  titelive.centerblog.net

    "Le château (XIII-XVIIème siècle), classé monument historique, est l’âme du village car il fut protégé de la Révolution par les habitants du bourg. Uniques en France, ses toitures féeriques ornées de faîtières aux allégories seigneuriales et alchimiques inspirèrent le graveur Gustave Doré qui les qualifia comme étant   « les plus romantiques de France ».

     Dressé sur un éperon rocheux il domine la haute vallée de l’Isle. Nous vous invitons à venir découvrir ses salles aux boiseries et meubles d’époque, ses toiles peintes (scènes de chasse…), sa fameuse batterie de cuisine en cuivre, sa légende de « la fileuse » et à vous délasser en visitant ses jardins en terrasse rénovés sur des thèmes liés à l’histoire du château : l’Or et l’alchimie.
     C’est aussi un des lieux de tournage du film « Le Pacte des Loups » de Christophe GANS sorti en janvier 2001 qui retrace la légende de la bête du Gévaudan. "

     

    A propos de l'orpaillage

    L'Isle est un affluent aurifère réputé de la Dordogne. Cette rivière modeste draine le secteur minier de St Yriex la Perche en Limousin, parcourant les départements de la Haute Vienne et de la Dordogne près de riches aurières exploitées dès l'époque gauloise par des mineurs fort habiles, il y a 2500 ans. De nombreux cours d'eau du Limousin charrient eux aussi des paillettes d'or

    Dans le département de la Dordogne, entre Coulaures et le lieu-dit Vauriac, aux toponymes évocateurs, avant de confluer avec la Loue, elle même aurifère, l'Isle dépose des placers d'alluvions à l'intérieur des courbes de son cours. Il faut aussi évoquer le site du Bourneix, maintenant épuisé.

     

     

     

    Les gens racontaient dans mon enfance l'histoire de la princesse de Jumilhac que son seigneur avait enfermé, prisonnière dans un chambre du château durant pratiquement toute sa vie, par jalousie. On  dit qu'elle l'avait trompé! C'est l'histoire de "la fileuse" qui nous faisait peur.

     

    Et, en allant à l'école, je passais tous les jours devant la maison où Eugène le Roy.   était percepteur entre 1872 et 1873:

    Eugène Le Roy (périgourdin célèbre), est le fils d'un couple de domestiques du baron Ange Hyacinthe Maxence, baron de Damas, ancien ministre, propriétaire du château d'Hautefort. Leur emploi force ses parents à le placer en nourrice chez une paysanne des environs. Ses souvenirs d'enfance marqueront fortement son œuvre future, dans laquelle abondent les enfants abandonnés, comme dans beaucoup d'autres romans contemporains. 

    Le hasard des nominations dans l'administration des Contributions a amené Eugène Le Roy à Jumilhac-le-Grand, où il a séjourné et exercé ses fonctions entre 1872 et 1873. Il a habité une fort belle maison, au coin de la place du Château, maison qu'on peut toujours voir, et sur laquelle fut apposée une plaque commémorative lors de la Félibrée de 1933. C'est à Jumilhac que notre percepteur rencontra celle qui deviendra son épouse : la postière de la commune, descendante d'une vieille famille locale, les Peyronnet. Outre cet événement heureux, on peut penser, sans grande audace, que c'est aussi sur place qu'il trouva une partie de l'inspiration de son premier roman, Le Moulin du Frau 1.

    Mais on le connait plus pour son roman Jacquou le croquant dont a été tiré un film qui a eu beaucoup de succès succès. Mais j'ai été un peu déçu et je ne m'y suis pas retrouvé par rapport à mon ressenti depuis mon enfance.

     

     

     

     

    Le Roman : « Jacquou le Croquant » raconte l'histoire d'un enfant imaginé par Eugène Le Roy et basée sur des faits et des lieux réels. Publié en 1899, l'action se passe en 1830 dans la forêt Barade et décrit la lutte d'un jeune paysan en révolte contre la misère due à l'oppression du seigneur de l'Herm : le comte de Nansac.

    Commencé en mars 1896, le roman est achevé en mai 1897et publié en 1899. C'est un récit sur la forêt Barade mais il évoluera peu à peu vers la révolte d'un petit paysan orphelin contre les nobles qui accaparent toutes les richesses.
     L' Histoire : L'histoire commence en 1815 (Napoléon 1er est alors exilé à Ste Hélène), à Combenègre, pauvre métairie dépendant des terres de l'Herm, où les Ferral sont métayers du comte de Nansac. Suite au meurtre de Laborie, régisseur du château, Martissou, son père, est condamné aux galères où il meurt peu après.
    Marie, obligée de quitter Combenègre se réfugie dans une masure à Bars, où minée par les trajets et le peu de travail trouvé, meurt à son tour.
    Jacquou est seul au monde, orphelin; il a 9 ans. Désormais seul au monde, il s'en va par les chemins glaner un peu de travail çà ou là ; affamé le plus souvent, dormant dans les fossés, il échoue à Fanlac et s'endort au pied du vieux puits sur la place, épuisé. [ Parcours de Jacquou ]
    Le curé du village, Bonal, le recueille et entreprend son éducation ; peu à peu Jacquou se remet mais il n'oubliera jamais l'injustice qui ont fait mourir ses parents. A la mort du bon curé Bonal, Jacquou qui fréquente Lina, prend le métier de charbonnier avec son ami Jean, il braconne aussi quelque fois dans les bois du comte. Un soir il se fait prendre par les gardes du comte qui l'enferment dans les oubliettes du château ; ne voyant plus son ami et le croyant mort, Lina se jette dans le Gour (gouffre prés de Thenon) ; pendant ce temps le chevalier de Galibert, ami de Bonal, délivre Jacquou en menaçant le comte de représailles avec la justice. Jacquou est libéré mais, en apprenant la mort de sa belle, il rassemble autour de lui tous ceux qui ont eu à se plaindre du comte, et Dieu sait s'ils sont nombreux ; un soir ils incendient le château : Nansac est ruiné, Jacquou jugé et libéré. Il revient à l'Herm où il se marie et reprend son métier tranquille de paysan.
    (Plus de détails sur Jacquou dans le blog "diogene.ch")

     

    Jumilhac le bourg, vue sur la descente qui mène "aux Croix Bancaud", à la maison de mon enfance.

     

    La rue des Croix Bancaud, la maison de Louis et Marie, nos voisins, devenue chambre d'hôtes.

    le gite de "la Croix bancaud"

     

    Jumilhac le château illuminé.

     

     

     

    le château: salon

     

     

    Le château: la chambre de la fileuse

     

     

    Face au chateau en venant de la mairie

     

    Jumilhac les bords de l'Isle

    C'est la vue que j'avais à 100 mètres de chez moi. On racontait qu'à l'intérieur du château il y avait des oubliettes dans lesquelles les prisonniers  étaient jetés. Ils y passaient le restant de leur courte vie. Avec les copains, on en frémissait d'horreur.

    (comme on l'aurait avec cette "lettre de cachet" ou les lettres de cachet et les centres fermés ou la lettre à Monsieur le Comte de Jumilhac)

     

     

     

    le château en 1900

     

    Jumilhac 1900:

     

     

    jumilhac 1900: la descente vers l'Ile (la rivière) et ma maison

    La descente n'a pratiquement pas changé. L'urbanisation n'y a pas eu de prise. Je retrouve une nature "sauvage", celle des "merveilles de la nature" . Tout en bas, se trouve l'Isle (l'Isle), qui a bercé mon enfance. C'est là que j'allais pêcher les gardèches et les goujons. Mon oncle ramenait même des écrevisses. Je devais rentrer pour manger au "coup de sifflet" de mon père. Que de souvenirs (je devrais les écrire?). Par contre, la rivière a depuis lors, été "empoisonné par la pollution. Il y a les mines d'or de Saint-Yrieix, où le mercure a été utilisé, d'après ce que j'ai su depuis. j'ai aussi découvert depuis les mines d'or du limousin  Maintenant, l'Isle est quasiment une rivière morte.  

     

     

     

    Jumilhac les bords de l'Isle près de chez moi (mon lieu de pêche)

    Je regarde avec nostalgie merveilleuses photos de l'Isle qui me rappellent mes 10 ans .

     

     

    L'Isle en amont de Jumilhac

     

     

    jumilhac 1900: l'avenue du château

     

     

     

    Jumilhac 1900, la place  (elle était vivante, avec les paysans, sans touristes, comme dans mon enfance.

     

     

     

    Jumilhac, le château en 1900.

    Comparez la vue actuelle et ma peinture avec cette photo!

     

     

     

     

     

     

     

    jumilhac 1900: la mairie n'existait pas encore.

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  • article 4) Perdons-nous connaissance?  

    Ma lecture du livre Perdons-nous connaissance? de Lionel Naccache:

     

    troisième partie chapitres 1 et 2

    bienvenue dans la « société de la connaissance


    https://www.agoravox.tv/actualites/societe/article/comment-passer-de-l-information-a-24993

    "L’ouvrage passionnant de Lionel Naccache pourrait bien atteindre son objectif et devenir le "manifeste de la connaissance" du 21ème siècle. Un siècle où il va falloir réveiller un peu ces neurones qui se laissent bercer par la houle de l’information. Pour bâtir la société de la connaissance, il va falloir se jeter à l’eau. Ce qui revient à apprendre à nager. Et même plus. Cette eau doit nous pénétrer et nous transformer. A chaque nouvelle connaissance, nous ne sommes plus les mêmes. De quoi frémir de plaisir mais aussi de crainte".

     

     

     

    http://www.centrebethanie.org/2016/09/l-arbre-de-la-connaissance.html

     

     

    J'écris mon blog pour partager ma soif de connaissances, mes réflexions et mes passions et mes lectures. Dans ces articles, je voudrais partager "ma lecture" du livre de Lionel Naccache  "Perdons-nous connaissance?". Ecrire ce que je retiens de mes lectures me permet de réfléchir à la compréhension que j'en ai. je mets entre guillemets les passages qui me semblent importants ou qui me frappent. Et par dessus tout je fais des recherches sur internet pour compléter ma lecture avec le maximum de liens que je souhaite responsables, qui permettent aux lecteurs d'approfondir la connaissance du sujet.   

     

     Je livre ici "ma lecture" du livre Perdons-nous connaissance? de Lionel Naccache: c'est-à-dire perdons-nous le sens de ce qu'est la connaissance (philosophie) alors que nous nous autoproclamons " société de la connaissance "? Aujourd'hui, la connaissance ne fait plus peur à personne, alors que depuis trois mille ans notre culture occidentale n'a cessé de la décrire comme vitale et dangereuse. Oui, dangereuse, qui s'en sou-vient encore? Cette rupture avec notre héritage constitue-t-elle un progrès ou une régression, une chute ou une ascension? La Mythologie et la Neurologie, sources de "connaissance de la connaissance", nous offriront de précieuses clés pour résoudre ce paradoxe inédit dans l'histoire de la pensée". 

    1) Préambule: Pourquoi cette question "Perdons-nos connaissance?" alors que nous avons cette merveilleuse faculté qui nous semble aller de soi, la capacité de connaître ce que nous ne connaissions pas encore à l'instant qui précédait. Notre société s'autoproclame en effet "société de la connaissance" comme elle ne l'avait jamais fait auparavant. Et pourtant, depuis les origines de notre culture, la connaissance est représentée comme un danger, un "poison vital". Elle serait porteuse d'un certain danger existentiel qui a imprégné notre culture depuis plus de 3 000 ans jusqu'à l'époque moderne avec le siècle des Lumières que Bertrand Vergely a appelées "obscures Lumières", et dont j'ai présenté ma lecture dans l'article de mon blog. Ce danger multi-millénaire s'est exprimé dans trois grands mythes qui ont façonné notre civilisation. 

    Un rapide résumé de mes précédents articles:

    Dans l'article 1, nous avons vu: Chapitre 11-1) Adam et Ève face à l'arbre de la connaissance. 1-2) Le tragique destin d'Icare1-3) L'allégorie de la caverne de Platon. 1-4) La figure de Faust.

    Chapitre 2: 2-1) La connaissance menace Athènes l'éternelle2-1-1) I comme Icareretenons que Icare vient de nous enseigner que connaître sans limites est une démesure  condamnable et dangereuse. Cette menace ainsi stigmatisée semble engager l'individu dans son rapport personnel et solitaire avec la connaissance. 2-1-2) L'homme qui en savait trop. Pour Platon et Socrate, l'homme de connaissance serait l'inévitable victime de la violence du groupe qui l'entoure. Icare nous montrait les risques du rapport de l'individu face à la connaissance. Ici, Platon nous indique que l'homme qui connaît est également vécu comme une menace par ses congénères et que cette menace conduit à la disparition inéluctable de celui qui connaît, incapable de transmettre son savoir. Cela conduit à la préservation de l'ignorance, le fondement et la garantie de d'une certaine forme de paix ou de confort social. 

    2-2) La connaissance menace Jérusalem: 2-2-1) Du paradis perdu au Pardes retrouvé. Le Pardès (Kabbale) "est un lieu où l'étudiant de la Torah peut atteindre un état de béatitude. Ce terme est tiré d'une anecdote philosophique et mystique qui trouve une explication dans le Pardes Rimonim du Rav Moshe Cordovero. Celui-ci prend l'image de quatre rabbis (Elisha ben Abouya, [Rabbi] Shimon ben Azzaï, [Rabbi] Shimon ben Zoma et rabbi Akiva) pénétrant un verger mais dont les "niveaux" respectifs de pénétration du sens des Écritures ne sont pas équivalent. 2-2-2) Vie et destin de quatre talmudistes en quête de connaissance 2-2-3) Vie et destin de quatre talmudistes en quête de connaissance suite: le cas de rabbi Akiva -La connaissance? Une vraie boucherie! ConclusionA ses amis qui lui recommandaient de de se protéger et de suspendre l'enseignement de ses connaissances à la jeunesse de Jérusalem, Rabbi Avika répondait par une parabole: "Un renard, voyant un poisson se débattre pour échapper aux filets des pêcheurs, lui dit "Poisson, mon ami, ne viendrais-tu pas vivre avec moi sur la terre ferme?" Le poisson lui répond: "Renard, on te dit le plus sage, mais en réalité, tu es le sot des animaux. Si vivre dans l'eau qui est mon élément m'est difficile, que crois-tu qu'il en serait sur la terre?" Ce que l'eau est au poisson, la Torah l'est à Akiva. La connaissance semble ici prendre l'aspect de ce "poison vital". N'y a t-il pas ici une impression de déjà-vu? Les allégories sur la connaissance s'avèrent d'une troublante convergence entre Athènes (aux chapitres 2-1-1 avec Icare et chapitre 2-1-2 avec Platon et Socrate) et Jérusalem. Le mythe d'Icare se rapproche des dangers d'une trop grande proximité de l'individu avec la connaissance à laquelle répondent les sombres péripéties de Ben Azaï, Ben Zoma et A'her dans le jardin du Pardès et celles d'Adam et Eve dans le jardin d'Eden. Par contre, à l'allégorie platonicienne de la caverne, qui, comme  on l'a vu, représente la violence du groupe social à l'encontre de ceux qui répandent leur connaissance "corrosive pour la jeunesse" comme Socrate, répond le tragique destin de Rabbi Akiva, qui ne cessa pas, ce que Tumus Rufus lui fit payer très cher, de "corrompre la jeunesse de Jérusalem". On voit donc avec Lionel Naccache que ce n'est pas seulement dans les histoires que la connaissance tue !

    Avec mon mon article 2 nous avons vu comment après la Grèce et Jérusalem, la connaissance menace outre-Rhin avec Johann Georg Sabellicus Alias Docteur Faust.

    Quelle que soit la version exacte du mythe, Sybellicus, alias Faust, n'avait certainement qu'à s'en prendre à lui-même. Il était fin lettré, alors n'aurait-t-il pas pu ou dû relire la mythologie grecque et les récits allégoriques de la Bible et du Talmud, ou même faire attention aux best-sellers médiévaux se demande L. Naccache? En particulier, le Manuel des Inquisiteurs n'expliquait-il pas, sans aucune équivoque possible, "qu"il ne faut point savoir plus que de mesure, il ne faut ni trop savoir, ni s'abrutir. Par conséquent, nous ne devons pas en savoir plus qu'il ne faut." C'est probablement le pont le plus précieux qui nous permet d'établir une continuité directe entre les considérations plus antiques que nous avons examinées sur le pouvoir mortifère de la connaissance et notre époque actuelle. Dans la version moderne, Thomas Mann, l'une des figures les plus éminentes de la littérature européenne de la première moitié du xxe siècle, qui est considéré comme un grand écrivain moderne de la décadence, nous présente le Doktor Faustus (Adrian Leverkhün), dont l'existence sera marquée par l'audace (Khün en allemand) et qui, comme Nietzsche, braverait la folie. A la fin du récit, il est victime de son propre désenchantement, qu'il pousse dans un cri ultime dans "le chant de douleur du Docteur Faustus". Il est victime de sa croyance en un ordre caché de la musique et de la connaissance, qui vont le conduire à la plus horrible des découvertes: le néant, l'absence de signification du monde et de nous-mêmes. "Lorsque son neveu adoré, l'adorable Nepomuk, "dernier amour de sa vie", meurt d'une méningite cérébro-spinale foudroyante dans d'horribles souffrances, Leverkhün atteint l'étape ultime de son voyage. Le monde est un non-sens. Tel est l'ultime cadeau de la connaissance. Il peut alors mourir dément, atteint de paralysie générale..."

    J"ai terminé et conclu "ma lecture" de cette première partie du livre (que j'ai exprimée dans ces articles 1 et 2) par le chapitre 2 de l'article 2 : "Des mythes à la réalité ou l'art de la mauvaise solution".

    -Dans l'antiquité le cloisonnement était "la mauvaise solution" antique au problème de la connaissance.

    -Au moyen-âge, l'Europe a fait un autre choix. Sa "mauvaise solution" fut celle d'un obscurantisme religieux fondé sur la peur, peur de la mort et de l'enfer, la dichotomie bien-mal et sur le mécanisme de rédemption par la soumission à un discours religieux qui a stérilisé la pensée pour les masses incultes. 

    -La révolution des Lumières s'oppose à l'obscurantisme médiéval ("?") et aboutit à la tentative de débarrasser la connaissance des barrières que les périodes précédentes avaient avaient érigées. -Enfin, nous rencontrons les idéologies du XXè siècle marquées par deux régressions majeures, le nazisme et le communisme où la connaissance devient totalement asservie à l'idéologie et aux objectifs militaires, politiques, raciaux, sociaux de ces régimes. 

    -Finalement, mythes et réalité, même combat, même message: pendant plus de 3000 ans, la connaissance a été vécue comme un poison vital mais, désormais nulle menace à connaître ne semble plus habiter les discours dominants de nos sociétés, la connaissance ne poserait plus aucun problème au contraire? Vraiment?

    -Ou bien... Il faudrait plutôt considérer l'autre hypothèse: la connaissance aurait conservé l'essentiel de ses menaces. Elle serait toujours mortifère, pour l'individu, pour le groupe social et pour le couple. Si tel est le cas, il faudrait alors expliquer pourquoi notre discours actuel ne contient aucun signal d'alarme ni aune zone d'ombre. Serions-nous capables de nous autoproclamer "sociétés de la connaissance" sans nous mettre en garde contre ses effets nocifs? Ce serait sans aucun doute tenir un discours "bonasse" inspiré de la méthode Coué, sans nous rendre compte de son inadéquation au réel de son caractère profondément erroné.

    -Alors, comment procéder pour avancer? 

    mon article 3 a été axé sur La dimension fabulatrice de notre activité mentale. Pour prendre conscience de cette couche de fiction, une première voie peut nous y aider, la réflexion philosophique. Avec Kant, on commence par distinguer le "phénomèneet le "noumène". Cette voie est empruntée par les courants de la phénoménologie, avec par exemple la conscience selon Husserl ou LévinasUne seconde voie est celle de la neuropsychologie La réflexion philosophique peut nous y aider. Dans un ouvrage précédent, le nouvel inconscientLionel Naccache "nous invite [...] à une nouvelle odyssée, placée sous les auspices des neurosciences de l’esprit. C'est une découverte récente de la neuropsychologie que l'on pourrait appeler avec Nancy Hustonla dimension "fabulatrice" de notre activité mentaleEn effet, notre perception consciente ne se déroule pas en deux temps comme semble l'indiquer le site scienceseravenir.frLétude de malades neurologiques a joué un rôle fondamental avec la description des sanyètes qui dévoilent et mettent en évidence les fictions-interprétations-croyances qui sont beaucoup plus difficiles à déceler chez des individus qui n'ont pas ces lésions cérébrales. Ces exemples tirés de la clinique permettent de proposer une définition de l'acte de connaissance. Cet acte met en scène trois unités, le sujet X tel qu'il était et se représentait à lui-même avant de connaître l'objet Y, cet objet Y tel qu'il existe dans le monde extérieur au sujet et enfin le sujet X', le sujet tel qu'il est devenu après avoir assimilé l'objet Y. Au chapitre 2, nous avons vu que nous interprétons et nous croyons, donc "nous sommes". Mais quel lien cela a t-il avec la connaissance, le sujet de départ du livre? En philosophie, "la connaissance est l'état de celui qui connaît ou sait quelque chose. Elle implique le sujet, rouage essentiels de la condition humaine auquel ce détour neurologique permet d'accéder. Nous sommes des êtres pétris de fictions et de croyances. Dès que nous prenons conscience d'une information, que nous faisons connaissance avec elle en prenant connaissance d'elle, nous l'interprétons et l'incorporons dans des constructions fictionnelles. C'est la couche des représentations évoquée par Kant et Husserl. Nous sommes des êtres pétris de fictions et de croyances. Dès que nous prenons conscience d'une information, que nous faisons connaissance avec elle en prenant connaissance, nous l'interprétons et l'incorporons dans des constructions fictionnelles. Donc toute réflexion sur la connaissance et sur le sujet qui en est l'acteur, doit prendre en compte cette dimension de la fiction dans laquelle s'enracine notre subjectivité. Pas de connaissance sans sujet, donc sans système de fictions-interprétations-croyances!

     

    2) Bienvenue dans la "société de la connaissance".

    C'est ainsi que débute la troisième partie du livre de Lionel Naccache:

     

     

     

     

    Troisième partie

    MALAISE CONTEMPORAIN DANS LA CONNAISSANCE

    CHAPITRE PREMIER - Bienvenue dans la « société de la connaissance

     

          2-1) Introduction. Le paradoxe de la société de la connaissance et de ses brûlures.

    Nous venons de voir dans le chapitre 3-1) de mon article 3) que

    L'acte de connaître met en scène trois entités:-le sujet X tel qu'il existait et se représentait à lui-même avant de connaître l'objet Y-L'objet Y qui est le support de cet acte de connaissance.-Le sujet X' qui est le sujet ayant absorbé l'objet Y, c'est à dire le sujet ayant mis à jour ses représentations mentales à la lumière des nouvelles connaissances acquises. 

     Et Lionel Naccache ajoute: "Nous disposons d'une réponse claire et tranchée à la question de l'actualité des menaces de la connaissance. Plus encore, nous avons proposé une explicitation de l'essence même de ces menaces, d'où il ressort que, telles les deux faces d'une médaille, la connaissance nous expose à certaines menaces du fait même qu'elle nous offre dans le même temps la possibilité unique d'enrichir notre identité".

    Alors que l'actualité en ce début 2019 pose de plus en plus de questionnements, ma lecture du livre va maintenant porter sur notre rapport actuel à la connaissance qui constitue encore une énigme, car, si la connaissance constitue un danger existentiel constitutif de son essence, pourquoi et comment sommes-nous devenus les premières générations de l'histoire de a culture occidentale à ne plus prendre conscience de la menace que représente la connaissance, alors que l' avenir de l'humanité  semble menacé? Pourquoi et comment cette composante qui était présente à nos côtés depuis les récits bibliques et mythologiques antiques a t-elle disparu de notre discours contemporain? Sommes-nous devenus aveugles et insensibles? C'est que les "mauvaises solutions" imaginées au fil des siècles, que nous avons évoquées, ont perdu leur attrait et leur puissance, et sont aujourd'hui explicitement condamnées par les sociétés occidentales, même si certaines resurgissent trop souvent. Nous avons vu que c'étaient le cloisonnement de la connaissance, l'obscurantisme religieux, la censure politique ou la manipulation idéologique des esprits. Et maintenant nous faisons l'apologie de la connaissance comme jamais nulle société humaine ne semble l'avoir fait! Existerait-il une "mauvaise solution" contemporaine ainsi qu'un lien entre toutes ces "mauvaises solutions"? Nous allons maintenant essayer de découvrir, ce

     MALAISE CONTEMPORAIN DANS LA CONNAISSANCE.

    Nous vivons en effet un malaise inédit dans l'histoire de notre culture occidental qui se manifeste par par un paradoxe entre d'une part un discours apologétique et univoque sur la connaissance ("nous sommes une société de la connaissance!") et d'autre part, la constatation que partout la connaissance continue de nous infliger les multiples brûlures dans chacun de ses champs d'action (brûlures de la connaissance amoureuse, familiale ou médicale, de la connaissance sociale ou médiatique et encore et toujours, brûlures de la connaissance scientifique qui continue à déstabiliser nombre de croyances individuelles et collectives très profondes). 

         2-2) « Nous sommes la société de la connaissance » 
    La stratégie de Lisbonne en 2000: 
     L'objectif de cette stratégie fixé par le Conseil européen de Lisbonne est de faire de l’Union européenne « l’économie de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique du monde d'ici à 2010, capable d’une croissance économique durable accompagnée d’une amélioration quantitative et qualitative de l’emploi et d’une plus grande cohésion sociale1 » [...] À mi-parcours, en 2004–2005, l'analyse de la stratégie de Lisbonne a montré que celle-ci avait été jusqu'alors un échec parce que les États membres n'ont pas tenu leurs engagements pris selon la méthode ouverte de coordination, non contraignante. La stratégie a été recentrée en 2005 sur la croissance économique et l'augmentation de l'emploi." Elle semble avoir échoué , mais adopté en juin 2010, surgit le nouveau projet, avec trois axes de la stratégie Europe 2020

     visant une « croissance intelligente, durable et inclusive », est organisé autour de trois axes: l’innovation, l’accroissement du taux d’emploi, la durabilité de la croissance.

    Apparemment, en ce mois de mars 2019, le renouveau n'est pas au rendez-vous.(Krach mondial : le fiasco de l’euro va faire mal). Pourtant, en France, jamais les citoyens français n'ont été aussi diplômés, ni l'âge d'entrée sur le marché du travail n'a été si tardif ni le nombre d'années d'étude aussi élevé qu'il ne l'est aujourd'hui. Les partis politiques eux-mêmes ont affiché le rôle majeur et vital de la connaissance (*le texte de la convention UMP d'octobre 2006 -Société de la connaissance : la nouvelle frontière, *le parti socialiste défend en 2008 l'idée d'une société de la connaissance ouverte, *et le PCF "Vers une société de la connaissance partagée". L'Institut d'Etudes Européennes de ULB a dédié l'année 2018/2019 à l’Europe de la Connaissance.

    Ainsi, "nous sommes la société de la connaissance". chacun d'entre nous,"Diderot" en puissance, est invité à déposer sa contribution dans cette oeuvre collective qui va de wikipedia au site Gallica de la Bibliothèque nationale. Plus de deux siècles après les Lumières, notre époque confirme son non au cloisonnement, non à l'obscurantisme, non aux censures de toutes sortes. On assiste à l'explosion des supports et des formes de média, papier ou TV, radio, web... avec une multiplicité des horizons et des modalités de transmission et d'échange d'informations dans les temples modernes du savoir où sont célébrées leurs grands-messes (les "cités de la réussites", l'Université de tous les savoirs", l'UIP...). Mais on constate de plus en plus que personne ne semble plus faire mention de "menaces ou de risques" propres à la connaissance, bien au contraire, même si on constate des " fractures dans la société de la connaissance ", et qui laisse apparaître également de nouvelles inégalités,.selon la revue Hermes. Mais ici encore, on ne fait pas mention que le risque soit dans le fait de connaître, comme cela était présent à nos côtés depuis les récits bibliques et mythologiques antiques. Nous sommes dans une société de la connaissance, terme qui est réapparu récemment en subissant une double réduction de cette économie du savoir qui apparaissait dans les années 1990 et confirmée par la stratégie de Lisbonne en 2000. Mais quelles valeurs associons-nous à cette devise moderne? 

         2-3) Comment est née cette "société de la connaissance"?

    L'expression "société de la connaissance" succède à celle de "société de l'information", que la sociologue Daniel Bell introduisit pour la première fois, dans les années 1970, dans un ouvrage intitulé "vers la société postindustrielle". On assiste à la valorisation de ce ce qui permet la maîtrise de l'information et des connaissances théoriques avec un rejet des discours idéologiques qui deviendraient superflus. Comme l'explique le livre de Jean Staune "les clés du futur" au  CHAPITRE  9 (MODERNITE, POST-MODERNITE ET TRANS-MODERNITE, la modernité est morte mais elle ne le sait pas encore. Ce ne sont ni les outils industriels, ni les croyances idéologiques qui primeront dans cette nouvelle économie disait Daniel Bell, mais les services fondés sur la connaissance, où l'information deviendrait une valeur suprême. Il Faudra attendre 1990, note Sally Burch, pour que cette conception visionnaire trouve un écho important (voir le livre Enjeux de Mots). Cela correspond au développement d'internet et des technologies de l'information et et à la fin de la guerre froide et à l'effondrement du bloc soviétique. Cette notion est alors mise à l'ordre du jour du G7 puis du G8 et intéresse la Communauté européenne, l'OCDE, l'ONU...D'autres variantes sont proposées comme la "société en réseaux" de Manuel Castells ou la "société de l'intelligence" proposés par André Gorz
    En parallèle avec ce concept, apparaît le terme et le concept de "société de la connaissance", pierre angulaire de la "société du savoir", dans des milieux universitaires Américains, expression adoptée par Abdul Waheed Khan (
    Sous-Directeur général pour la communication et l'information de l'UNESCO de 2001 à 2010). Sally Burch insiste: "Alors que je considère que le concept de "société de l'information" est lié à l'idée d'innovations technologiques, le concept de "sociétés du savoir" inclut une dimension de transformation sociale, culturelle, économique, politique et institutionnelle, ainsi qu'une perspective plus pluraliste et développementale . À mon sens, le concept de "sociétés du savoir" est préférable à celui de "société de l'information" car il rend mieux compte de la complexité et du dynamisme des changements en cours. (...) les connaissances en question sont importantes non seulement pour la croissance économique, mais également pour l'autonomisation et le développement de tous les secteurs de la société.”  Mais c'est la "société de l'information", qui est la véritable révolution sociétale, car, sans la révolution technologique et la ruine idéologique qui ont donné naissance à la société de l'information, une société de la connaissance n'aurait pas pu être proclamée. Mais alors, qu'est-ce qui distingue  les deux? C'est, comme nous l'avons déjà vu, la prise en compte du sujet. L'expérience de la connaissance est la relation d'un sujet, avec ses croyances, son identité, avec des données, des objets, c'est un jeu d'informations extérieures au contenu de sa conscience. On sait que c'est ce qui a donné naissance à la  phénoménologie husserlienne pour laquelle la conscience est par nature intentionnelle: elle ne peut pas être isolée de l'objet qu'elle vise. Elle n'est pas intransitive, on est toujours conscient de quelque chose, d'un contenu auquel on n'accède que qu'à travers une relation subjective avec l'objet. Il existe certes, mais seulement par le truchement de notre subjectivité. Il est illusoire d'exclure celle-ci de l'expérience subjective d'une définition de la connaissance qui se concentrerait exclusivement autour des objets du savoir (des informations visées par le sujet). Une société de l'information n'est pas une société de la connaissance.

        2-4) Le paradoxe de la transparence.
    Toutes les informations renferment intrinsèquement une certaine quantité de données objectives, quelque soit leur contenu précis, qu'on y accède ou non et cela n'affecte en rien leur contenu propre. Cette valeur informationnelle intrinsèque ne dépend donc pas du sujet. Il devient donc logique et légitime, pour une société de l'information de se placer sous le principe de "l'absolue transparence". 

    Mais, attention! Ainsi définie, cette société fait abstraction des sujets que nous sommes, avec nos systèmes de fictions-interprétations-croyances respectives. Nous sommes ainsi soumis à un "grand écart" souvent douloureux, entre les aspirations de la société de consommation et sa nécessité de transparence la plus totale et les nombreux motifs de résistance de notre psychisme qui est orienté, sinon gouverné par la stabilité de nos croyances subjectives. C'est cette tension qui est à l'origine de notre discours ambivalent et paradoxal vis à vis de la transparence. Notre tension entre l'apologie quasi illimitée de la transparence et les brûlures qu'elle occasionne quotidiennement se manifeste dans le "malaise contemporain dans la connaissance" qui apparaît  dans le titre de ce chapitre 2. Nous savons qu'au cours de l'histoire, l'absence de transparence dans les vies affectives, sociales, politiques et économiques a servi à protéger des intérêts corrompus, des inégalités masquées ou de nombreuses forfaitures L'opacité côtoyait la censure. Mais aujourd'hui la transparence est devenue la règle, que ce soit dans la sphère publique, dans les opérations financières, dans les prises de décision politiques, localement ou au niveau national. On filme tout, jusqu'au conseil des ministres sans que cela choque, bien au contraire. Mais c'est dans la sphère privée la transparence devient une exigence de plus en plus importante. Nous exigeons de pouvoir tout voir, sans aucune censure: transparence des salaires, des biens des personnes publiques, des histoires de famille, des origines, des adoptions, des dons de sperme...du couple et de l'alcôve et évidemment transparence médicale absolue. La technologie permet maintenant de tout voir, partout, ce qui se passe chez autrui, dans l'intimité et chacun peut devenir un spectacle de voyeurisme télévisuel où nous avons l'illusion de voir la "vraie vie", de "vraies personnes", une télé-réalité où se confondent réel et virtuel. Ceci est accentué par les innombrables caméras de surveillance, qu'elles soient dans les rues et tout notre environnement immédiat ou non, orientées vers les autres ou bien nous-mêmes. C'est une levée généralisée de tous les secrets, propre à notre société contemporaine. L'émergence de ce désir de transparence, contrairement à de nombreux pays, n'a pas été développé et mis en pratique à l'issue d'une longue période de dictature comme l'avait été l'URSS.en 1985, sous le signe de la glasnost (ce qui veut littéralement dire "transparence"). Pourtant, celle-ci nous taraude comme comme elle ne l'avait jamais fait encore alors que nous avons maintenant toutes les facilités techniques pour la mettre en oeuvre. Elle n'est pas sortie de rien comme nous le voyons au cours de la lecture du livre de Lionel Naccache, mais son apologie sans faille à laquelle nous attachons une grande importance est un peu paradoxale, car dans la même temps, nous vivons tous les jours, comme nous le verrons dans le chapitre suivant, les conséquences parfois brûlantes et douloureuses de cette transparence. Notre résistance à la transparence se joue quotidiennement depuis les sphères immédiates et sensibles jusqu'aux plus abstraites. 

    On peut noter que l'essai de Pierre Levy Soussanl'éloge du secret figure parmi les critiques du discours apologétique contemporain autour de la transparence (voir Le secret est indispensable et l’illusion, vitale et philosophie-spiritualite.com/cours/echange4.htm: la transparence et le secret par Serge Carfantan)


    3) Les brûlures de la transparence (pedagopsy.eu/livre_perdre_connaissance.html chapitre 2)

    Nous venons de constater au chapitre précédent que la société de la connaissance à laquelle nous nous identifions ressemble plus à une société de l'information. Nous avons vu aussi en 2-1) que, selon le modèle du triptyque de la connaissance, "l'acte de connaître met en scène trois entités: -le sujet X tel qu'il existait et se représentait à lui-même avant de connaître l'objet Y -L'objet Y qui est le support de cet acte de connaissance. -Le sujet X' qui est le sujet ayant absorbé l'objet Y, c'est à dire le sujet ayant mis à jour ses représentations mentales à la lumière des nouvelles connaissances acquises". Une société de l'information se préoccupe presque exclusivement de d'assurer la libre circulation, la diffusion et l'échange des Y, sans considération majeure pour les sujets X qui pourtant en sont les citoyens. Dans une telle société, "Y-orientée" vers l'objet, l'absolue transparence de l'information doit devenir un principe incontournable sans que nulle menace ne puisse y être associée. C'est bien ce que claironnent à l'unisson les institutions et organismes qui règlent notre vie politique et les médias bien-pensantes de l'opinion dominante. Mais la connaissance ne devrait pas se limiter à cette circulation des informations. Elle doit incorporer la manière dont le sujet est affecté dans son système de fictions-interprétations-croyances par ces informations. De ce point de vue, l'expérience de la connaissance est toujours susceptible de menace, comme par le passé (voir mes articles 123), menace du sujet dans son identité. 

         3-1) Pour vérifier cette prédiction, Lionel Naccache recherche des situations qui nous révéleraient la manière dont des sujets peuvent être mis à l'épreuve, voire brûlés dans leur chair par la transparence de l'information. Ces "situations limites" vont jouer un rôle comparable à celui des malades neurologiques que nous avons vu avec mon article 3 au chapitre 1 (1-2) Neuroscience-fiction) et au chapitre 2 (Nous interprétons et nous croyons, donc nous sommes). En même temps qu'elles sous-tendent chacune de nos expériences de sujets conscients, elles nous montrent comment nous sommes inévitablement affectés par les informations que nous recevons même si nous ne sommes pas brûlés. Seulement, il est facile de s'en rendre compte quand ça brûle. Pour les décrire, on peut partir du centre qui constitue notre identité propre en traçant des cercles qui incluent nos relations les plus intimes en gagnant de proches les relations les plus éloignées voire celles  qui nous sont inconnues. Un des premiers cercles est celui des brûlures de la transparence du sentiment amoureux. En embrasant et consumant notre existence, il peut ne laisser que des cendres dans un horizon de désespoir et de non-sens. Dans un second cercle, les secrets de famille peuvent nous exposer au péril d'énigmes dépourvues de solutions; savoir ou ne pas savoir? L'écheveau est presque indémêlable entre dans une histoire familiale qui utilise presque indistinctement le réel des fils de l'événement factuel et tranché et le récit imaginaire qui s'affranchit de la réalité, intègre et raconte une autre réalité, psychique, qui ne se superpose pas à la précédente. C'est un impitoyable et explosif écheveau pour celui qui, dans la confusion, saisit le fil du fantasme en déclarant la mise au jour d'un événement caché et alors, boum! Mais ne pas chercher à savoir peut soumettre le fonctionnement de la cellule familiale à un lent et inexorable processus de déflagration silencieuse. Un troisième cercle est celui des secrets d'esculape. Il concerne les secrets du diagnostic et du pronostic médical (Transparence en médecine, quels enjeux?). Savoir? Dénier? Ne pas vouloir savoir ou ne plus vouloir savoir? Demander à savoir tout en implorant en fait de demeurer dans l'ignorance? La loi sur la transparence de l’information médicale enfin en vigueur ! Les souffrances de la transparence sont de plus en plus identifiées et leur prise en compte officielle s'inscrit jusque dans les programmes du concours de l'internat (ECN).Que le malade (ou ses proches dans certaines conditions) ait le droit de savoir ( ou de ne pas savoir ) est un droit fondamental et une exigence éthique. Puis, au-delà de ces trois cercles, on trouve les cercles de l'information, démesurément allongés par le truchement des médias. La transparence devient telle qu'on croit pouvoir savoir (en toute innocence précise L. Naccache) ce qui se passe dans un fait divers, dans un conflit ou un événement international, dans les arcanes de la prise de décision politique. On s'imagine que les secrets de la raison d'état n'auraient plus de raison d'être. Pourtant, à l'heure de la prétendue parfaite transparence, il n'est pas difficile de constater que l'accès à certaines informations dites "sensibles" demeure extrêmement problématique, ceci en parfaite contradiction avec le discours de façade des institutions qui ne cessent pas de condamner toute forme de censure et de louer les bienfaits de la transparence absolue. Il n'est qu'à citer l'exemple de ce président de la République qui institua le droit des citoyens à connaître la santé de leur dirigeant quelques mois avant de s'apprendre atteint d'un cancer durant plus d'une dizaine d'années. (forme de censure qui vise à protéger cyniquement le pouvoir plutôt que la protection des citoyens-sujets qui en font les frais, contre une brûlure de la transparence). Cette forme d'occultation vise également à une autre fonction: la préservation du confort de nos croyances; c'est à dire ne pas informer les sujets que nous sommes de la réalité tout en prétendant le faire, ce qui permet de demeurer entourés de nos fictions familières. Mais de plus en plus, la violence est exposée et décortiquée de façon exhibitionniste dans les média et nous sommes soumis  des flots d'anxiété de confusion  et d'interrogation (qui confinent souvent à la psychose) dans les informations en temps réel au plus près de ce qui est présenté comme la réalité et la vérité, même si ce n'est pas dans ces actions seules que les situations peuvent être expliquées et comprises. L'information devient de plus en plus manipulée par l'utilisation de l'émotion qui occulte souvent le sens critique, le discernement et l'analyse. On est alors confronté à l'ineptie d'un discours décomplexé, béat ou cynique à propos de l'évidence et de l'innocuité prétendue de la "transparence" dans nos sociétés.

              3-2-1 Première situation présentée par Lionel Naccache: le jeune B. est-il conscient? voir pages 132 à 135.

    C'est l'histoire d'un jeune homme de 20 ans victime d'un grave traumatisme crânien suite à un accident de motocyclette et qui tombe dans un profond coma. Deux ans plus tard B. est toujours dans le même état. Son cœur bat normalement, il respire seul sans respirateur artificiel, il est nourri par sonde gastrique. Ses parents avaient perdu en quelques années leurs deux premiers enfants et B. est leur petit dernier. Il est vivant, mais est-il conscient? Les parents veulent savoir. Continue-t-il à faire l'expérience d'une vie mentale à leur insu? Continue-t-il à penser et à ressentir leur présence? La transparence est vitale, et L. Nacache, qui a été confronté à des cas comme celui-ci, se bat pour être capable de la proposer aux familles et aux équipes soignantes, mais ne la considère pas comme inoffensive, au contraire. En effet, si B. est dans un état végétatif et si les mots prononcés et les caresses prodiguées par sa mère (et dont elle espère beaucoup) lors de ses visites quotidiennes ne sont pas consciemment ressenties par B., est-il si évident de communiquer le résultat de l'examen clinique approfondi et l'enregistrement des réponses électriques de son cerveau et d'en informer les parents et surtout la mère qui semble persuadée qu'il est conscient, se demande Lionel Naccache? (son équipe de recherche participe, avec d'autres, à la mise au point de nouveaux tests neuropsychologiques qui permettent de détecter un fonctionnement conscient en observant l'activité du cerveau et sans dépendre des réponses verbales et comportementales du malade)   voir https://www.pnas.org/content/106/5/1672 et  http://sfnrcongres.net/archivesite/www/2015/pdf/presentations2015/Vendredi-10-Avril/AUDITORIUM/15h00-Rohaut.pdf). 

    Cette situation extrême met en évidence le fait que la connaissance est avant tout l'affaire des sujets qui en font l'expérience. Et face à des situations comparables qui vient d'être décrite, les réactions des sujets sont très variables et parfois imprévisibles. Si nous en revenons au cadre théorique (voir chapitre 2-1) "l'acte de connaître met en scène trois entités: -le sujet X tel qu'il existait et se représentait à lui-même avant de connaître l'objet Y -L'objet Y qui est le support de cet acte de connaissance. -Le sujet X' qui est le sujet ayant absorbé l'objet Y, c'est à dire le sujet ayant mis à jour ses représentations mentales à la lumière des nouvelles connaissances acquises"), nous pouvons réaliser que ces cas limites de confrontation avec la souffrance ressentie pour un être proche donnent la démonstration qu'une même information, qui peut être tragique, ne conduit pas à une expérience similaire pour tous les sujets "X" qui la reçoivent. Les connaissances ne sont pas échangeables. L'expérience de chacun se distingue de celles des autres. Connaître l'objet "Y" dépend ici du sujet "X" et parle de la connaissance de "Y" sans prendre en compte qui est "X" est une absurdité. Dans des situations médicales difficiles, l'existence des schémas de fictions-interprétations-croyances ne ne sont pas des concepts abstraits ou des conjectures hasardeuses, mais des évidences qui peuvent se manifester avec violence dans nos réalités tangibles. Cela est moins apparent dans d'autres moments de nos existences, mais notre mode de fonctionnement n'y est pas radicalement différent. Dans cette forme de transparence, l'annonce diagnostique est un moment crucial de la prise en charge d'un malade, moment fondateur à la fois du vécu de sa maladie, et de la qualité de confiance établie avec son médecin. Lionel Naccache nous dit qu'il n'applique en aucun cas une recette ou un protocole codifié. Cette annonce, ou cette non-annonce, avec toutes les formes de discours intermédiaires, résulte de la prise en compte de qui sont ces "X" qui lui font face et dépend de leurs attentes. Un autre cas, encore plus délicat et complexe, et qui défraye la chronique en mai 2019, et celui de Vincent Lambert et de son coup de théâtreLa cour d'appel de Paris "ordonne à l'Etat français (...) de prendre toutes mesures aux fins de faire respecter les mesures provisoires demandées par le Comité international des droits des personnes handicapées le 3 mai 2019 tendant au maintien de l'alimentation et l'hydratation de Vincent Lambert. Ce cas, ultra médiatisé provoque la passion, et le déchirement des familles. C'est un débat de société, qui ré-ouvre le débat sur l'euthanasie et divise alors la société. Il semble être, dans le cadre des « lois éthiques » et de l'éthique publique; un défi pour le droit. Ne nous trouvons nous pas dans la vision que propose Jean Staune (voir aussi Staune) dans "explorateurs de l"invisible", et "les clés du futuravec l'extraordinaire mutation que connait notre époque et ses 5 révolutions -scientifique, technologique, managériale, économique, sociétale- qui bouleversent tous nos repères traditionnels? On rejoint aussi la question des indécidables et des conséquences du théorème d'incomplétude de Gödel. 

     [Il n'y a rien de plus rationnel, de plus logique, de plus formel qu'une démonstration mathématique. Alors, comment une démonstration mathématique pourrait-elle faire éclater "le paradigme même de la rationalité?" En démontrant de l'intérieur des mathématiques les limites des mathématiques; en démontrant logiquement les limites de la logique! C'est le paradoxe du barbier qui permet d'appréhender cette limite que le théorème de Gödel a formalisée ( S’il se rase lui-même, alors il ne respecte pas son enseigne: il raserait quelqu'un qui se rase lui-même. S’il ne se rase pas lui-même, alors son enseigne ment: de ce fait, il ne raserait pas tous les hommes du village). C'est aussi le cas du paradoxe du bibliothécaire. Pour classer "tous les livres" en deux catégories, on peut décider de faire une pile avec les ouvrages qui contiennent une référence à eux-mêmes (comme voir page x du même ouvrage). L'autre pile sera constituée d'ouvrages qui, comme souvent dans la plupart des romans, ne font jamais référence à eux-mêmes dans le corps de leur texte. On met alors chaque livre dans une pile ou l'autre, mais on  obtient alors deux nouveaux ouvrages, la catalogue (1) des livres qui se citent eux-mêmes et le catalogue (2) de ceux qui ne se citent pas eux-mêmes. Maintenant, prenons le catalogue (2): où le mettre? A priori , on le met dans la catégorie ((2) puisqu'il est pour l'instant un ouvrage qui ne se cite pas lui-même. Mais si on veut qu'il soit complet, il faut inscrire dans la liste des ouvrages qu'il contient sont propre titre: "catalogue des ouvrages qui ne se citent pas eux-mêmes".  Mais voilà qu'il fait alors une référence à lui-même, puisqu'il contient son propre titre! Or ce catalogue ne peut contenir que les ouvrages qui ne font pas référence à eux-mêmes. Peut-on le retirer de cette liste pour le mettre dans l'autre, celle des ouvrages qui se citent eux-mêmes? Non, car si nous retirons son propre titre ("catalogue des ouvrages qui ne se citent pas eux-mêmes", il ne contient plus de référence à lui-même et on ne peut le mettre dans le "catalogue des ouvrages qui contiennent une référence à eux-mêmes", puisque nous venons de retirer cette référence! 

     

         C'est comme une boucle sans fin et il n'y a pas de réponse à la question "où mettons-nous le catalogue des ouvrages qui ne se citent pas eux-mêmes?" Notre catalogue peut être soit cohérent, soit complet, mais pas les deux à la fois. Soit le catalogue est incomplet (s'il y a un ouvrage qui se cite lui-même et dont le titre n'est pas dans le catalogue, cet ouvrage étant le catalogue), soit le catalogue est complet (on y rajoute son propre titre pour le rendre complet), mais il est désormais incohérent. 

    La portée du théorème d'incomplétude, de Gödel c'est qu'en démontrant que tout système logique qui contient l'arithmétique renferme une proposition du type "où met-on le catalogue des ouvrages qui ne citent pas eux-mêmes?", qu'on appelle proposition indécidable puisqu'on ne peut pas décider de l'endroit où on met ladite proposition, il implique que que tout système logique humain cohérent est forcément incomplet --->complétude. On peut avoir des systèmes logiques complets, mais ils seront forcément incohérents. ]

    Tous ces exemples et décisions illustrent la mise en acte de la transparence médicale. Il est fondamental que de telles connaissances médicales et diagnostiques et pronostiques puissent être délivrées aux patients, et que ce droit soit protégé par le législateur, mais il faut être conscient que de telles informations sont très sensibles, ce que comprend avec évidence quiconque fait l'expérience d'une telle situation. Le discours immédiat autour de la transparence en médecine met rarement en évidence cet aspect, en insistant plutôt sur les bienfaits (pouvoir lire son dossier médical ou récupérer ses IRM), mais, s'il est indispensable que nos droits soient assurés, cela ne règle pas le danger qu'il y a parfois à savoir et certains refuseront de savoir...

              3-2-2) Autre situation, l'intimité amoureuse: chéri, pas de secrets entre nous.

    Un second espace de ces brûlures de la transparence est celui de l'intimité amoureuse, cette autre forme de connaissance qui n'en finit pas de fasciner nos consciences. On trouve cette brûlure dans le délire de jalousie et la littérature en fait largement état. Madame Bovary et les lamentations post-bourgeoises enragent de ne pouvoir y échapper. Depuis Simone de Beauvoir jusqu'à Catherine Millet, ce feu de l'intimité conjugale dévoilée consume les esprits. Cette dernière a écrit: « C’est mon grand problème, je regrette beaucoup de ne pas avoir été violée. Parce que je pourrais témoigner que du viol, on s’en sort. » Cette modalité de la connaissance, la connaissance érotique pose son énigme: puis-je aimer l'autre que je vais intimement connaître sans fusionner avec lui dans une identité aux limites floues, fusion qui serait le prélude à ma disparition, à notre disparition individuelle? Devoir mourir à soi pour aimer l'autre? C'est alors qu'une question existentielle se pose: cette perte d'autonomie est-elle symétrique? Est-ce que je risque de me retrouver mort à moi-même alors que l'autre continuerait à vivre pour lui-même, et sans moi? D'où la place de l'adultère dans "les mises en scène de cette angoisse existentielle". Une relation amoureuse n'est certes pas inéluctablement condamnée à ce destin de fusion mortifère, et donc de disparition du sujet, mais le risque est inhérent à "ce jeu des je et des corps. La bourgeoisie française du XIXème siècle en particulier en a dégagé une conduite assez consensuelle qui a valorisé l'objet "socialement observable"; le couple, qui a occulté les sujet et l'intimité des psychés. La fusion y  devient "ils sont Mr et Mme "X", unis par les liens du mariage depuis leur premier baiser jusqu'à leur caveau familial... Ils peuvent se tromper mutuellement, tous les deux le savoir, mais cela doit disparaître derrière le seul objet qu'ils investissent: l'image sociale de leur couple, vierge de toute tâche, de toute ombre. Leur couple, leur amour, c'est l'icône bourgeoise qu'ils donnent à voir; leurs âmes n'intéressent personne, à commencer par eux-mêmes!  On voit bien la perversité malsaine et hypocrite de cette politique érotique de l'autruche. Cette posture a été disséquée, souvent dénoncée par les écrivains du XIXè siècle. Elle a aussi donné toute sa puissance à la psychanalyse naissante. Mais de nos jour, a-t-on vraiment fait le choix de la transparence? La transparence sur nos intimités saurait-elle nous libérer de la "putréfaction bourgeoise" et nous restituer nos places de sujets (sujets de nos existences)? Les iconoclastes ont commencé par briser ces images et icônes bourgeoises, mais offrent-ils une libération plus joyeuse? Simone de Beauvoir fut l'une des premières femmes à faire, avec Jean-Paul Sartre, ce choix d'une intimité amoureuse qui ne sacrifierait pas l'autonomie des deux amants et en particulier pas celle de la femme. Pas de mariage, pas de vie commune, vie sexuelle non exclusive. C'est l'éloge de la transparence érotique. Ce choix, courageux dans ce qu'il tentait de condamner, s'est-il révélé agréable, aisé et libérateur? En pages 138 à 140, L. Naccache dissèque cette transparence nouvelle avec "l'invitée" de S. de Beauvoir...L'équilibre érotique est instable, tout semble vaciller, chacun se sent menacé dans ses repères. Ce récit psychologique de Simone de Beauvoir est lucide et clairvoyant par sa reconnaissance du destin presque inéluctable de cette aventure de transparence érotique. 

    Ne retrouvons-nous pas ici, le thème du danger de la connaissance que nous croyions avoir disparu, comme nous l'avons rappelé en conclusion de l'article 2: "mythes et réalité, même combat, même message: pendant plus de 3000 ans, la connaissance a été vécue comme un poison vital mais, désormais nulle menace à connaître ne semble plus habiter les discours dominants de nos sociétés, la connaissance ne poserait plus aucun problème au contraire?Vraiment? Pourquoi et comment notre discours a t-il pu évoluer si rapidement, en rupture radicale avec tous ceux qui l'avaient précédé? Est-ce la menace qui a disparu ou nos yeux ne la vient-elle plus? Serait-ce un cadeau non intentionnel de notre époque? Cadeau de notre techno-science, de l'émancipation religieuse et sexuelle, de l'évolution des consciences toujours plus avides de transparence et qui toutes valorisent la connaissance? Icare serait-il un ringard? Pourtant, le thème de la connaissance qui tue n'était pas un secret qui ne circulait qu'au sein des cercles protégés et instruits. Comment, en l'espace de quelques dizaines d'années, le paysage intellectuel aurait-il été aussi radicalement transformé? Aurions-nous coupé le cordon avec les mythes et leurs traductions sociales et historiques?                     -Ou bien... Il faudrait plutôt considérer l'autre hypothèse: la connaissance aurait conservé l'essentiel de ses menaces.

    Les personnages de "L'invitée" sont Françoise (écrivain) et Pierre (directeur de théâtre), l'invitée étant Xavière. L'implacable description description, clinique et franche, de l'atmosphère dans laquelle la transparence tente de se jouer ici entre Sartre/Pierre et Beauvoir/Françoise est le jeu du tissage entre la fiction et le réel. Xavière n'est autre qu'une élève de Simone de Beauvoir (qui a rejoint le cercle de Beauvoir et Jean-Paul Sartre en 1935, âgée de 19 ans. Elle et sa sœur Wanda ont été fusionnées ensemble), Olga Kozakieviczà qui le roman est dédié. Elle deviendra l'épouse de Jacques Laurent Bost/Gerbert (Gerbert est le personnage avec qui a couché Xavière). C'est "le petit Bost" qu'évoque Simone de Beauvoir quand elle annonce à Sartre en 1938: "Il m'est arrivé quelque chose d'extrêmement plaisant  à quoi je ne m'attendais pas du tout et pourtant, c'est que j'ai couché avec le petit Bostvoici 3 jours [...]. Tout au long de cette existence, d'autres personnages viendront s'intégrer, et souffrir, avec Sartre et Beauvoir dans leur jeu dangereux avec la lumière (de la transparence). En fait, ils sont acculés à une contrainte formelle aussi aliénante, aveugle et étouffante que celle de la bourgeoisie du XIXè siècle. Leur projet de la transparence n'est pas une libération de la puissance d'agir et d'être chère à Spinoza nous précise Laurent Naccache.  

    Catherine Millet, 60 ans plus tard, livre à son tour son récit des brûlures inattendues de la transparence érotique, transparence pourtant conçue comme clé de voûte de son expérience amoureuse avec son compagnon, cependant dans un contexte social et intellectuel différent. Elle est devenue icône contemporaine d'un nouveau discours amoureux dans son autofiction "la vie sexuelle de Catherine M (2001), pour lequel l'express évoque "les partouzes d'une intello". Le buzz-litteraire.com, lui, parle du "récit explicite de l’éducation sexuelle et des nombreuses aventures (en particulier « sexualité de groupe ») de la très respectable et intellectuelle directrice du magazine Art Press (une référence dans le milieu de l’art moderne), ouvrage souvent comparé à "My Secret Life" d'Henry Miller". Mais, en 2008, Catherine Millet raconte dans jour de souffrance l'irruption irrépressible de du sentiment de jalousie en découvrant les traces, non cachées des aventures extra-conjugales de son partenaire. Alors, "la femme libre, à la sexualité assumée et affichée, adepte des jeux échangistes, se trouve plongée dans une « crise », elle emploie elle-même le terme. Une crise dans son couple, mais aussi une crise au sens le plus médical du terme, dont ce roman est la manifestation. Confrontée aux affres de la jalousie, Catherine Millet analyse, dissèque, expose ses motivations, ses désirs, ses fantasmes, en une langue d’un classicisme absolu, d’une froideur clinique, le feu des passions pointant sous la glace du style". Ainsi, la vestale contemporaine du "pacte de la transparence" est amenée à nous conduire vers le même constat que Simone de Beauvoir. Ainsi, "d'une putréfaction à l'autre, de l'ombre fétide de la bourgeoisie à la lumière violente du couple "libéré", la connaissance de l'être aimé ne finit pas d'être une histoire dangereuse dont la transparence n'adoucit en rien la menace". 

    Conclusion de ce chapitre 3-2-2: Eros se joue de nous, Eros se joue en nous. La transparence extérieure du couple "libéré", de même que "la preuve extérieure" du jaloux, qui est très similaire de façon symétrique, se rejoignent dans leur naïveté et leur violence pour tenter de résoudre, une fois pour toutes, cette énigme d'Eros. Du point de vue du triptyque de la connaissance (-le sujet X tel qu'il existait et se représentait à lui-même avant de connaître l'objet Y -L'objet Y qui est le support de cet acte de connaissance. -Le sujet X' qui est le sujet ayant absorbé l'objet Y, c'est à dire X,X',Y), la connaissance amoureuse correspond au cas limite dans lequel Y, l'objet de la connaissance, est un autre X, un sujet dans lequel le JE plonge tout entier en courant le risque de se fondre à lui, c'est à dire mourir à soi en aimant l'autre. 


    4) En conclusion, un résumé de cet article 4

    Nous nous avons vu en préambule que nous sommes des êtres pétris de fictions et de croyances. Dès que nous prenons conscience d'une information, que nous faisons connaissance avec elle en prenant connaissance, nous l'interprétons et l'incorporons dans des constructions fictionnelles. Donc toute réflexion sur la connaissance et sur le sujet qui en est l'acteur, doit prendre en compte cette dimension de la fiction dans laquelle s'enracine notre subjectivité. Pas de connaissance sans sujet, donc sans système de fictions-interprétations-croyances!

    Dans l'article 1, nous avons vu  Adam et Ève face à l'arbre de la connaissance, la connaissance menace Athènes l'éternelle.avec le tragique destin d'Icare, l'allégorie de la caverne de Platon la connaissance menace Jérusalem (du paradis perdu au Pardes retrouvé. Le Pardès (Kabbale) "est un lieu où l'étudiant de la Torah peut atteindre un état de béatitude".  Et enfin nous avons vu dans mon article 2. que la connaissance menace outre-Rhin avec la figure de Faustc'est à dire Johann Georg Sabellicus Alias Docteur Faust" C'est probablement le pont le plus précieux qui nous permet d'établir une continuité directe entre les considérations plus antiques que nous avons examinées sur le pouvoir mortifère de la connaissance et notre époque actuelle. Dans la version moderne, Thomas Mann, l'une des figures les plus éminentes de la littérature européenne de la première moitié du xxe siècle, qui est considéré comme un grand écrivain moderne de la décadence, nous présente le Doktor Faustus (Adrian Leverkhün), dont l'existence sera marquée par l'audace (Khün en allemand). Cet article conclue: 

    -Dans l'antiquité le cloisonnement était "la mauvaise solution" antique au problème de la connaissance.

    -Au moyen-âge, l'Europe a fait un autre choix. Sa "mauvaise solution" fut celle d'un obscurantisme religieux fondé sur la peur, peur de la mort et de l'enfer, la dichotomie bien-mal et sur le mécanisme de rédemption par la soumission à un discours religieux qui a stérilisé la pensée pour les masses incultes. 

     -La révolution des Lumières s'oppose à l'obscurantisme médiéval ("?") et aboutit à la tentative de débarrasser la connaissance des barrières que les périodes précédentes avaient avaient érigées. 

    -Finalement, mythes et réalité, même combat, même message: pendant plus de 3000 ans, la connaissance a été vécue comme un poison vital mais, désormais nulle menace à connaître ne semble plus habiter les discours dominants de nos sociétés, la connaissance ne poserait plus aucun problème au contraire? Vraiment?

    -Ou bien... Il faudrait plutôt considérer l'autre hypothèse: la connaissance aurait conservé l'essentiel de ses menaces. Elle serait toujours mortifère, pour l'individu, pour le groupe social et pour le couple. 

    Dans mon article 3, la connaissance est présentée comme une histoire de neuro-science fiction avec une dimension fabulatrice de notre activité mentale. Lionel Naccache semble dire que, puisque l'acte de connaître met en scène trois entités: -le sujet X tel qu'il existait et se représentait à lui-même avant de connaître l'objet Y -L'objet Y qui est le support de cet acte de connaissance. -Le sujet X' qui est le sujet ayant absorbé l'objet Y, c'est à dire le sujet ayant mis à jour ses représentations mentales à la lumière des nouvelles connaissances acquises",  "Nous disposons d'une réponse claire et tranchée à la question de l'actualité des menaces de la connaissance. Plus encore, nous avons proposé une explicitation de l'essence même de ces menaces, d'où il ressort que, telles les deux faces d'une médaille, la connaissance nous expose à certaines menaces du fait même qu'elle nous offre dans le même temps la possibilité unique d'enrichir notre identité". Mais nous avons alors rencontré les risques de la connaissance. Le premier risque peut s'appeler la mue du "JE". La révision de notre système de fictions-interprétations-croyances peut être si radicale que le "JE" qui en ressort peut ne plus rien avoir à partager avec celui que nous étions jusqu'à présent et il peut devenir un autre, étranger à celui qu'il était. On assiste alors à la disparition du "JE" initial. Le deuxième risque, plus périlleux encore, constitue, pour Lionel Naccache, l'étape ultime de la connaissance, l'épreuve finale qui seule autorise, ou non, la poursuite de l'aventure. C'est la connaissance qui rend lucide le sujet sur son propre compte et qui lui permet de réaliser, une fois pour toutes, que le "JE" est une fiction.
    Alors que l'actualité en ce début 2019 pose de plus en plus de questionnements, ma lecture du livre va maintenant porter sur notre rapport actuel à la connaissance qui constitue encore une énigme, car, si la connaissance constitue un danger existentiel constitutif de son essence, pourquoi et comment sommes-nous devenus les premières générations de l'histoire de a culture occidentale à ne plus prendre conscience de la menace que représente la connaissance, alors que l'avenir de l'humanité semble menacé?. Pourquoi et comment cette composante qui était présente à nos côtés depuis les récits bibliques et mythologiques antiques a t-elle disparu de notre discours contemporain? Sommes-nous devenus aveugles et insensibles? C'est que les "mauvaises solutions" imaginées au fil des siècles, que nous avons évoquées, ont perdu leur attrait et leur puissance, et sont aujourd'hui explicitement condamnées par les sociétés occidentales, même si certaines resurgissent trop souvent. C'étaient le cloisonnement de la connaissance, l'obscurantisme religieux, la censure politique ou la manipulation idéologique des esprits. 

    Et maintenant nous faisons l'apologie de la connaissance comme jamais nulle société humaine ne semble l'avoir fait! Existerait-il une "mauvaise solution" contemporaine ainsi qu'un lien entre toutes ces "mauvaises solutions"? C'est ce que nous essaierons de découvrir dans cet article 4 que nous avons commencé par Bienvenue dans la "société de la connaissance".qui débute la troisième partie du livre de Lionel Naccache.

    Nous vivons en effet un malaise inédit dans l'histoire de notre culture occidental qui se manifeste par par un paradoxe entre d'une part un discours apologétique et univoque sur la connaissance ("nous sommes une société de la connaissance !") et d'autre part, la constatation que partout la connaissance continue de nous infliger les multiples brûlures dans chacun de ses champs d'action (brûlures de la connaissance amoureuse, familiale ou médicale, de la connaissance sociale ou médiatique et encore et toujours, brûlures de la connaissance scientifique qui continue à déstabiliser nombre de croyances individuelles et collectives très profondes). Nous verrons dans un prochain article que nous sommes plutôt dans une société de l'information. Mais la question reste posée: Société de la connaissance ou société de l’information ?

    Le paradoxe de la transparence: Toutes les informations renferment intrinsèquement une certaine quantité de données objectives, quelque soit leur contenu précis, qu'on y accède ou non et cela n'affecte en rien leur contenu propre. Cette valeur informationnelle intrinsèque ne dépend donc pas du sujet. Il devient donc logique et légitime, pour une société de l'information de se placer sous le principe de "l'absolue transparence". 

    Mais, attention! Ainsi définie, cette société fait abstraction des sujets que nous sommes, avec nos systèmes de fictions-interprétations-croyances respectives. Nous sommes ainsi soumis à un "grand écart" souvent douloureux, entre les aspirations de la société de consommation et sa nécessité de transparence la plus totale et les nombreux motifs de résistance de notre psychisme qui est orienté, sinon gouverné par la stabilité de nos croyances subjectives. C'est cette tension qui est à l'origine de notre discours ambivalent et paradoxal vis à vis de la transparence. Notre tension entre l'apologie quasi illimitée de la transparence et les brûlures qu'elle occasionne quotidiennement se manifeste dans ce qui est désigné comme le "malaise contemporain dans la connaissance". 

    Les brûlures de la transparence. La connaissance ne devrait pas se limiter à cette circulation des informations; même absolument transparente. Elle doit incorporer la manière dont le sujet est affecté dans son système de fictions-interprétations-croyances par ces informations. De ce point de vue, l'expérience de la connaissance est toujours susceptible de menace, comme par le passé, (voir mes articles 123), menace du sujet dans son identité. Les cas que nous avons vus vont en progression en partant de notre identité propreUn des premiers cercles est celui des brûlures de la transparence du sentiment amoureux. Dans un second cercle, les secrets de famille peuvent nous exposer au péril d'énigmes dépourvues de solutions; savoir ou ne pas savoir? Un troisième cercle est celui des secrets d'esculape. Il concerne les secrets du diagnostic et du pronostic médical (Transparence en médecine, quels enjeux?). Savoir? Dénier? Ne pas vouloir savoir ou ne plus vouloir savoir? Demander à savoir tout en implorant en fait de demeurer dans l'ignorance? Puis, au-delà de ces trois cercles, on trouve les cercles de l'information, démesurément allongés par le truchement des médias. La transparence devient telle qu'on croit pouvoir savoir (en toute innocence précise L. Naccache) ce qui se passe dans un fait divers, dans un conflit ou un événement international, dans les arcanes de la prise de décision politique. On s'imagine que les secrets de la raison d'état n'auraient plus de raison d'être. Pourtant, à l'heure de la prétendue parfaite transparence, il n'est pas difficile de constater que l'accès à certaines informations dites "sensibles" demeure extrêmement problématique, ceci en parfaite contradiction avec le discours de façade des institutions qui ne cessent pas de condamner toute forme de censure et de louer les bienfaits de la transparence absolue.  Cette forme d'occultation vise également à une autre fonction: la préservation du confort de nos croyances; c'est à dire ne pas informer les sujets que nous sommes de la réalité tout en prétendant le faire, ce qui permet de demeurer entourés de nos fictions familières. Mais de plus en plus, la violence est exposée et décortiquée de façon exhibitionniste dans les média et nous sommes soumis  des flots d'anxiété de confusion  et d'interrogation (qui confinent souvent à la psychose) dans les informations en temps réel au plus près de ce qui est présenté comme la réalité et la vérité, même si ce n'est pas dans ces actions seules que les situations peuvent être expliquées et comprises. L'information devient de plus en plus manipulée par l'utilisation de l'émotion qui occulte souvent le sens critique, le discernement et l'analyse. On est alors confronté à l'ineptie d'un discours décomplexé, béat ou cynique à propos de l'évidence et de l'innocuité prétendue de la "transparence" dans nos sociétés.

    Sans revenir sur les brûlures de la transparence évoquées au chapitre 3, rappelons simplement le cas de B. le jeune homme de 20 ans victime d'un grave traumatisme crânien ou celui de Vincent Lambert et de son coup de théâtrequi ré-ouvre le débat sur l'euthanasie et divise alors la société. Cela semble être, dans le cadre des « lois éthiques » et de l'éthique publique; un défi pour le droit. Ne nous trouvons nous pas dans la vision que propose Jean Staune dans "explorateurs de l"invisible", et "les clés du futuravec l'extraordinaire mutation que connait notre époque et ses 5 révolutions -scientifique, technologique, managériale, économique, sociétale- qui bouleversent tous nos repères traditionnels? On rejoint aussi la question des indécidables et des conséquences du théorème d'incomplétude de Gödel. Une autre que situation a été décortiquée au chapitre 3-2-2) avec l'intimité amoureuse: chéri, pas de secrets entre nous et le cas de Simone de Beauvoir vue à travers les personnages de "L'invitée".  Ce sont Françoise (écrivain) et Pierre (directeur de théâtre), l'invitée étant Xavière. L'implacable description description, clinique et franche, de l'atmosphère dans laquelle la transparence tente de se jouer ici entre Sartre/Pierre et Beauvoir/Françoise est le jeu du tissage entre la fiction et le réel. Xavière n'est autre qu'une élève de Simone de Beauvoir (qui a rejoint le cercle de Beauvoir et Jean-Paul Sartre en 1935, âgée de 19 ans. Elle et sa sœur Wanda ont été fusionnées ensemble), Olga Kozakieviczà qui le roman est dédié. Elle deviendra l'épouse de Jacques Laurent Bost/Gerbert (Gerbert est le personnage avec qui a couché Xavière). Tout au long de cette existence, d'autres personnages viendront s'intégrer, et souffrir, avec Sartre et Beauvoir dans leur jeu dangereux avec la lumière (de la transparence). En fait, ils sont acculés à une contrainte formelle aussi aliénante, aveugle et étouffante que celle de la bourgeoisie du XIXè siècle. Leur projet de la transparence n'est pas une libération de la puissance d'agir et d'être chère à Spinoza nous précise Laurent Naccache.  

     

    Ainsi, cette "société de la connaissance", pierre angulaire de la "société du savoir", expression adoptée par Abdul Waheed Khan (Sous-Directeur général pour la communication et l'information de l'UNESCO de 2001 à 2010) qui est plutôt une société de l'information, car elle occulte trop le sujet au profit de l'objet observé, n'est encore pas au bout de ses peines. Pour beaucoup, l'éveil est sans doute encore loin. Les Lumières ont peut-être enterré trop vite les 3000 ans de culture occidentale pour lesquelles la connaissance est représentée comme un danger, un "poison vital" et qui serait porteuse d'un certain danger existentiel. Cet article s'achève sur ces constats et le prochain article explicitera ce que Lionel Naccache entend par ce qu'il appelle neuro-résistances, puis nous réexaminerons en quoi information et connaissance sont confondues, en particulier la technique efface le sujet.

     

    liens:

    http://emag.eps-ville-evrard.fr/n2/point-de-vue/dr-gabrielle-arena/internet-espace-d-opacite-ou-de-transparence/Internet espace d'opacité ou de transparence ?

    http://www.europesolidaire.eu/article.php?article_id=1206: Notre identité propre - Un sujet en soi Les neurosciences, le Talmud et la subjectivité par Lionel Naccache

    Jean Staune, à propos de la tentation de l'homme dieu de Bertrand Vergely

    http://guykarl.canalblog.com/archives/2019/05/07/37317422.html#utm_medium=email&utm_source=notification&utm_campaign=guykarlLa prison du langage, sujet-objet

    http://pierrecassounogues.com/: professeur au département de philosophie à l’université Paris 8 Vincennes-Saint-Denis, mon travail concerne les relations entre Imaginaire et Raison, et le problème d’une expression philosophique, qui utilise la fiction pour fonder une perspective spéculative et se donner les moyens d’une critique du contemporain. Dans un livre à venir, syndromes technologiques, j’analyse la façon dont les technologies contemporaines transforment la subjectivité et ce que l’on peut appeler la sphère intérieure, l’expérience en première personne: ce que c’est que d’éprouver quelque chose. Mes publications.

     

     

     

     

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  • article 3) Perdons-nous connaissance?  deuxième partie (chap. 1 et 2)

     

    article 3) Perdons-nous connaissance? 

     Ma lecture du livre Perdons-nous connaissance? de Lionel Naccache:

    deuxième partie (chapitres 1 et 2)

     

     

     

    http://www.centrebethanie.org/2016/09/l-arbre-de-la-connaissance.html

     

     

    J'écris mon blog pour partager ma soif de connaissances, mes réflexions et mes passions et mes lectures. Dans ces articles, je voudrais partager "ma lecture" du livre de Lionel Naccache  "Perdons-nous connaissance?". Ecrire ce que je retiens de mes lectures me permet de réfléchir à la compréhension que j'en ai. je mets entre guillemets les passages qui me semblent importants ou qui me frappent. Et par dessus tout je fais des recherches sur internet pour compléter ma lecture avec le maximum de liens que je souhaite responsables, qui permettent aux lecteurs d'approfondir la connaissance du sujet.   

     

     Je livre ici "ma lecture" du livre Perdons-nous connaissance? de Lionel Naccache: c'est-à-dire perdons-nous le sens de ce qu'est la connaissance (philosophie) alors que nous nous autoproclamons " société de la connaissance "? Aujourd'hui, la connaissance ne fait plus peur à personne, alors que depuis trois mille ans notre culture occidentale n'a cessé de la décrire comme vitale et dangereuse. Oui, dangereuse, qui s'en sou-vient encore? Cette rupture avec notre héritage constitue-t-elle un progrès ou une régression, une chute ou une ascension? La Mythologie et la Neurologie, sources de " connaissance de la connaissance ", nous offriront de précieuses clés pour résoudre ce paradoxe inédit dans l'histoire de la pensée. 

     

     

    Préambule: Pourquoi cette question "Perdons-nos connaissance?" alors que nous avons cette merveilleuse faculté qui nous semble aller de soi, la capacité de connaître ce que nous ne connaissions pas encore à l'instant qui précédait. Notre société s'autoproclame en effet "société de la connaissance" comme elle ne l'avait jamais fait auparavant. Et pourtant, depuis les origines de notre culture, la connaissance est représentée comme un danger, un "poison vital". Elle serait porteuse d'un certain danger existentiel qui a imprégné notre culture depuis plus de 3 000 ans jusqu'à l'époque moderne avec le siècle des Lumières que Bertrand Vergely a appelées "obscures Lumières", et dont j'ai présenté ma lecture dans l'article de mon blog. Ce danger multi-millénaire s'est exprimé dans trois grands mythes qui ont façonné notre civilisation. Les chapitres que nous avons vus dans l'article 1:

    1) Avant-propos. 1-1) Adam et Ève face à l'arbre de la connaissance. 1-2) Le tragique destin d'Icare1-3) L'allégorie de la caverne de Platon. 1-4) La figure de Faust.

    2) Ma lecture du livre de Lionel Naccache. Première partie; une menace vieille comme le monde

    2-1) La connaissance menace Athènes l'éternelle -chapitre 1-  

    2-1-1) I comme Icare est significatif pour la problématique de la connaissance. Pour l'instant retenons que Icare vient de nous enseigner que connaître sans limites est une démesure  condamnable et dangereuse. Cette menace ainsi stigmatisée semble engager l'individu dans son rapport personnel et solitaire avec la connaissance.

    2-1-2) L'homme qui en savait trop. chapitre 1 suite: la connaissance menace Athènes Conclusion: Pour

     Platon et Socrate, l'homme de connaissance serait l'inévitable victime de la violence du groupe qui l'entoure. Icare nous montrait les risques du rapport de l'individu face à la connaissance. Ici, Platon nous indique que l'homme qui connaît est également vécu comme une menace par ses congénères et que cette menace conduit à la disparition inéluctable de celui qui connaît, incapable de transmettre son savoir. Cela conduit à la préservation de l'ignorance, le fondement et la garantie de d'une certaine forme de paix ou de confort social. 

    2-2) La connaissance menace Jérusalem -chapitre 2-
    2-2-1) Du paradis perdu au Pardes retrouvé."Le Pardès, littéralement jardin, verger, parc, qui s'apparente au mot paradis, désigne, dans la tradition de la Kabbale, un lieu où l'étudiant de la Torah peut atteindre un état de béatitude. Ce terme est tiré d'une anecdote philosophique et mystique qui trouve une explication dans le Pardes Rimonim du Rav Moshe Cordovero. Celui-ci prend l'image de quatre rabbis (Elisha ben Abouya, [Rabbi] Shimon ben Azzaï, [Rabbi] Shimon ben Zoma et rabbi Akiva) pénétrant un verger mais dont les "niveaux" respectifs de pénétration du sens des Écritures ne sont pas équivalents". Ainsi, après intérieure et la paix sociale, voici que la paix des ménages est en péril!

    2-2-2) Vie et destin de quatre talmudistes en quête de connaissance
    2-2-3) Vie et destin de quatre talmudistes en quête de connaissance suite: le cas de rabbi Akiva -La connaissance? Une vraie boucherie! Conclusion: A ses amis qui lui recommandaient de de se protéger et de suspendre l'enseignement de ses connaissances à la jeunesse de Jérusalem, Rabbi Avika répondait par une parabole: "Un renard, voyant un poisson se débattre pour échapper aux filets des pêcheurs, lui dit "Poisson, mon ami, ne viendrais-tu pas vivre avec moi sur la terre ferme?" Le poisson lui répond: "Renard, on te dit le plus sage, mais en réalité, tu es le sot des animaux. Si vivre dans l'eau qui est mon élément m'est difficile, que crois-tu qu'il en serait sur la terre?" Ce que l'eau est au poisson, la Torah l'est à Akiva. La connaissance semble ici prendre l'aspect de ce "poison vital". N'y a t-il pas ici une impression de déjà-vu? Les allégories sur la connaissance s'avèrent d'une troublante convergence entre Athènes (aux chapitres 2-1-1 avec Icare et chapitre 2-1-2 avec Platon et Socrate) et Jérusalem. Le mythe d'Icare se rapproche des dangers d'une trop grande proximité de l'individu avec la connaissance à laquelle répondent les sombres péripéties de Ben Azaï, Ben Zoma et A'her dans le jardin du Pardès et celles d'Adam et Eve dans le jardin d'Eden. Par contre, à l'allégorie platonicienne de la caverne, qui, comme  on l'a vu, représente la violence du groupe social à l'encontre de ceux qui répandent leur connaissance "corrosive pour la jeunesse", comme Socrate, répond le tragique destin de Rabbi Akiva, qui ne cessa pas, ce que Tumus Rufus lui fit payer très cher, de "corrompre la jeunesse de Jérusalem". On voit donc avec Lionel Naccache que ce n'est pas seulement dans les histoires que la connaissance tue ! Ainsi se termine ma lecture de l'Avant - propos et première partie chapitres 1 et 2 du livre de Lionel Naccache "Perdons-nous connaissance?


    Avec mon mon article 2 nous avons vu comment après la Grèce et Jérusalem, la connaissance menace outre-Rhin avec Johann Georg Sabellicus Alias Docteur Faust.

    Quelle que soit la version exacte du mythe, Sybellicus, alias Faust, n'avait certainement qu'à s'en prendre à lui-même. Il était fin lettré, alors n'aurait-t-il pas pu ou dû relire la mythologie grecque et les récits allégoriques de la Bible et du Talmud, ou même faire attention aux best-sellers médiévaux se demande L. Naccache? En particulier, le Manuel des Inquisiteurs n'expliquait-il pas, sans aucune équivoque possible, "qu"il ne faut point savoir plus que de mesure, il ne faut ni trop savoir, ni s'abrutir. Par conséquent, nous ne devons pas en savoir plus qu'il ne faut." C'est probablement le pont le plus précieux qui nous permet d'établir une continuité directe entre les considérations plus antiques que nous avons examinées sur le pouvoir mortifère de la connaissance et notre époque actuelle. Dans la version moderne, Thomas Mann, l'une des figures les plus éminentes de la littérature européenne de la première moitié du xxe siècle, qui est considéré comme un grand écrivain moderne de la décadence, nous présente le Doktor Faustus (Adrian Leverkhün), dont l'existence sera marquée par l'audace (Khün en allemand) et qui, comme Nietzsche, braverait la folie. A la fin du récit, il est victime de son propre désenchantement, qu'il pousse dans un cri ultime dans "le chant de douleur du Docteur Faustus". Il est victime de sa croyance en un ordre caché de la musique et de la connaissance, qui vont le conduire à la plus horrible des découvertes: le néant, l'absence de signification du monde et de nous-mêmes. "Lorsque son neveu adoré, l'adorable Nepomuk, "dernier amour de sa vie", meurt d'une méningite cérébro-spinale foudroyante dans d'horribles souffrances, Leverkhün atteint l'étape ultime de son voyage. Le monde est un non-sens. Tel est l'ultime cadeau de la connaissance. Il peut alors mourir dément, atteint de paralysie générale..."

    J"ai terminé et conclu "ma lecture" de cette première partie du livre (que j'ai exprimée dans ces articles 1 et 2) par le chapitre 2 de l'article 2: "Des mythes à la réalité ou l'art de la mauvaise solution".

    -Dans l'antiquité le cloisonnement était "la mauvaise solution" antique au problème de la connaissance.

    -Au moyen-âge, l'Europe a fait un autre choix. Sa "mauvaise solution" fut celle d'un obscurantisme religieux fondé sur la peur, peur de la mort et de l'enfer, la dichotomie bien-mal et sur le mécanisme de rédemption par la soumission à un discours religieux qui a stérilisé la pensée pour les masses incultes. 

    -La révolution des Lumières s'oppose à l'obscurantisme médiéval ("?") et aboutit à la tentative de débarrasser la connaissance des barrières que les périodes précédentes avaient avaient érigées. -Enfin, nous rencontrons les idéologies du XXè siècle marquées par deux régressions majeures, le nazisme et le communisme où la connaissance devient totalement asservie à l'idéologie et aux objectifs militaires, politiques, raciaux, sociaux de ces régimes. 

    -Finalement, mythes et réalité, même combat, même message: pendant plus de 3000 ans, la connaissance a été vécue comme un poison vital mais, désormais nulle menace à connaître ne semble plus habiter les discours dominants de nos sociétés, la connaissance ne poserait plus aucun problème au contraire? Vraiment?

    -Ou bien... Il faudrait plutôt considérer l'autre hypothèse: la connaissance aurait conservé l'essentiel de ses menaces. Elle serait toujours mortifère, pour l'individu, pour le groupe social et pour le couple. Si tel est le cas, il faudrait alors expliquer pourquoi notre discours actuel ne contient aucun signal d'alarme ni aune zone d'ombre. Serions-nous capables de nous autoproclamer "sociétés de la connaissance" sans nous mettre en garde contre ses effets nocifs? Ce serait sans aucun doute tenir un discours "bonasse" inspiré de la méthode Coué, sans nous rendre compte de son inadéquation au réel de son caractère profondément erroné.

    -Alors, comment procéder pour avancer? Commençons la lecture de cette deuxième partie du livre par ce premier chapitre.

     

    1) La connaissance, une histoire de neuro-science fiction?

         1-1) La dimension fabulatrice de notre activité mentale: Où nous découvrirons que lorsque nous réfléchissons à la connaissance, il est indispensable de prendre en compte la dimension de la fiction dans laquelle s'enracine notre subjectivité. Pas de connaissance sans sujet et donc pas de connaissance sans fictions-interprétations-croyances.

    Avançons en commençant par approfondir ce que la Révolution des Lumières et la science nous ont apporté et changé avec les découvertes de la neurologie. Depuis le début du livre, le terme de connaissance ne cesse de nous accompagner. Jusqu'à maintenant, l'usage de ce mot est resté dans ses dimensions abstraites, mythologiques, historiques, sociologiques... Mais pour chacun d'entre nous, c'est une affaire quotidienne, concrète, qui touche chacun des individus que nous sommes. La connaissance se joue au cœur de chacune de nos subjectivités qui, malgré leur diversité, sont singulières, même si elles obéissent à des lois communes. C'est maintenant sous cet angle que nous allons aborder avec Lionel Naccache, la question de savoir en quoi la connaissance pourrait être un "poison vital". Il nous faut plonger au cœur de nos cerveaux, là où se joue notre subjectivité et donc contre connaissance. Ce cerveau, en fait, n'est pas tout seul, mais il appartient à un corps, qui est lui-même inséré dans un tissu social; il est dépositaire d'une biographie personnelle, tout en étant héritier des références culturelles, sociales et intellectuelles qui nous entourent et nous bercent. C'est en ce lieu, dans le cerveau, que s'élabore cette fonction mentale qu'est la connaissance.

    C'est dans un ouvrage précédent, le nouvel inconscient que Lionel Naccache "nous invite [...] à une nouvelle odyssée, placée sous les auspices des neurosciences de l’esprit. Au-delà des analogies et des oppositions entre l’inconscient freudien et l’inconscient cognitif)[....]", Il montre que "la posture même du discours freudien détient une clé essentielle de notre faculté à construire notre pensée consciente. Cette clé de la conscience découverte par Freud, à son insu, peut aujourd’hui être pleinement comprise à la lumière d’expériences récentes des neurosciences de l’esprit. Cette nouvelle interprétation de l’inconscient freudien, conjuguée à l’exposition préalable de l’inconscient cognitif contemporain dessinent ensemble le portrait de ce Nouvel Inconscient [...]". Les mécanismes décrits ne sont autres que ceux que nous mettons en oeuvre dès lors que nous sommes conscients et donc que nous faisons acte de connaissance. Dans les descriptions cliniques exposées dans l'ouvrage, il apparaît que nous ne cessons de produire des interprétations du "réel", de ce que nous percevons et qui nous arrive et de ce à quoi nous pensons. Cela se produit même quand nous croyons nous livrer seulement à un exercice de connaissance. C'est une découverte récente de la neuropsychologie que l'on pourrait appeler avec Nancy Hustonla dimension "fabulatrice" de notre activité mentale. C'est un fait que, même lorsqu'on pense accéder en toute "objectivité" à des informations qui existent en dehors de nous, en s'imaginant atteindre la connaissance, nous continuons là encore à "emprunter le chemin de l'interprétation" et de la "fictionnalisation" pour construire nos représentations personnelles de ces savoirs, même dans le cas où on accède à l'information scientifique: l'atome d'oxygène contient 8 protons et 8 neutrons. Ces interprétations sont fictives, elle ne sont pas là pour être "vraies" ou "exactes" (même si elles sont par ailleurs), mais pour faire sens à nos yeux. dans notre désir de cohérence et d'explication. Nous les forgeons et les révisons sans cesse (n'est-ce pas déjà là les prémisses d'une attitude scientifique?). Lionel Naccache nous dit: "nous leur accordons un certain degré de croyance, voire un degré de croyance certain" (le doute scientifique est un prolongement conscient de cette étape à laquelle il ne faut pas renoncer). "A un instant donné, cette trame narrative, roman inachevé de notre vie, constitue l'essence de notre subjectivité, l'image de ce nous croyons être et de notre représentation du monde". Cependant, si ce processus fictionnel caractérise notre fonctionnement mental conscient, il opère à notre insu, comme pour M. Jourdain, qui faisait de la prose sans le vouloir et sans le savoir. Il n'est pas impossible de prendre conscience de cette couche de fictions-interprétations-croyances, mais il faut reconnaître qu'elle demeure le plus souvent bien cachée à notre introspection.

    En effet, selon Lionel Naccache, notre perception consciente ne se déroule pas en deux temps comme semble l'indiquer le site scienceseravenir.fr si j'ai bien compris (le cerveau commence par analyser de façon inconsciente les détails, puis il va en quelque sorte livrer son bilan en le rendant conscient), ce qu'on peut traduire par "un je perçois", puis "deux, j'interprète". La définition de la perception varie selon les auteurs; mais l'une de ses constances et "des fonctions principales de l'activité perceptive est de nous permettre une connaissance du monde environnant, des objets qu'il contient en dépit des variations de leurs apparences et donc de la variété des sensations qui leur correspondent. Un objet perçu est une représentation mentale évoquée par des informations sensorielles dont elle ne constitue pas le reflet précis". Pour L. Naccache, "nous percevons et interprétons de concert". C'est pour cela que nous avons une grande difficulté à deviner l'existence d'une couche fictive dans notre représentation d'un objet perçu. Dans de nombreux cas, la part de fiction qui participe à notre perception est faible, voire infime. Voir ce qu'il écrit ci-dessous:

    (Lionel NACCACHE invité des Jeudis de l’Imaginaire le jeudi 28 juin à 18h à Télécom Paris-Tech, amphithéâtre B 310): "Notre esprit/cerveau n’a de cesse de produire activement des interprétations signifiantes du monde, interprétations qui aussitôt formulées sont déjà le support de nos croyances subjectives : vous pensez et croyez d’ailleurs en ce moment même tout un ensemble de choses, à commencer par votre simple présence au monde, vous croyez être celui que vous vous représentez être, et d’une certaine façon cette croyance n’est pas infondée, puisque c’est ainsi que vous apparaissez à vos propres yeux, qui que vous soyez par ailleurs, par ailleurs dans l’esprit d’un autre ou dans aucun autre esprit. Les neurosciences cognitives, et plus particulièrement la neuropsychologie, c’est-à-dire l’étude des perturbations cognitives observées de manière reproductible chez des malades neurologiques ou psychiatriques nous ont livré en quelques décennies de formidables démonstrations de l’existence de « fictions interprétations croyances ». Ces fictions sont en effet plus simples à débusquer lorsqu’elles sont grossièrement erronées, lorsqu’elles transgressent les contraintes offertes par la réalité : un homme persuadé que son épouse qui lui fait face est un sosie ; un amnésique qui croît dur comme fer à des souvenirs produits de toutes pièces ; un hémisphère gauche déconnecté de l’hémisphère droit qui s’évertue à imaginer, – et à croire aussitôt -, à des interprétations farfelues et totalement inexactes d’un comportement piloté en réalité par cet hémisphère droit avec lequel il ne peut plus communiquer ; … Une fois découvertes par la neuropsychologie, il est plus simple de les mettre en évidence chez l’homme sain, lorsqu’elles se font plus discrètes, et qu’elles épousent les contours du réel. Nous sommes irrépressiblement narratifs : la prise de conscience d’une information s’accompagne immédiatement d’une attribution de sens assortie d’une certaine croyance subjective. Je ne qualifie pas ces représentations de fictionnelles parce qu’elles seraient systématiquement inexactes : nos fictions peuvent être parfaitement bien contraintes par le réel, mais elles n’en demeurent pas moins fictives en ce qu’elles demeurent toujours un matériau interprétatif et un objet de croyance. Nous sommes les interprètes du réel, et non ses porte-voix. Aujourd’hui, les premières pages de la physiologie cérébrale de cette narrativité consciente commencent à êtres écrites : une véritable conversation cérébrale cohérente à l’échelle du cerveau accompagne la prise de conscience subjective d’une information. De cette conversation proviennent des versions éditoriales successives du manuscrit de notre contenu mental conscient. La même information délivrée inconsciemment au sujet, – par exemple sous la forme d’une image subliminale -, peut faire l’objet de riches traitements mentaux et même de certaines interprétations, mais ces représentations inconscientes sont en général évanescentes, – elles disparaissent en quelques dixièmes de secondes, tout en pouvant laisser des traces -, et elles demeurent confinées à des zones limitées du cerveau sans faire l’objet de cette ignition cérébrale qui semble être la signature neuronale de l'accès conscient"

     

    Comment pouvons-nous prendre conscience de cette couche de fictions? La réflexion philosophique peut nous y aider. Une première voie, avec Kant, on commence par distinguer le "phénomène" (L’effet produit par un objet sur la capacité de représentation, dans la mesure où nous sommes affectés par lui, est une sensation. L’intuition qui se rapporte à l’objet à travers une sensation s’appelle empirique. L’objet indéterminé d’une intuition empirique s’appelle phénomène. C'est la chose qui nous apparaît à l'esprit et qui fait référence à ce qui est connaissable) et le "noumène" (terme employé à l'origine par Platon pour désigner les « Idées », c'est-à-dire la réalité intelligible (par opposition au monde sensible), accessible à la connaissance rationnelle. Au contraire, chez Kant, auquel le terme de « noumène » renvoie le plus souvent, il s'agit de tout ce qui existe et que la sensibilité ne peut atteindre, restreignant par là les prétentions de la raison quant à la connaissance. « Noumène » est parfois considéré comme synonyme de chose en soi, faisant référence aux faits tels qu'ils sont absolument et en eux-mêmes et qui réside dans le monde extérieur, par opposition au terme de phénomène, faisant référence à ce qui est connaissable). Cette voie est empruntée par les courants de la phénoménologie, avec la conscience selon Husserl ou Lévinas.

    Une seconde voie est celle de la neuropsychologie comme l'a expliqué Lionel Naccache dans l'encadré au paragraphe précédent. Et ces interprétations signifiantes, ces fictions-interprétations-croyances, "une fois découvertes par la neuropsychologie, il est plus simple de les mettre en évidence chez l’homme sain, lorsqu’elles se font plus discrètes, et qu’elles épousent les contours du réel".

     

    1-2) Neuroscience-fiction.

         1-2-1) Comme on vient de le voir, l'étude de malades neurologiques a joué un rôle fondamental pour découvrir cette couche de fiction dans nos interprétations signifiantes du monde. Chez certains patients, on peut observer, souvent sous forme caricaturale, les œuvres de composition originale de cette couche de fictions-interprétations-croyances. En étudiant comment ces malades élaborent leur "connaissance" à partir des "informations" qui leur sont soumises, on peut prendre conscience de la distance (irréductible, le pense Lionel Naccache) qui sépare l'information objective de la connaissance subjective. En effet, confrontés à la même information, leur construction consciente se distingue pathologiquement de la notre nous qui ne sommes pas affectés par les mêmes lésions cérébrales. Cela nous permet de comprendre que la couche de fictions existe et qu'elle est à l'origine d'interprétations grossièrement erronées. En poursuivant lucidement ce raisonnement, on peut franchir une étape et constater que cette couche de fictions doit également exister chez nous, puisque nos interprétations, même si elles se distinguent des aberrations ou des interprétations farfelues ou totalement inexactes, n'en demeurent pas moins elles aussi des interprétations! Elles restent des interprétations, même si nous en partageons la plupart du temps les grandes lignes avec nos voisins. Ainsi, chez un sujet neurologiquement sain, les mécanismes de construction de ces schémas fictifs sur lesquels le réel opère sont très souvent indistinguables de celles que les autres humains élaborent lorsqu'ils sont soumis à la même situation. C"est cet imaginaire qui colore chacune de nos pensées conscientes, irrépressible activité fictionnelle que nous accréditons avec toute la force du "JE".

         1-2-2-) Le reste de ce chapitre neurosciences-fiction est consacré à la description de ces sanyètes qui dévoilent et mettent en évidence les fictions-interprétations-croyances qui sont beaucoup plus difficiles à déceler chez des individus qui n'ont pas ces lésions cérébrales, lésions qui ont compromis le déroulement habituel de leur vie mentale. Tous ces malades vont rencontrer des situations curieuses pour lesquelles leur cerveau les soumet à des informations contradictoires les unes avec les autres. Mais, au lieu de prendre en compte la nature pathologique de ces informations, et de dire: "c'est absurde! il y a un problème! je suis malade", ces personnes vont utiliser ces ingrédients, a priori incompatibles entre eux; pour imaginer une nouvelle fiction, riche d'une nouvelle signification, qui malgré son caractère irréaliste, saura satisfaire l'irrésistible besoin de produire un sens que chacun d'entre nous peut partager avec eux. Nous trouverons évident la nature proprement fictionnelle chez ces malades de ce constituant, pourtant essentiel de notre activité mentale consciente, parce que ces fictions sont fantastiques irréalistes et en contradiction avec la réalité. Mais ces malades ne peuvent s'empêcher de les produire, sans le savoir, et surtout d'y croire, car ils sont certains de leur réalité. Si leurs fictions nous apparaissent à nous, individus indemnes de lésions cérébrales, pour ce qu'elles sont, la description des cas qui vont suivre va nous permettre, sous la conduite de L. Naccache, de découvrir comment ces malades "font connaissance" avec des informations qui leur sont "présentées" et comment celle-ci procède nécessairement de la fiction. Cela permettra de révéler la généralité de cette fonction première de fictionnalisation, qui ne nous est pas évidente au premier abord, et donc de cette fonction de création de sens et de connaissance dans tous les champs de notre vie mentale. Il peut s'agir de la perception de nos congénères et voisins ou proches, de celle de nous-mêmes, du contenu de notre mémoire ou de notre faculté à exprimer , par des fictions, le sens de nos propres actions. Et, il faut savoir, que ce que ces malades révèlent à travers ces pathologies qui perturbent leurs capacités à produire des significations, vaut également pour chacun d'entre nous, sous une forme dissimulée, moins évidente à mettre au jour: chacun d'entre nous est un créateur de fictions.

    Il faut lire les récits complets décrite dans la deuxième partie du livre. On y voit notamment comment les rationalisations, c'est-à-dire les histoires que se raconte un patient pour expliquer un déficit de perception ou d'interprétation sans l'imputer à un trouble interne qui en est la vraie cause mais qu'il ne peut observer lui-même, construisent pour ce patient un univers de connaissances très satisfaisant, mais qui repose évidemment sur une distorsion profonde de ce que nous appelons la réalité. Freud avait fait la même constatation à propos des rationalisations que dans certaines névroses et psychoses le malade invente pour la plus grande gloire de son moi. On sait que dans les rêves, chacun d'entre nous fait de même à tous moments et à tous propos, sans que cela, en principe, ne perturbe la bonne qualité de notre jugement lorsque nous nous réveillons.

    "Ces exemples tirés de la clinique permettent à l'auteur de revenir sur la définition de l'acte de connaissance. Cet acte met en scène trois unités, le sujet X tel qu'il était et se représentait à lui-même avant de connaître l'objet Y, cet objet Y tel qu'il existe dans le monde extérieur au sujet et enfin le sujet X', le sujet tel qu'il est devenu après avoir assimilé l'objet Y. Les objets de connaissance sont multiples, mais tous modifient en le réorganisant le sujet qui s'en laisse pénétrer et quasiment coloniser. Si l'on veut tenter de comprendre le monde extérieur générant les objets de connaissance qui circulent à son propos, il ne faut pas se limiter à analyser les informations brutes en émanant, mais les sujets et plus précisément, dans le champ de la conscience, les "Je" de ces sujets qui reprennent et interprètent ces informations, en les présentant comme participant à un processus objectif de connaissance. Les sujets subissent en recueillant ces informations des transformations plus ou moins profondes qui se traduisent par des stratégies destinées à protéger ou renforcer leurs Je. Dans certains cas, ces informations leur semblent si dangereuses pour la salubrité de ces Je qu'ils les nient purement et simplement. C'est un déni de réalité, que nous pourrions illustrer par le fameux déni de grossesse dont on a fait mention récemment dans la presse3)

    Voyons un résumé succinct de tous ces récits:
    - Un sosie qui s'impose! ...Ici, devant le visage de sa femme, le malade a un sentiment de familiarité, mais ne va pas procéder à une analyse cartésienne qui montrerait son trouble qui pourrait le mener à se poser les bonnes questions... Il va adopter un autre comportement. Il va imaginer et croire avec conviction que la personne qui lui fait face et qui ressemble comme deux gouttes d'eau à à son épouse, est un sosie, imposteur qui a emprunté l'apparence physique de sa femme. Cette illusion, ou "délire de sosies" qui s'appelle le 
    syndrome de Capgras amène souvent des situations rocambolesques.

    Vertige des fictions que nos esprits ne cessent de produire, cela illustre la distinction fondamentale entre l'information et la connaissance. Présenter un visage humain à un sujet n'est pas une simple transmission d'informations, mais correspond à une élaboration subjective qui utilise le socle fictif et interprétatif du sujet qui perçoit, et son système de croyances. La connaissance, celle que le malade élabore ici à partir des informations présentes sur le visage, est irréductible à ces informations. Une personne saine ne voit pas de sosie dans le visage de sa femme ou de son mari. Ce que nous révèle ce cas clinique, c'est que la simple présentation d'un visage participe au flux ininterrompu des informations qui alimentent nos mécanismes interprétatifs et de fiction. Simplement, lorsque ces processus ne conduisent pas à la conviction inébranlable et délirante du sosie, il est plus difficile de deviner leur présence.

    -Un homme à trois mains? Pourquoi pas! D'autres malades, encore plus nombreux, sont atteints du syndrome neuropsychologique qualifié d'héminégligence ou négligence gauche, consécutif à une lésion du lobe pariétal droit par exemple après un AVC, tel que je l'ai moi-même vécu en 2009, de façon partielle qui m'a laissé peu de séquelles. Pour moi, c'était la moitié droit de mon propre corps que je voyais, mais qui ne m'appartenait plus car je ne pouvais agir sur mon bras. Mais pour les malades plus gravement atteints d'anosognosie, ils n'ont pas conscience de leur paralysie et ne reconnaissant pas la moitié de leur corps et se livrent parfois à de formidables discours confabulatoires lorsqu'ils sont confrontés à leur hémiplégie par le médecin qui les examine. Il ira jusqu'à affirmer que la main paralysée que le médecin déplace n'est pas la sienne, car il possède une main gauche (ou droite) indemne. Et en prenant entre ses deux mains, il pourra aller jusqu'à dire : "Vous avez peut-être trois mains, en tout cas, ce n'est pas la mienne". La patient perçoit sa main gauche, mais son asomatognosie l'empêche de l'identifier comme étant la sienne. Il sait recueillir les données du réel, mais au lieu d'en dresser un état objectif; il les intègre dans une fiction-interprétation-croyance plutôt singulière. La puissance de la fiction structure ici la conscience en lui imposant un contenu qui arrive à faire vaciller des représentations qui pourtant paraissent inébranlables. La question pertinente n'est pas de savoir quelle est l'interprétation la plus correcte, mais pourquoi la même situation peut donner lieu à des croyances si distinctes? C'est parce que la connaissance que chacun élabore à partir de ce jeu d'informations met en oeuvre son propre système de fictions-interprétations-croyances. Lui et moi ne cessons d'interpréter, de fictionnaliser et de croire. Et simplement, cette couche de fiction est plus aisément visible et caricaturale chez le malade négligent; et donc plus facile à identifier que chez un individu en bonne santé neurologique.

    -Oublier, c'est aussi confabuler! Dans l'amnésie de Korsakov, souvent liée à certaines complications cérébrales de l'alcoolisme chronique, on rencontre un phénomène aussi spectaculaire. Le patient ne garde aucun souvenir conscient de votre passage dans sa chambre par exemple et vous accueille à chaque fois que vous y entrez comme si c'était votre première visite. Il n'a pas conscience de son amnésie et si on l'interroge, il présente un discours confabulatoire qui révèle, là encore, l'activité irrépressible de notre (humain) système de fictions-interprétations-croyances. Les patients concernés ne mentent pas et ne se moquent pas de leurs médecins et interlocuteurs. Le contenu de leurs confabulations est réaliste et correspond au télescopage de bribes de souvenirs anciens avec des éléments qui leur sont associés dans le contexte du malade.

    De très nombreuses situations ont été étudiées, dans lesquelles des scénarios fictifs ont été accrédités de toute bonne foi. La nature fictionnelle de nos constructions conscientes y était aisée à reconnaître parce que dans tous les exemples de "faux souvenirs", ces fictions étaient fausses. Mais elle ne change pas de nature lorsqu'elle est exacte: nous donnons sens aux choses qui affectent notre esprit, nous les interprétons, nous les accréditons et nous y croyons. Ce n'est pas parce que nos croyances épousent parfois les contours du réel et s'approchent de la réalité objective qu'elles cessent de d'être ce qu'elles sont avant tout: des croyances, produits de nos pensées conscientes.

    -Quand j'explique avec assurance les raisons de ce que j'ignore absolument! Les travaux de Roger Sperry et Michael Gazzaniga et la démonstration clinique la plus forte du caractère fictionnel de notre réalité psychiques (années 1970). C'est en étudiant et essayant de traiter des malades atteints d'épilepsie sévère que ces chercheurs ont été amenés à opérer les malades en pratiquant la séparation des deux hémisphères du cerveau par une section chirurgicale des voies nerveuses qui les font normalement communiquer. Chez de tels malades au "cerveau divisé" ou split brain, L'objectif est de réduire le retentissement de leurs crises d'épilepsie quotidiennes. Ce sont des sortes de décharges neuronales au cours desquelles le malade perd connaissance et présente des convulsions des quatre membres. C'est pour éviter l'extension de la crise et sa généralisation au cerveau entier, qui commence à un endroit localisé, que les deux chercheurs interrompent le lien qui unit les deux hémisphères. Cette technique est aujourd'hui de moins en moins réalisée du fait des progrès des thérapeutiques chirurgicales et pharmacologiques, mais aussi de la mise en évidence des conséquences cognitives d'une déconnexion entre les deux hémisphères.

    Pour ces études, Sperry et Gazzaniga ont reçu le prix Nobel de médecine en 1981. Ils ont considérablement précisé la spécialisation hémisphérique. Chez un sujet sain et non "splité", les deux hémisphères sont réunis dans un conscient unifié. Chez les malades de Sperry et Gazzaniga, cette unité semble brisée (au moins partiellement): "ces patients subissaient une sorte de dissociation de la conscience : ils pouvaient par exemple manipuler un objet dans leur main gauche en se montrant incapables de le nommer. La raison ? Chaque hémisphère du cerveau commande la partie du corps opposée. Ainsi, chez les patients split brain, l’information partant de la main gauche vers l’hémisphère droit ne peut ensuite parvenir à la « conscience » de l’hémisphère gauche, siège du langage, d’où l’impossibilité de désigner verbalement l’objet". L'un des symptômes de cette condition neurologique porte le nom d'apraxie dite diagonistique. On observe chez ces patients des plans d'action totalement contradictoires: le malade ouvre la porte de son réfrigérateur d'une main (pilotée par l'hémisphère situé du côté opposé), tandis que l'autre la referme violemment. Le même individu construit deux plans d'action intentionnels en compétition. Gazzaniga a révélé le rôle fondamental des mécanismes d'interprétation fictionnelle dans notre fonctionnement conscient et a élaboré des situations expérimentales où un hémisphère devait réaliser un comportement précis et ensuite il demandait à l'autre hémisphère l'explication de ce comportement dont il ignorait l'origine véritable. Le chercheur a découvert qui si on soumet l'hémisphère interrogé à d'insoluble énigmes, il répond très souvent en inventant une explication imaginaire fictive à laquelle il croit en toute bonne foi (voir Gazzaniga, Ledoux et Wilson 1977). Dans ces interactions complexes chez ces patients au cerveau "splité", (pages 89 à 92), on voit que l'hémisphère gauche, doté de facultés du langage, ne cesse d'élaborer consciemment des scénarios qui donnent sens au réel. Cette "réalité psychique", qui est en discordance manifeste avec la réalité objective que constate l'expérimentateur, est ici encore ce qui fait véritablement sens pour le patient, mais c'est une construction mentale fictive.

    - Quand j'explique avec assurance les raisons qui m'ont conduit à prendre la décision opposée à celle que j'ai prise. Les cas que l'on vine de voir nous mettent souvent sous les yeux et de manière caricaturale, une propriété fondamentale de l'esprit, que sinon on a bien du mal à découvrir et à imaginer parce que peut-être on pense ne pas y être soumis. Cela s'applique en réalité à chacun d'entre nous, au-delà des cadres spectaculaires de la pathologie neurologique ou psychiatrique. Il existe un mouvement permanent de va-et-vient entre les malades et les sujets "sains" que nous sommes ou plutôt que nous croyons être. Ces liens qui rapprochent l'homme malade de ceux qui ne le sont pas sont une forme d'humanisme. Ce que nous apprennent les patients "split brain" vaut pour chacun d'entre nous. Petter Johansson [vidéo]: "psychologue expérimental, étudie la cécité de choix - un phénomène dans lequel nous nous convainquons que nous obtenons ce que nous voulons, même lorsque nous ne le sommes pas. Dans un discours révélateur, il partage des expériences (conçues en collaboration avec des magiciens!) Qui visent à répondre à la question: pourquoi faisons-nous ce que nous faisons? Les résultats ont de grandes implications sur la nature de la connaissance de soi et sur la manière dont nous réagissons face à la manipulation. Vous ne vous connaissez peut-être pas aussi bien que vous le pensez". Il a fourni une démonstration expérimentale de la dimension interprétatrice et fabulatrice de notre conscience.

    A chaque essai, 2 photographies de visages féminins sont présentées à un sujet de sexe masculin, puis elles sont retournées face contre la table. Le sujet doit désigner du doigt la fille qu'il trouve la plus séduisante. L'expérimentateur retourne la carte choisie par le sujet et lui demande d'expliquer son choix (il a donc la photo sous les yeux). Après de nombreux essais survient un essai critique avec un petit tour de passe-passe. Le sujet vient de désigner la photo qui l'attire le plus (la fille A par exemple). L'expérimentateur (prestidigitateur), à l'insu du sujet, glisse alors dans sa manche la photo non choisie (la fille B) et demande au sujet d'expliquer pourquoi il a choisi cette fille, c'est à dire pourquoi il a choisi la fille B alors qu'il avait choisi en réalité la fille A. Dans la majorité des cas le sujet testé s'évertue à expliquer ce qui l'a conduit à choisir la fille B, ce qui correspond à l'inverse de ce qu'il a réellement choisi. Tous ces résultats ne s'expliquent pas par un simple effet de soumission à l'expérimentateur ni par un problème de mémoire ou de motivation, mais tout comme pour le cas du "split-brain" les expérimentateurs ont réussi à débusquer, à travers ce contexte, de nouvelles manifestations de la machine à interpréter, à croire et fabuler de notre activité mentale consciente.

    -L'histoire à nulle autre pareille de Monsieur G que Lionel Naccache narre en pages 94 à 98 est tout aussi incroyable et possède un sens similaire.

     

    2) Nous interprétons et nous croyons, donc nous sommes.

    -L'aspect par lequel nous différons des patients neurologiques que nous venons de rencontrer au travers des descriptions de Lionel Naccache réside moins dans la faculté mentale d'interprétation consciente, car nous la partageons intégralement avec eux, mais dans la capacité à intégrer les autres données du monde réel afin de corriger en permanence ces états mentaux. Là où les malades neurologiques échouent, nous parvenons sans peine à mettre à jour nos fictions afin qu'elles épousent au mieux les contours du réel, ce qui rend, pour nous, plus difficile de voir le caractère fictionnel de ces créations conscientes et de mettre au jour la part d'interprétation, qui est toujours présente au sein de nos pensées conscientes, sans doute parce que la distance qui les sépare du réel est alors très faible. Lorsque cette distance est plus lâche, il est plus facile de percevoir la statut de fiction-croyance de nos pensées. C'est le cas lorsque nous exposons nos croyances (religieuses, mystiques; sociales ou interpersonnelles). C'est aussi le cas lorsque nous élaborons des interprétations de l'univers qui lui apportent de la causalité, en croyant à ces interprétations alors que la réalité extérieure ne nous envoie pas d'information décisives qui permettent de le valider ou de les invalider. Si plutôt que de douter ou de nuancer nos opinions, nous continuons continuons à leur accorder une croyance, souvent forte. Les malades nous aident à mettre au jour cette dimension de notre condition humaine, dimension qui fait de nous des êtres qui ont recours de manière irrépressible à la fiction, à l'interprétation et à la croyance.

    Alors, que signifie l'exclamation pourtant commune: "il vient de se produire une chose incroyable!", sinon que c'est quelque chose à laquelle il est difficile de croire. Mais qui nous demande de croire aux choses que l'on vit ou que l'on pense? Pourquoi s'étonner ou remarquer que quelque chose est incroyable et créer un qualificatif pour caractériser cet état? Peut être parce que c'est ainsi qu'on réussit à exister en nous évertuant à ne pas faire grand chose d'autre que de produire du sens auquel nous parvenons à croire.

    -Mais quel lien cela a t-il avec la connaissance, le sujet de départ du livre? En philosophie, "la connaissance est l'état de celui qui connaît ou sait quelque chose. On appelle aussi « connaissance » les choses connues elles-mêmes, et par extension les choses qui sont tenues pour des connaissances par un individu ou une société donnée". Donc la connaissance implique le sujet, elle implique chacun des sujets que nous sommes. Et c'est un rouage essentiels de la condition humaine auquel ce détour neurologique permet d'accéder. Nous sommes des êtres pétris de fictions et de croyances. Dès que nous prenons conscience d'une information, que nous faisons connaissance avec elle en prenant connaissance d'elle, nous l'interprétons et l'incorporons dans des constructions fictionnelles. C'est la couche des représentations que Kant et Husserl  implique le sujet, elle implique chacun des sujets que nous sommes. Et c'est un rouage essentiels de la condition humaine auquel ce détour neurologique permet d'accéder. Nous sommes des êtres pétris de fictions et de croyances. Dès que nous prenons conscience d'une information, que nous faisons connaissance avec elle en prenant connaissance d'elle, nous l'interprétons et l'incorporons dans des constructions fictionnelles. C'est la couche des représentations que Kant et Husserl et en conséquence, "nous ne voyons jamais directement la réalité mais uniquement et toujours des représentations projetées sur l’écran de nos consciences. Et ces projections sont perturbées et influencées par un nombre d’éléments et de faits incalculables : souvenirs, émotions, affectivité, opinions, préjugés, milieu social, éducation…, auxquels on peut rajouter l’imperfection de chacun des sens censés nous apporter des informations." C'est aussi la vision de Schopenhauer. Cette première étape de la construction d'une représentation opère très souvent de façon non consciente. La prise de conscience correspond, en règle générale à un deuxième temps. Par exemple, le site lecerveau.mcgill.ca explique:  dans la perception visuelle, "Qu’observe-t-on alors dans le cerveau lorsque l’on projette un mot brièvement ou plus longuement ? Que le mot soit perçu ou pas, les 275 premières millisecondes (ms) sont identiques : seul le cortex visuel est activé. Cela correspond bien au traitement modulaire bien connu du cortex visuel. Mais par la suite, selon que le mot est rapporté comme ayant été vu consciemment ou non, l’activité cérébrale diffère (voir l'animation ci-contre).quand le mot est vu consciemment, l’activation est largement amplifiée et réverbérée d’abord à travers le cortex frontal (dès 275 ms), ensuite préfrontal (dès 300 ms), cingulaire antérieur (dès 430 ms) et finalement pariétal (dès 575 ms). Mais lorsque le mot n’est pas vu consciemment, l’activation demeure localisée dans le cortex visuel et s’éteint progressivement jusqu’à ce que toute activité cesse à partir de 300 ms. Pour qu’il y ait conscience, il semble donc qu’il doit y avoir échange ou résonance entre différentes régions du cerveau".

    En conclusion, l'étape de la prise de conscience n'est pas un accès pur et direct "à la chose" en elle-même (la chose en soi), puisque toute prise de conscience incorpore nécessairement et systématiquement une couche interprétative. Donc toute réflexion sur la connaissance et sur le sujet qui en est l'acteur, doit prendre en compte cette dimension de la fiction dans laquelle s'enracine notre subjectivité. Pas de connaissance sans sujet, donc sans système de fictions-interprétations-croyances!


    3) Conclusion de cette deuxième partie "Une histoire de Neuroscience-fiction: au sujet de la connaissance.

    liens: https://www.persee.fr/doc/phlou_0035-3841_2004_num_102_3_7564Les actes de connaissance. La pragmatique de la cognition et le problème épistémique de la justification

    https://www.etudier.com/dissertations/l'Interpr%C3%A9tation-Acte-De-Connaissance-Ou-De/338404.htmll'interprétation acte de connaissance ou de volonté?

    http://www.philocours.com/new/cours/pages/cours-conscience.htmlhttps://www.persee.fr/doc/lgge_0458-726x_1991_num_25_103_1606Objets et discours de représentation                

    https://www.matierevolution.fr/spip.php?article1524Nancy Huston développe l’idée d’une fonction cérébrale spécifiquement humaine : la "capacité fabulatrice" ! Comme elle l’écrit dans "L’espèce fabulatrice".

         3-1) Avec Lionel Naccache, on peut maintenant essayer de donner une définition générale de la connaissance à la lumière de ce que nous ont appris les neurosciences de l'esprit sain et de l'homme malade. L'acte de connaissance implique un sujet connaissant et un objet de connaissance. Le sujet fait connaissance de l'objet visé à travers la saisie des d'informations qui sont extraites de l'ob-jet [du latin objectum, est étymologiquement ce qui est jeté devant nos yeux ou plus généralement notre conscience. Il s'agit donc de tout ce que nous pouvons percevoir, penser ou vouloir. En ce sens, tout ce qui existe peut être dit objet, du moment qu'on y pense, y compris une personne qui est "objet d'amour". Un objet est ainsi ce qui est pensé par opposition au sujet qui est ce qui pense. L'objet ne doit pas être confondu avec la chose qui en latin se dit res, c'est-à-dire ce qui existe par soi-même, qu'on y pense ou pas]. Une fois saisies, ces informations propres à l'objet sont assimilées par le sujet qui, comme on l'a vu, en construit une représentation. La connaissance appartient donc à la classe des phénomènes, qui relient un sujet et un objet à travers une relation intentionnelle, avec intentionnalité au sens phénoménologique de Husserl (dont il dit lui-même:  « ce qui devient problématique, c’est la possibilité, pour la connaissance, d’atteindre un objet qui pourtant est en soi-même ce qu’il est »..  Donc la connaissance est toujours connaissance de quelque chose, une visée vers vers un objet de savoir initialement extérieur au contenu immédiat (1) La conscience immédiate : ce qui accompagne tous nos actes, nos perceptions, etc (sorte de présence du monde, à laquelle nous faisons attention : nous ne sommes alors pas "immergés" dans le monde, confondus avec) Ici l’exemple serait : percevoir un objet; se rendre compte qu’un objet est devant nous; et même, c’est ici qu’on rangerait "il a perdu conscience" (ie : il n’est plus "éveillé") de la conscience du sujet.

    L'acte de connaître met en scène trois entités:-le sujet X tel qu'il existait et se représentait à lui-même avant de connaître l'objet Y-L'objet Y qui est le support de cet acte de connaissance.-Le sujet X' qui est le sujet ayant absorbé l'objet Y, c'est à dire le sujet ayant mis à jour ses représentations mentales à la lumière des nouvelles connaissances acquises. 

    Le cadre des champs qui peuvent faire l'objet d'un acte de connaissance est extrêmement varié ( scientifique, artistique, amoureux, religieux, sportif, social etc.). Le point commun à chacune de ses modalité est la transformation du sujet. Etant donné que l'objet peut également être un individu ou un groupe de sujets qui pourront tirer de cette rencontre une expérience de connaissance, cela introduit une récursivité intersubjective et donc une richesse vertigineuse dans cette forme de connaissance qui implique un ou les autres sujets que moi. Mais entre les deux états X et X', qu'est-ce qui va être transformé chez le sujet? L'enjeu de la connaissance est d'abord l'appropriation par le sujet d'informations considérées en elles-mêmes, mais aussi sa possibilité de vivre une transformation, parfois radicale, de son identité. Connaître, c'est donc mettre en jeu notre ensemble de croyances, des plus profondes aux plus superficielles, et prendre le risque de les voir subir des modifications que nous n'avions pas pu (totalement) anticiper et découvrir ce que nous ne connaissions pas encore. Cela peut être une source de joie, de liberté, d'émancipation et d'épanouissement, mais aussi un chemin vers la tragédie et la souffrance. L'expérience de connaissance a donc bien un objet et un contenu objectif, mais n'est comparable avec un téléchargement informatique ou à l'activation d'une mémoire vive, mais elle "insiste" sur la composante qu'on a souvent tendance à négliger, le sujet.qui, dans cette acte se transforme en enrichissement ou en appauvrissement. 

    La connaissance est donc autant une histoire de "JE", une histoire de sujets, que la préoccupation et l'étude des objets qui la constituent ou pour les sources d'information qui sauront nourrir nos expériences. Au sujet de la connaissance est l'acteur de la connaissance!  La connaissance expose l'individu à des métamorphoses, parfois imprévisibles, de son identité. Mais il serait illusoire d'imaginer qu'un sujet puisse figer un fois pour toutes son "identité", ce serait décider de ne plus jamais connaître. L'identité est un processus vivant. Morte, elle s'appelle momie, zombie, cadavre. On peut maintenant donner un sens contemporain à ce concept de "poison vital", la connaissance, qui hante l'humanité depuis des millénaires. Rappelons ici qu'en biologie, l'équilibre ne caractérise pas la vie, mais la mort. L'art de la lecture est "est une mise en abyme de la connaissance qui participe elle-même à la réhabilitation du sujet" puisqu'elle affirme que lire n'est pas une opération passive, vierge de sujet, mais une appropriation active, par le lecteur, d'un discours initialement extérieur auquel il confère de nouvelles interprétations. 

    De plus, rappelle Lionnel Naccache, le même contenu informationnel et propositionnel délivré dans deux contextes cognitifs différents de plusieurs siècles conserve un même contenu objectif intrinsèque, mais ne donne pas lieu à la même expérience subjective, ni aux mêmes bouleversements des systèmes de croyance des individus connaissants. Rappelons-nous le  regard  que portait Galilée sur la connaissance de son époque concernant la situation de la Terre dans l'univers, sa propre connaissance et son procès. De nos jours, un enfant de 7 ans n'aurait aucune difficulté à à choisir la réponse: "la Terre tourne autour du soleil" si la question lui est posée par exemple dans une fiche d'un livre pour enfants tel "Les incollables". 
    La relation maître à discipleC'est sans doute une des meilleures manières de faire l'expérience de cette "couche interprétative" et de cette dimension subjective indissociable de la connaissance qui a été évoquée à la fin du chapitre 2. Ce mode de relation intersubjective est éprouvé depuis la nuit des temps pour assurer la pérennité et la qualité de la transmission de la connaissance. Elle met en lumière la transformations des 
    systèmes de fictions-interprétations-croyances, aussi bien celle du disciple que celle du maître, suijet lui-même qui fait face à un autre sujet. Le maître offre au disciple ses propres mises en forme fictionnelles des informations qu'il transmet et il évolue lui-même au fil de la transmission. Et de son côté, le disciple reçoit, mais doit aussi s'approprier ces connaissances et les faire siennes, et donc prendre suffisamment de recul pour les faire exister en lui-même et les incorporer à ses propres constructions fictionnelles qui, à leur tour, seront modifiées par cette expérience. La connaissance reçue et construite par le disciple peut alors être renvoyée vers le maître qui la découvrira à son tour. Expérience sans fin donc, qui a été célébrée par George Steiner! "C'est une relation riche, complexe, ambiguë, ambivalente, composée de séduction et de distance, d'amour et de haine, de souffrance et de joie"

    Le sujet et sa conscience réflexive. C'est le regard que le sujet se porte sur lui-même. Elle n'échappe pas à ce principe général qui semble définir la conscience humaine. C'est ici encore une construction subjective, mais son objet n'est autre que le sujet lui-même. Autrement dit: le "JE" est une fiction! J'existe, bien sûr, mais comme une fiction, produit du système de fictions-interprétations-croyances qui m'habite. C'est une croyance à laquelle nous ne pouvons pas ne pas croire. Le "Je" se construit dans toutes les révisions que ne cesse de lui apporter notre irrépressible activité fabulatrice (le moi?). 

    Les risques de la connaissance. 

    Le premier risque peut s'appeler la mue du "JE". La révision de notre système de fictions-interprétations-croyances peut être si radicale que le "JE" qui en ressort peut ne plus rien avoir à partager avec celui que nous étions jusqu'à présent et il peut devenir un autre, étranger à celui qu'il était. On assiste alors à la disparition du "JE" initial à travers ce processus de métamorphose. Comment alors restaurer une continuité dans cette chaîne des "JE" successifs qui, à force de ne plus être tout à fait les mêmes courent le risque de n'être plus personne? C'est peut-être ce qui participe en partie des phénomènes actuellement en recrudescence de "crispation identitaire", résistances à l'ouverture vers l'inconnu et qui est vécue comme une menace identitaire. Jean-Claude Kaufmann pointe trois grandes erreurs sur l’identité: "Première erreur: Croire que l’identité renvoie à l’histoire, à notre mémoire, à nos racines. En fait, c’est exactement le contraire. «C’est un travail de l’individu, explique le sociologue. L’identité renvoie à une subjectivité en vue de produire du sens» et résulte des multiples choix que l’on fait à chaque instant [...]". De ces erreurs et confusions peuvent naître «l’engrenage pervers qui renforce les intégrismes identitaires». 

    Le deuxième risque, plus périlleux encore, constitue, pour Lionel Naccache, l'étape ultime de la connaissance, l'épreuve finale qui seule autorise, ou non, la poursuite de l'aventure. C'est la connaissance qui rend lucide le sujet sur son propre compte et qui lui permet de réaliser, une fois pour toutes, que le "JE" est une fiction. Il existe, bien sûr, mais pas comme existent les objets qui apparaissent autour de lui. Il n'y a nul autre point d'ancrage à la réalité dans ce monde de "JE", que celui de leur existence fictionnelle. L'épreuve ultime de la connaissance, c'est se reconnaître soi-même comme une fiction, s'aimer et s'admettre comme tel, au risque sinon de sombrer, sombrer dans le néant qui reprend ses droits dès que le sens s'absente, dès que l'interprétation et la fiction faiblissent et n'osent plus faire entendre leur voix. C'est le "connaît-toi toi-même" socratique, prise de conscience première, périlleuse, mais indispensable!

    3-2) Néant der Tale, ou le récit du  néant .

     

     

     

    Civilisation avancée 10 000 ans avant J C.

     

     

     

     

    Cette menace existentielle possède une dimension universelle qui permet de donner sens à l'héritage mythologique du "poison vital" que nous avons trouvé dans mes articles 1 et 2. C'est une des clés dont nous sommes héritiers depuis les origines de l'histoire humaine

    dans laquelle nos pensées s'inscrivent dans des textes. Plus ( ? ) de trois mille ans de culture (occidentale?) Lionel Naccache a, dans le dernier chapitre de son livre, imaginé un mythe contemporain de la connaissance partant d'une hypothèse dépourvue de vérité historique, scientifique ou même préhistorique: Néant der Tale, ou le récit du  néant: et si nous étions les héritiers d'hominidés plus aptes que nous (les auto-proclamés homo-sapiens) à l'exercice de la connaissance? Ces hominidés, qui auraient disparu du fait même du péril de la connaissance pourraient être les contemporains de nos ancêtres l'homme de Néandertal qui a vécu en Europe et au proche et moyen-orient. Apparu il y a environ 300 000 ans,  il disparut  en quelques millénaires il y a environ 30 000 ans avec l'arrivée des premiers homo-sapiens en Europe. Néandertal disposait d'un volume endocrânien supérieur au notre (1300 - 1 700 cm3) contre (1300 - 1 500 cm3).Il semble que les similitudes de comportements de subsistance entre les Néanderthaliens et les Hommes modernes soient plus importantes que les différences.Ils respectaient des rites funéraires, maîtrisaient la taille des pierres et disposaient probablement du langage et la culture et l'art étaient certainement développées dans leur société. Le mystère de la soudaine disparition de la civilisation Néandertalienne demeure entier, même si de nombreux scénarios ont été envisagés, dont l'extinction par hybridation.

    Pourquoi ne pas envisager, avec Lionel Naccache, une hypothèse que peu de personnes imaginent: l'homme de Néandertal, ou l'homme qui en savait trop? Ce serait la première victime de la connaissance, de la connaissance de soi qui, poussée à l'extrême, anéantirait tout espoir de trouver une signification dans l'existence. Néandertal aurait-il été victime d'un suicide collectif (philosophique) inscrit dans la pensée culturelle de cette espèce? Aurait-il attendu, (par conscience existentielle !), durant de nombreux millénaires, la rencontre avec un hominidé plus stupide que lui, cet homme à qui il pourrait transmettre une partie seulement de son savoir, celle qui lui permettrait de survivre, tout en lui chuchotant à l'oreille que connaître est "un poison vital"? Et un jour, cet homme lui apparut, venant de l'est: nous! Nous, dont les ancêtres auraient assisté à sa disparition vécue par ces hommes comme l'aboutissement ultime de la connaissance extrême. Ils auraient transmis cette menace (l'héritage empoisonné de Néandertal?) oralement durant des dizaines de milliers d'années, puis celle-ci serait alors apparue, transfigurée, sous la forme de mythes fondateurs dont nous ignorons les origines? Ainsi, nous, les "Homo Sapiens", qui sommes ignorants des origines de nos mythes, ne fûmes pas les plus sapiens d'entre les Homos.Ce mythe contemporain transculturel est le Néant der Tale, ou le récit du  néant que Lionel Naccache a fait figurer dans la quatrième et dernière partis de son livre. C'est à l'époque Moustérienne que vivait cet hominidé dont la connaissance avait atteint des limites existentielles on sans doute atteint des limites nihilistes qui l'ont amené à un suicide individuel et collectif avant de nous laisse la conduite des affaire de ce monde. Ce fut le premier "suicide philosophique" de masse de l'Histoire ou plutôt de la préhistoire. Certains d'entre eux (?) auraient décidé de nous protéger contre ce mal qui les avait détruits, le savoir, la connaissance du monde et surtout la connaissance de soi. 


    Terminons cet article et "ma lecture" de cette deuxième partie avec le commentaire de Lionel Naccache: "Nous disposons d'une réponse claire et tranchée à la question de l'actualité des menaces de la connaissance. Plus encore, nous avons proposé une explicitation de l'essence même de ces menaces, d'où il ressort que, telles les deux faces d'une médaille, la connaissance nous expose à certaines menaces du fait même qu'elle nous offre dans le même temps la possibilité unique d'enrichir notre identité".

    Alors que l'actualité en ce début 2019 pose de plus en plus de questionnements, ma lecture du livre va maintenant porter sur notre rapport actuel à la connaissance qui constitue encore une énigme, car, si la connaissance constitue un danger existentiel constitutif de son essence, pourquoi et comment sommes-nous devenus les premières générations de l'histoire de a culture occidentale à ne plus prendre conscience de la menace que représente la connaissance, alors que l' avenir de l'humanité  semble menacé?. Pourquoi et comment cette composante qui était présente à nos côtés depuis les récits bibliques et mythologiques antiques a t-elle disparu de notre discours contemporain? Sommes-nous devenus aveugles et insensibles? C'est que les "mauvaises solutions" imaginées au fil des siècles, que nous avons évoquées, ont perdu leur attrait et leur puissance, et sont aujourd'hui explicitement condamnées par les sociétés occidentales, même si certaines resurgissent trop souvent. C'étaient le cloisonnement de la connaissance, l'obscurantisme religieux, la censure politique ou la manipulation idéologique des esprits. Et maintenant nous faisons l'apologie de la connaissance comme jamais nulle société humaine ne semble l'avoir fait! Existerait-il une "mauvaise solution" contemporaine ainsi qu'un lien entre toutes ces "mauvaises solutions"? C'est ce que nous essaierons de découvrir dans mes prochains articles, qui sont "ma lecture" de la troisième partie du livre de Lionel Naccache Perdons-nous connaissance?MALAISE CONTEMPORAIN DANS LA CONNAISSANCE.

     

     

    liens:

    ,Johann Carl Fuhlrott 

    https://lejournal.cnrs.fr/articles/neandertal-le-cousin-rehabilite

    https://www.geo.fr/histoire/comment-l-homme-de-neandertal-a-pris-sa-revanche-189168:   Comment l’homme de Neandertal a pris sa revanche?

    https://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/l-hyperrealite-outil-de-controle-213621?utm_source=feedburner&utm_medium=email&utm_campaign=Feed%3A+agoravox%2FgEOF+%28AgoraVox+-+le+journal+citoyen%29L’hyperréalité, outil de contrôle des masses

     

    https://fr.wikipedia.org/wiki/Conscience: La conscience

    http://lecerveau.mcgill.ca/index.php: Le cerveau à tous les niveaux

    https://journals.openedition.org/lhomme/20782: Lionel Naccache, Le Nouvel Inconscient. Freud, Christophe Colomb des neurosciences. (Texte intégral)
    https://www.cairn.info/revue-natures-sciences-societes-2015-2-page-: La perception au fondement de la connaissance
    http://www.aline-louangvannasy.org/article-cours-la-conscience-1-la-conscience-sensible-115909827.html: LA CONSCIENCE 1 - La conscience sensible ; la perception.
    https://www.sciencesetavenir.fr/sante/cerveau-et-psy/comment-le-cerveau-elabore-t-il-la-conscience_103268: Comment le cerveau élabore-t-il la conscience ?,Par Hugo Jalinière le 13.04.2016. Le fait d'être conscient procède-t-il d'un phénomène cérébral continu ou discontinu ? Un vaste débat en neurosciences auquel des chercheurs proposent de substituer une troisième voie.
    https://www.em-consulte.com/en/article/959544: Perception consciente ou perception inconsciente : quel rapport entre perception et conscience ?
    http://www.philopsis.fr/IMG/pdf_perception_merleau-ponty_dupond.pdf: la perception chez merleau ponty
    http://www.admiroutes.asso.fr/larevue/2013/138/ LIBRE ARBITRE ET INTELLIGENCE DE L’INCONSCIENT :QU’EN PENSENT LES PSYCHANALYSTES ? Le récent ouvrage de Michaël Gazzaniga, Le libre arbitre et la science du cerveau, (2013), montre les apports possibles, 1) pour une approche plus proche de la réalité du psychisme, 2) confirme certaines hypothèses de la psychologie analytique de C.G. Jung, et 3) conduit à penser que Freud/Lacan auraient tort, notamment, sur la question cruciale de l’inconscient et de son approche trop langagière.Le libre arbitre et la science du cerveau montre les apports possibles, 1) pour une approche plus proche de la réalité du psychisme, 2) confirme certaines hypothèses de la psychologie analytique de C.G. Jung, et 3) conduit à penser que Freud/Lacan auraient tort, notamment, sur la question cruciale de l’inconscient etde son approche trop langagière. QU’EN PENSENT LES PSYCHANALYSTES ?
    http://www.jung-neuroscience.com/michael-gazzaniga/Michael Gazzaniga, neuroscientifique confirme l’expérience de Jung que l’inconscient non seulement parle, mais surtout qu’il interprète nos actions .
    https://fr.wikipedia.org/wiki/Ph%C3%A9nom%C3%A9nologie_de_la_perception: La Phénoménologie de la Perception (1945), œuvre majeure de philosophe Maurice Merleau-Ponty, l'un des fondateurs de la phénoménologie. Dans l'esprit des recherches d'Edmund Husserl, le projet de Merleau-Ponty entreprend de révéler la structure du phénomène de la perception. Traditionnellement la perception est définie comme l'activité de l'esprit par laquelle un sujet prend conscience d'objets et de propriétés présents dans son environnement sur le fondement d'informations délivrées par les sens1Maurice Merleau-Ponty s'est attaché à montrer depuis une précédente œuvre qui date de 1942 La Structure du comportement que l'idée de perception est entachée d'un certain nombre de préjugés qui masquent la vérité. Dans ces deux œuvres l'auteur chercherait à penser selon Pascal Dupond2 ce qu'il appelle un premier « contact naïf avec le monde » qui de fait précéderait toute possibilité de perception. Croire que la perception peut nous dévoiler la vérité sur l'existence et la vérité des choses en soi, c'est prendre appui sur un ensemble informulé de préjugés.
    http://filosofi.unblog.fr/2007/03/08/la-perception/: philosophie au 21e siècle: LA PERCEPTION INTRODUCTION I) LA PERCEPTION INTROUVABLE : LES PREJUGES CLASSIQUE A) SENSATION ET PERCEPTION : L’APPROCHE SCIENTIFIQUE CLASSIQUE B) L’APPROCHE EMPIRISTE (texte de Hume) C) L’APPROCHE INTELLECTUALISTE (Descartes) II) LA PHENOMENOLOGIE DE LA PERCEPTION A) LA PSYCHOLOGIE DE LA FORME B) LE CORPS ET LA PERCEPTION (texte de Merleau-Ponty) C) LA METHODE PHENOMENOLOGIQUE D) MERLEAU-PONTY ET LE RETOUR A L’EXPERIENCE DIRECTE
    https://www.pseudo-sciences.org/spip.php?article2316: Comment se repérer entre fiction et réalité ?
    https://www.nonfiction.fr/article-6564-entre-le-cerveau-et-la-conscience-le-temps.htm: Entre le cerveau et la conscience : le temps (L'esprit au-delà des neurones : une exploration de la conscience et de la liberté par benjamin libet)
    http://www.charlatans.info/droitetgauche.shtml: Cerveau droit, cerveau gauche : le mythe et...le charlatanisme
    https://www.matierevolution.fr/spip.php?article1510: d'où vient l'intelligence humaine La dialectique auto-organisée de l’individu et de la collectivité, du corps et du cerveau, des émotions et de la pensée, de l’inconscient et du conscient, de la logique et de l’imaginaire, du lent et du rapide
    http://www.admiroutes.asso.fr/larevue/2010/103/naccache.htm#na3: Lionel Naccache s'interroge sur le sens que peut prendre ce concept dans une société telle que la nôtre. Elle se proclame en effet société de la connaissance et dans le même temps, se définit comme une société de l'information. Ces deux qualificatifs sont effectivement mérités.


    http://philoscience.over-blog.com/article-perdons-nous-connaissance-par-lionel-nac-43650908.html: Lionel Naccache vient de publier un nouvel essai, « Perdons-nous connaissance » où il s'interroge sur le sens que peut prendre ce concept dans une société telle que la nôtre. Elle se proclame en effet société de la connaissance et dans le même temps, se définit comme une société de l'information. Ces deux qualificatifs sont effectivement mérités. Non seulement les œuvres de toutes sortes sont diffusées très largement (là où du moins le permettent les quelques censures qui demeurent) mais de plus en plus de gens jusque là inaudibles peuvent témoigner et discuter en leur nom propre ou en celui de minorités diverses. Beaucoup d'esprits chagrins déplorent la cacophonie qui en résulte. Ce n'est pas le cas de Lionel Naccache aux yeux de qui les outils de la société de l'information, notamment Internet, rendent d'immenses services. Mais pour lui ils ne règlent pas cependant la question de la connaissance. Si Internet favorise en effet indiscutablement l'accès aux travaux scientifiques qui sont quoiqu'en pensent les sceptiques les seules sources objectives de connaissance sur l'univers et sur tout ce qu'il contient, il favorise aussi la diffusion d'informations dont nul ne peut dire si elles sont inventés et propagées par des esprits y trouvant un moyen de se donner de l'importance, ou si elles renvoient à des faits réels dont nous n'aurions pas été jusqu'à présent informés. 2)
    Au delà de la question des relations entre l'information et la connaissance, qui est en effet de plus en plus d'actualité, Lionel Naccache se pose une autre question, dont les implications en philosophie des sciences sont tout aussi grandes: pourquoi les traditions antiques dont témoignent les textes qui nous sont parvenus manifestent-elles une telle défiance à l'égard de la connaissance? Qu'est-ce alors que cette connaissance, décrites comme tellement dangereuse par certains philosophes grecs et surtout par les écritures chrétiennes et juives ? Pourquoi alors aujourd'hui nos sociétés de la connaissance, excepté les contestataires des techno-sciences (dont ils font eux-mêmes sans s'en rendre compte un mythe), ne semblent plus s'en défier?
    Lionel Naccache pense répondre à cette double question en rappelant que la connaissance n'est pas seulement une relation entre un Réel extérieur jusque là inconnu et une description qui en est donnée sous une forme impersonnelle. C'est aussi une relation avec le sujet qui procède à cette description ou qui s'en inspire pour améliorer son rapport au monde. Or le sujet n'est pas l'observateur neutre que postulent beaucoup de sciences. C'est une entité singulière, prenant la forme d'un corps et d'un esprit profondément déterminée par des contraintes lui interdisant un rapport objectif avec ce qu'il perçoit du monde. Les constructions que fait son cerveau des données perçues par ses sens, les interprétations qu'il donne ensuite à ces constructions en fonction notamment de la façon dont elles sont reçues par les autres, correspondent à un besoin vital pour le sujet: élaborer une description de lui-même et de son histoire, autrement dit de son Je, qui soit aussi valorisante, mobilisatrice, que possible.
    On a pu dire en effet, Lionel Naccache en particulier dans le Nouvel Inconscient, que le Je était une projection hallucinée de l'être tout entier sur l'écran de visualisation permis par la conscience. Il est donc important de montrer comment le Je conscient crée ou utilise l'information, qu'elle soit de détail ou qu'elle s'organise en vastes systèmes de connaissances, pour améliorer son adaptativité dans le conflit darwinien pour la survie qui l'oppose aux autres espèces et à ses semblables.
    Pour illustrer cette thèse, que nous espérons avoir résumée sommairement sans la déformer, la première partie du livre propose une incursion dans la Mythologie dont la précision surprendra ceux ayant un peu oublié l'histoire des philosophies et des religions. Il aborde successivement la mythologie grecque et les propos de Platon, les écritures de la Bible et leurs commentaires par le Talmud, les légendes plus récentes de la Renaissance européenne, avec notamment le mythe du Dr Faust. Dans tous ces cas, selon les auteurs inconnus de ces légendes, ceux qui avaient voulu s'alimenter aux fruits de la Connaissance ont subi des destins effroyables, aussi nobles qu'aient pu être leurs intentions.
    Lionel Naccache montre ensuite comment le Siècle des Lumières et les Encyclopédistes ont pris le contre-pied de ces attitudes, en proposant au contraire l'accès de tous aux connaissances scientifiques de l'époque, au risque de s'illusionner sur l'influence bénéfique que pouvait avoir l'esprit des Lumières sur des cerveaux encore englués dans les anciennes croyances. Il se pose sans apporter de réponses précises, on le conçoit, une question sur laquelle nous allons revenir: à quel type de Connaissance faisaient allusion les anciens mythes et pourquoi voulaient-ils tellement en tenir écarté le vulgum pecus ? L'hypothèse selon laquelle les institutions religieuses et politiques voulaient s'en réserver le monopole est un peu trop simple sans doute.
    La deuxième partie du livre, plaisamment intitulée Une histoire de neurosciences-fiction, est toute différente. Elle commente l'expérience clinique de l'auteur et de nombre de ses confrères confrontés aux véritables drames que sont les destructions, même plus ou moins localisées, des différentes aires cérébrales qui concourent à la cohérence d'ensemble de l'esprit et à son expression à travers le langage et les comportements sociaux. Les ouvrages de neurosciences rapportent dorénavant nombre de tels cas, mais il est bon de les entendre évoqués par un clinicien situé si l'on peut dire en première ligne.
    On y voit notamment comment les rationalisations, c'est-à-dire les histoires que se raconte un patient pour expliquer un déficit de perception ou d'interprétation sans l'imputer à un trouble interne qui en est la vraie cause mais qu'il ne peut observer lui-même, construisent pour ce patient un univers de connaissances très satisfaisant, mais qui repose évidemment sur une distorsion profonde de ce que nous appelons la réalité. Freud avait fait la même constatation à propos des rationalisations que dans certaines névroses et psychoses le malade invente pour la plus grande gloire de son moi. On sait que dans les rêves, chacun d'entre nous fait de même à tous moments et à tous propos, sans que cela, en principe, ne perturbe la bonne qualité de notre jugement lorsque nous nous réveillons.
    Ces exemples tirés de la clinique permettent à l'auteur de revenir sur la définition de l'acte de connaissance. Cet acte met en scène trois unités, le sujet X tel qu'il était et se représentait à lui-même avant de connaître l'objet Y, cet objet Y tel qu'il existe dans le monde extérieur au sujet et enfin le sujet X', le sujet tel qu'il est devenu après avoir assimilé l'objet Y. Les objets de connaissance sont multiples, mais tous modifient en le réorganisant le sujet qui s'en laisse pénétrer et quasiment coloniser. Si l'on veut tenter de comprendre le monde extérieur générant les objets de connaissance qui circulent à son propos, il ne faut pas se limiter à analyser les informations brutes en émanant, mais les sujets et plus précisément, dans le champ de la conscience, les Je des sujets qui reprennent et interprètent ces informations, en les présentant comme participant à un processus objectif de connaissance. Les sujets subissent en recueillant ces informations des transformations plus ou moins profondes qui se traduisent par des stratégies destinées à protéger ou renforcer leurs Je. Dans certains cas, ces informations leur semblent si dangereuses pour la salubrité de ces Je qu'ils les nient purement et simplement. C'est un déni de réalité, que nous pourrions illustrer par le fameux déni de grossesse dont on a fait mention récemment dans la presse 3)
    La troisième partie du livre est consacrée à l'analyse de la société de l'information telle qu'elle s'établit dans les régimes démocratiques où notamment l'Internet se déploie sans censures trop marquées. Lionel Naccache insiste là à juste titre sur le fait que cette information n'est pas pour autant synonyme de connaissance généralisée et uniformément répartie. Il est bon de démonter les illusions que recèle le concept, au moins pour les naïfs qui le prendrait au pied de la lettre. Au delà de considérations qui seraient familières pour nos lecteurs à qui n'échappe aucune des illusions mais aussi aucune des vertus du média que nous utilisons constamment, il souligne à nouveau que ne pas prendre en compte les « sujets qui parlent » conduit directement à l'erreur grossière et à la manipulation. Beaucoup de stratégies de captation de l'intérêt (et du soutien financier) des citoyens de la société de l'information s'appuient sur le prestige tenant à l'argumentation pseudo-technique et pseudo-scientifique. Il cite à cet égard, après bien d'autres, mais qui ne sont pas encore assez nombreux, les mensonges des défenseurs de l'Intelligent Design.
    Nous sommes bien placés sur ce site pour en parler puisque nous avons subi les attaques de ceux qui, derrière la Templeton Foundation américaine, prétendent donner des bases scientifiques aux affirmations des Ecritures chrétiennes. Aujourd'hui, les défenseurs d'une prétendue science islamique ne procèdent pas différemment (voir par exemple notre brève d'actualité récente : A la gloire de la science islamique 4).
    Dans cette troisième partie, qui comprend beaucoup d'incidentes que nous ne pouvons mentionner, figure une critique que nous estimons tout à fait fondée. Elle s'adresse aux mathématiciens, toujours aussi nombreux, qui prétendent, avec à leur tête l'illustre Alain Connes, déchiffrer un univers existant en soi, en dehors des cerveaux humains et même des réalités matérielles, celui des mathématiques pures. Il montre aisément que les mathématiques, quelles que soient leurs formes et langages, sont des constructions trouvant leurs sources, non seulement dans les intentions des sujets qui les « découvrent », mais dans des bases neurales spécifiques, propres non seulement aux primates que nous sommes mais aussi à de nombreux autres animaux, comme l'a récemment montré Stanislas Dehaene. Il s'agissait initialement de constructions de survie permettant de mettre de l'ordre, en fonction des expériences empiriques vécues par les sujets, dans le flux constant des phénomènes qui les assaillaient.

     

     

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